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Six points clés pour bien utiliser les conservateurs d’ensilage d’herbe

Les conservateurs d’ensilage ont démontré leurs effets positifs sur la conservation des fourrages. Un large éventail de produits sont aujourd’hui proposés à la vente. Comment faire le bon choix et bien les utiliser pour optimiser cet investissement ?

Les conservateurs d’ensilage sont élaborés à partir de bactéries vivantes qui contribuent, selon l’activité de celles-ci, à améliorer l’acidification de l’ensilage et/ou sa stabilité aérobie. © C. Pruilh
Les conservateurs d’ensilage sont élaborés à partir de bactéries vivantes qui contribuent, selon l’activité de celles-ci, à améliorer l’acidification de l’ensilage et/ou sa stabilité aérobie.
© C. Pruilh

« Il existe plusieurs types d’additifs de conservation (additifs chimiques, additifs biologiques, enzymes…). Ils se distinguent par leur rôle et leur mode d’action », note Anthony Uijttewaal, responsable du pôle fourrage d’Arvalis - Institut du végétal. Certains accélèrent l’acidification naturelle, d’autres améliorent la stabilité aérobie (effets antifongiques retardant le développement des levures et moisissures).

Rappelons toutefois que les conservateurs ne se substituent pas aux bonnes pratiques de récolte et de réalisation d’un silo d’ensilage d’herbe, notamment une teneur en MS adaptée, un tassage de qualité, sans oublier un avancement du front d’attaque suffisant. Leur objectif est de maintenir une valeur la plus proche possible de celle du fourrage récolté. Donc si elle est médiocre, elle le restera.

« Techniquement le bénéfice porte sur la préservation de la matière organique et de la valeur alimentaire du fourrage (réduction de la dégradation des protéines) durant la conservation, sous réserve d’une bonne application. Le choix du conservateur se raisonne en fonction des caractéristiques du produit (teneur en sucres, pouvoir tampon), des conditions de récolte (taux de matière sèche) et de l’objectif recherché (acidification, stabilité aérobie) », poursuit l’ingénieur.

1 Les acides organiques (acides formique et propionique)

Selon le principe acide-base, l’ajout d’acides organiques fait baisser le pH dès l’application. L’acide formique réduit fortement le développement des bactéries pathogènes (butyriques et entérobactéries). L’acide propionique est moins acidifiant mais joue également un rôle de stabilisateur antifongique en permettant de retarder les échauffements. Leurs principales utilisations sont réservées aux ensilages humides (< 20 - 25 % MS) et de légumineuses, aux enrubannages insuffisamment préfanés (< 35 % MS) ou trop préfanés (> 70 % MS), ainsi qu’aux foins humides.
Ils s’appliquent à raison de 2 à 6 litres par tonne de fourrage brut selon le type de fourrage et sa teneur en MS. Leur coût est compris entre 3 et 6 euros par tonne de fourrage brut.

2 Les enzymes (amylase, hemicellulase, cellulase)

Les enzymes ne sont jamais proposées seules. « Elles sont associées aux bactéries lactiques. Les enzymes fournissent davantage de sucres solubles pour alimenter le processus de fermentation en pré-digérant les fibres facilement digestibles ou les sucres de réserve (amidon). »

3 Les bactéries lactiques homofermentaires

L’ajout de conservateurs à base de bactéries lactiques a pour objectif de les rendre majoritaires dans l’ensilage et d’orienter les fermentations vers la production d’acide lactique. « Ces inoculants biologiques présentent un intérêt sur des ensilages d’herbe préfanée qui ont concentré suffisamment de sucres. En effet, si les sucres sont limitants, l’ajout des bactéries ne jouera pas pleinement son rôle dans la chute du pH », souligne Anthony Uijttewaal.
Leur application se raisonne en nombres par gramme de fourrage frais. L’unité correspondante est le nombre de cfu (colonie formant unité). Il est généralement recommandé d’atteindre des niveaux de l’ordre de 105 à 106 cfu par gramme de fourrage frais.
Leur coût (avec enzymes le plus souvent) est compris entre 2 et 4 euros par tonne de fourrage brut.

4 Les bactéries lactiques hétérofermentaires

Les bactéries lactiques hétérofermentaires transforment les sucres solubles en acides lactiques et acétiques, ainsi qu’en 1,2-propanediol. Elles génèrent également un peu de pertes (dégagement de CO2). « Les effets de ces bactéries sur la chute de pH sont moins efficaces que les bactéries homofermentaires. Leur emploi est à réserver à des fourrages préfanés ou avec une teneur en matière sèche pouvant entraîner des échauffements au front d’attaque. L’acide acétique et le 1,2-propanediol, par leurs effets antifongiques, limitent l’échauffement de l’ensilage. Attention toutefois à assurer une durée de fermentation minimale de deux à trois mois pour bénéficier de cet effet même si les nouvelles souches de ces bactéries gagnent en rapidité d’action. »

5 Une application homogène

Les additifs doivent être appliqués de façon homogène dans la masse de fourrage. L’idéal est donc de les incorporer dans les réservoirs des ensileuses prévus à cet effet pour une pulvérisation en fines gouttelettes au niveau de l’accélérateur de l’ensileuse, favorisant ainsi une application homogène au cœur du flux de récolte. « L’application à l’arrosoir, même à chaque étalement de benne, est à proscrire car elle ne permet pas une répartition homogène dans toute la masse de fourrage. Les bactéries sont de tout petits organismes qui ne coloniseront pas tout le silo ! »

6 Des précautions d’emploi

« Les additifs biologiques sont par définition des organismes vivants. Il convient donc de respecter certaines précautions. À savoir, le stockage des produits doit se faire dans un endroit frais et sec, sans choc thermique. Pour la dilution, mieux vaut utiliser une eau peu, voire non chlorée, à une température proche de celle du stockage des bactéries. Enfin, pour éviter les phénomènes de sédimentation dans la cuve de l’applicateur, les additifs sont à préparer par demi-journée de travail, en homogénéisant bien avant incorporation dans la cuve », conclut Anthony Uijttewaal.

Attention au dosage

Il faut apporter une dose suffisante pour bénéficier de l’efficacité technique d’un conservateur sans trop dépasser la dose du fait de son coût. Or, lors de l’application des additifs, il n’est pas toujours évident de parvenir au bon dosage. « Pour les acides et les bactéries lactiques, une fois dilués dans l’eau, il faut appliquer un certain volume par tonne de fourrage brut. Alors que sur l’ensileuse, l’unité utilisée est en litres par heure, ce qui nécessite des conversions. Pour les réaliser et ainsi appliquer la quantité recommandée, il faut essayer d’apprécier le rendement, la teneur en matière sèche et le débit de chantier », indique Anthony Uijttewaal, responsable du pôle fourrage d’Arvalis - Institut du végétal.

Côté éco

L’obtention de références est encore nécessaire pour mieux établir les domaines d’intérêt technico-économiques de l’utilisation de conservateurs. L’ajout de bactéries lactiques homofermentaires est la solution la plus efficace pour réduire les pertes de matière organique sur l’ensilage d’herbe. À titre d’exemple, avec les résultats disponibles elles permettent une réduction de 4 % de perte de matière organique. Ainsi, pour un bon ensilage à 120-150 €/tMS, « l’économie de pertes » permet de rentabiliser l’utilisation d’un conservateur qui coûterait 4,7 à 6 €/tMS. « Les dernières références issues de la bibliographie sur les effets zootechniques de l’inoculation avec des bactéries lactiques homofermentaires, en vaches laitières, mettent en avant des effets nuls à très faibles mais positifs. Ce n’est donc pas sur l’amélioration de la productivité animale qu’il faut compter pour rembourser l’investissement », souligne l’ingénieur.

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