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Emploi agricole
Un paradoxe de plus pour l’économie française

C’est à Clermont-Ferrand que s’est posé la quinzième étape des colloques sur l’emploi. Beaucoup d’idées y ont décollé, même si leur envol reste perturbé par un florilège de «boulets» bien français.

Le colloque sur l’emploi, initié par la FNSEA, a permis de dresser un état des lieux des freins à l’attractivité des métiers agricoles.
Le colloque sur l’emploi, initié par la FNSEA, a permis de dresser un état des lieux des freins à l’attractivité des métiers agricoles.
© SG

Ecouter les besoins des employeurs agricoles, des acteurs du territoire et des partenaires sociaux, tel était l’un des objectifs du colloque sur l’emploi en agriculture, organisé, vendredi dernier, à l’école supérieur de commerce de Clermont-Ferrand. Quinzième du genre orchestré par le réseau FNSEA, ce rendez-vous a tenu ses promesses, chacun ayant pu exprimer son point de vue en toute transparence sur une problématique qui dépasse le seul cadre agricole. Le secteur fait travailler près d’un quart de la population française, tous statuts et métiers confondus. L’évolution des exploitations tend vers un recours accru à de la main-d’œuvre salariée. Problème : de nombreuses offres d’emploi en agriculture ne sont pas pourvues. Une enquête menée récemment auprès des demandeurs d’emplois a révélé que ceux qui ne cherchent pas dans le milieu agricole, ont une image du secteur particulièrement mauvaise, imaginant des conditions de travail catastrophiques assorties à des salaires de misère. Pour ceux qui cherchent dans l’agriculture, là-aussi les freins sont légions : manque de transport, pénurie de logement, question de la rémunération…Autrement dit, les métiers manquent d’attractivité.

 

Groupements d’employeurs

D’où la mobilisation de la profession, à travers des actions de communication, comme celle qui a démarré, il y a quelques semaines, sous l’angle «les métiers de l’agriculture. Ils font tourner la terre». Mais aussi grâce aux travaux menés avec les organisations syndicales et les collectivités territoriales. «Nous travaillons actuellement pour que les jeunes ne disposant pas de moyens de transports collectifs puissent passer leur permis dans le cadre du congé individuel de formation », a expliqué Anne Chambaret, agricultrice en Corrèze et membre de la commission nationale emploi à la FNSEA. Redynamiser le métier d’assistantes maternelles et réhabiliter les logements existants sont aussi deux pistes à creuser. Sur les contrats de travail, Anne Chambaret estime que « le CDD ne doit pas toujours être envisagé sous l’angle de la précarité ». L’émergence et la multiplication des groupements d’employeurs ont démontré leur intérêt à la fois pour les employeurs et pour les salariés. Pour les salariés, justement, le passage par un groupement d’employeurs peut permettre d’atteindre un temps plein, qui plus est, souvent en CDI. Côté employeur, Emmanuel Ferrand, agriculteur dans l’Allier, n’y voit que des avantages : « Le groupement est la bonne formule pour démarrer, pour pallier le surcroît de travail, pour apprendre à être patron, à gérer du personnel ». C’est un pas de plus vers la professionnalisation de chacun, pour sortir du cliché selon lequel le salarié serait un simple «pousse-brouette ».

 

Point de salut sans motivation

La loi de modernisation agricole a, par ailleurs, apporté sa pierre à l’édifice en permettant aux collectivités territoriales et locales d’entrer dans les groupements d’employeurs, dès lors que l’activité principale du salarié reste de nature agricole. Le principe est séduisant sur le papier, dans les faits l’articulation entre les différentes missions nécessite une organisation sans faille.

La motivation des salariés reste au cœur du dispositif. Et sur ce point précis, sans ternir le tableau, les déconvenues sont parfois au rendez-vous. Installé en Gaec, Emmanuel Ferrand en a fait les frais quand il s’est lancé dans la production de fraises. « La cueillette intervenait en mai et juin, donc nous avons eu recours à Pôle emploi. Le premier jour, 10 personnes étaient présentes pour travailler, le second, ils n’étaient plus que cinq et le dernier jour nous n’avions plus personne ». Moralité, l’exploitation saint-pourçinoise des Ferrand ne produit plus des fraises, mais des framboises, dont le ramassage débute le 30 juin pour s’achever un mois plus tard. Les 150 saisonniers présents sont à 80% des étudiants. Le recrutement se fait par bouche à oreille et chacun semble y trouver son compte.

Pour Jean-Marie Fabre, président des groupements d’employeurs du Cantal, la problématique de l’attractivité des métiers agricoles est le témoin criant d’un problème de fond de la société : la perte de valeur dans la notion de travail et de ruralité. « En termes de conditions de travail, on a bien avancé, j’ai même l’impression que nous sommes en avance par rapport à d’autres secteurs d’activité. En matière de rémunération aussi, je ne suis pas sûr que l’emploi agricole soit si en retard que ça ». La difficulté à recruter, en particulier des jeunes, n’est pas l’apanage de l’agriculture. Dans le domaine de la forêt aussi, si les besoins de main d’œuvre existent, les candidats ne se bousculent pas au portillon, comme a pu en témoigner Brigitte Fradin, à la tête d’une entreprise de travaux forestiers mécanisés à Ferrières-sur-Sichon : « La solution est peut-être d’aller chercher du côté de la formation, en favorisant l’alternance de manière à impliquer les employeurs à tous les niveaux ».

 

 

Compétitivité : «Chaque nouvelle étape est une galère !»

Compétitivité. Le mot est sur toutes les lèvres. Paraîtrait même que c’est parce que la France en manque, que notre pays n’arrive pas à sortir la tête de la crise. A en croire les entrepreneurs réunis, vendredi après-midi, la compétitivité est certes le problème de fond, mais selon eux, il s’autoalimente par un tas de mesures bien françaises très contre-productives. Le témoignage de François Berry, à la tête de la société Top Clean Packaging (Cartolux), à Peschadoires dans le Puy-de-Dôme est à ce titre édifiant. Il y a dix ans, l’entreprise qui travaille avec les dix plus grands groupes médicaux mondiaux affichait un chiffre d’affaires de 3 millions d’euros, aujourd’hui, elle en est à 30 millions d’euros. Une réussite qui passe par une remise en cause permanente pour sortir des projets très innovants. Ce que déplore François Berry, c’est le manque de réactivité de la puissance publique, « chaque fois que l’on a une étape à franchir, cela devient une galère ». Il souhaiterait agrandir son site français, mais le permis de construire tarde à arriver, alors pour éviter de perdre un marché, c’est son site italien qu’il va faire grossir. Les taxes en tout genre qui font que la puissance publique consent à donner d’une main, via des crédits d’impôts recherche…, l’entreprise le redonnent de l’autre main, François Berry n’y croit plus vraiment. On aura beau parler de choc de compétitivité, tant qu’il n’y aura pas un choc des mentalités, il y a fort à parier que la situation de la France ne s’améliore pas.

SG

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