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« L’héritage de Joseph Faure est de questionner le monde agricole et de l’accompagner vers l’avenir »

En ce mois de septembre 2024, Argentat-sur-Dordogne et la Chambre d’agriculture rendent hommage à un corrézien, Joseph Faure, à travers une exposition et une commémoration. Ce dernier est le fondateur il y a 100 ans des Chambres d'agriculture en France.


Joseph Faure naît en 1875 à Aumont, petit hameau de la commune d’Argentat. Cultivateur issu d'un milieu très modeste, il est viticulteur et possède quelques bêtes. Il aime se cultiver sur l’agriculture, possède l’esprit d’initiative et est très impliqué dans le syndicalisme agricole. C’est ainsi qu’en 1905, ce paysan fonde à Argentat, le tout premier syndicat d’approvisionnement agricole de France.
Quatorze ans plus tard, on compte en Corrèze 178 syndicats sur ce modèle, modèle qui a essaimé dans le pays.


Vu ses talents fédérateurs, on lui propose de s’engager en politique. Indépendant, autodidacte, de sensibilité radicale socialiste (le centre gauche sous la IIIe République), Joseph Faure devient, en 1921, le premier sénateur paysan de l’hexagone. Il s'investit beaucoup sur les questions agricoles, et, le 3 janvier 1924, il crée un projet de loi qui fonde les Chambres d’agriculture, alors que la profession agricole cherche à s’organiser.
Joseph Faure, c'est le père fondateur des Chambres d'agriculture et de l'organisation agricole française, qui a donné l'exemple, et qui va disséminer cet exemple sur la planète entière. Cela passe par l'organisation d'État, les ministères et l'organisation des agriculteurs, par les Chambres d'agriculture ", indique Michel Queille de la Chambre d'agriculture de la Corrèze. " L'assurance des biens, l'assurance des personnes, le syndicalisme, ou encore le crédit. Toute cette organisation découle de son discours fondateur du 3 janvier 1924 au Sénat."


Cette organisation du système agricole français établie alors est de nos jours toujours en vigueur. Il devient ainsi le premier président national de l’APCA (l’Assemblée Permanente des Chambres d’Agriculture), de 1927 à 1940.
« Un corrézien discret qui ne recherchait ni les honneurs ni la gloire », relève son petit-fils. « Humilité et solidarité étaient son slogan et restent toujours celui de la famille ».


Les Chambres d’agriculture


« À leur création, les Chambres ont été l’un des leviers majeurs d’une agriculture exsangue de main-d’œuvre en accompagnant, pas à pas, la révolution d’un progrès vital pour nourrir tout un pays et où chaque lopin devait devenir une parcelle nourricière » déclare Sébastien Windsor, président des Chambres d’agriculture.
 

Lors de la première guerre mondiale, 550 000 agriculteurs sont tombés au combat et 500 000 sont rentrés blessés. Suit un exode rural grandissant à cause des conditions de vie difficiles. Les pouvoirs publics d’alors réfléchissent à une représentation officielle de l’agriculture française pour produire des plans d’ampleur de relance à l’échelle du pays. Il faudra plusieurs années de débats et de controverses pour que la loi aboutisse.


Et ça marche, d’autant que de nombreux progrès tels que l’arrivée de l’eau courante et de l’électricité, la facilitation d’accès à la propriété, les crédits à taux réduits et la mécanisation dans les campagnes permettent un essor de la productivité.


Mais sous la deuxième guerre mondiale, les syndicats sont dissous et les Chambres trouvent refuge à Limoges, puis l’APCA est transférée à Clermont-Ferrand en zone libre. Il faudra attendre 1949 pour que les préfets reçoivent l’instruction du Gouvernement de reconnaître les Chambres d’agriculture et aux présidents de celles-ci de retrouver le droit de représentation légitime des agriculteurs français.
 

À la sortie de la guerre, la production agricole ne représente plus que les deux tiers de celle de 1938 et les agriculteurs manquent de tout. Grâce au plan Marshall, la mécanisation et la modernisation s’accélèrent. Les chambres vont alors s’octroyer une mission qui sera primordiale pour les années à venir, celle de « la réalisation de projets d’intérêt général notamment l’éducation professionnelle, le progrès technique et l’équipement individuel et collectif de l’agriculture ».
 

En 1959, un décret va poser les bases de la diffusion des connaissances techniques, économiques et sociales nécessaires aux agriculteurs pour permettre l’élévation de leur niveau de vie et augmenter la productivité des exploitations. Suivent en 1960 des lois relatives à la formation professionnelle des jeunes et à la création dans chaque département d’un nombre suffisant de lycées et collèges agricoles, dont la gouvernance verra, au fil des années, une présence renforcée des Chambres. 

Dès 1957, l’institution joue un rôle déterminant dans l’élaboration d’une agriculture européenne et en 1962 avec la naissance de la politique agricole (PAC). Pour accélérer la modernisation, les Chambres emploient, en 1966, près de 2 500 conseillers agricoles sur tous les territoires pour dispenser formation et perfectionnement.


En 1972, Jacques Chirac alors Ministre de l’agriculture, se rapproche des syndicats et des Chambres d’agriculture. Leur objectif est d’apporter une aide à la modernisation, d’organiser la production et de soutenir certaines régions rurales. Leur impératif, de soutenir le renouvellement des générations et de voir les prêts augmenter. Ainsi l’agriculture devient-elle une activité performante, la France le deuxième pays exportateur de produits agricoles après les États-Unis.
Cependant cette production massive va devenir un problème majeur. Le mauvais écoulement de certains produits sur plusieurs marchés engendre un fort déséquilibre entre l’offre et la demande. Tel que le démontre la crise du lait, on crée des quotas et pour les producteurs, les recettes chutent alors que les charges demeurent.


À partir des années 90, la France et l’Europe sont confrontées à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), parallèlement la première grande réforme de la Politique Agricole Commune est adoptée et la logique de « produire plus pour gagner plus » n’est plus à l’ordre du jour.


Dès lors, les Chambres de l’agriculture organisent une réflexion globale s’appuyant sur de nombreux sondages réalisés auprès des agriculteurs pour mettre en mouvement une nouvelle organisation qui, grâce à leur expertise, permettra de développer un accompagnement systématique auprès des agriculteurs français à travers leurs problématiques. Des acteurs capables d’optimiser, d’anticiper d’innover et d’offrir des services de proximité en faveur du développement d’une agriculture
« durable pratiquée par des agriculteurs responsables ».


La commémoration


Lors de la commémoration du centenaire et alors que de nombreux élus étaient présents pour déposer une gerbe devant sa statue, Daniel Couderc, Président de la Chambre d’agriculture de la Corrèze rappelait : « En début d’année, les problématiques agricoles ont fait la une des médias. Jamais nous n’avions vu une telle mobilisation ! Toutes les filières confondues étaient réunies pour dénoncer la suradministration, les normes toujours plus exigeantes, une concurrence toujours plus féroce avec les accords de libre-échange, des prix qui ne sont plus au rendez-vous, et une Europe qui s’éloigne de ses fondamentaux : nourrir et protéger son agriculture. »
Et le Président de conclure : « Notre accompagnement auprès des agriculteurs corréziens est notre cœur de métier. L’agriculture doit relever de grands défis : le changement climatique, nourrir une population croissante, préserver l’environnement. »
 

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