Le statut du fermage doit contribuer au renouvellement des générations
Mercredi 22 et jeudi 23 février, à Villerest (Loire), la FDSEA 42 accueillait le congrès de la Section nationale des fermiers et métayers (SNFM), association spécialisée de la FNSEA.
C’est un discours empreint d’émotion, néanmoins maîtrisée, que Bertrand Lapalus prononçait jeudi en fin de congrès de la Section nationale des fermiers et métayers (SNFM). Non seulement parce que ce rendez-vous se tenait dans le Roannais, où il est agriculteur, mais aussi parce qu’il s’agissait de son dernier discours comme président de la section. Pendant trois ans, « nous avons eu à cœur de travailler, au regard des évolutions démographiques agricoles, sur la transmission des exploitations à des jeunes agriculteurs, assurait Bertrand Lapalus. Nous avons œuvré pour rendre le statut du fermage plus attractif, pour faciliter l’évaluation de l’exploitation agricole cédée à sa valeur de rentabilité économique, pour encourager le portage du foncier, en faciliter l’accès et éviter l’agriculture totalement déléguée. »
Statut du fermage et loi d’orientation
Bertrand Lapalus rappelait que plus de 70 % des terres sont exploitées en fermage. « Pour une grande majorité d’entre nous, agriculteurs, le premier contrat que l’on doit signer est un contrat pour louer des terres. Lors d’une transmission, il est primordial que le cédant et le nouveau preneur s’accordent avec le ou les propriétaires pour éviter tout écueil. » Selon lui, « le statut du fermage a besoin d’être réformé pour perdurer. De plus en plus de jeunes ont du mal à faire signer des baux et à reprendre des fermes dans leur globalité. » Dans l’objectif d’être forts et entendus, les membres de la SNFM et de la SNPR (section nationale des propriétaires ruraux) ont travaillé ensemble sur la réforme du statut du fermage. « L’accord¹ ne réglera peut-être pas l’intégralité des difficultés concernant la transmission, mais il pourra énormément la faciliter grâce à un statut du fermage plus en adéquation avec l’agriculture d’aujourd’hui et les nouveaux profils d’agriculteurs. »
Ce travail de concertation vient alimenter le rapport d’orientation que la FNSEA présentera lors de son congrès fin mars à Angers. « Cela nous laisse espérer une reprise de nos travaux dans leur intégralité par les pouvoirs publics dans la foulée », poursuivait le président. Effectivement, le Pacte pour la transmission et l’installation et la Loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA) sont en ligne de mire. Les responsables de la SNFM estiment que la future loi devra inévitablement aborder l’évolution du statut du fermage, d’autant plus que l’un des principaux objectifs de la LOA est la transmission. Patrice Chaillou, secrétaire général, prévenait : « Notre accord n’est pas un buffet froid où l’on prend que ce qui fait envie, c’est un tout indissociable. »
Définition d’agriculteur professionnel
La position de la SNFM est claire : si cet accord devait être traduit dans une loi sans les préalables, elle ne la soutiendrait pas, car ce sont eux qui lui donnent du sens. Pour Bertrand Lapalus, le statut de l’agriculteur professionnel ne vise pas à « exclure », mais à « apporter une vraie reconnaissance professionnelle pour tous ceux qui souhaitent devenir agriculteur et pour endiguer le développement de l’agriculture totalement déléguée qui empêche l’installation des jeunes agriculteurs. Nous avons besoin de cette reconnaissance afin de différencier ceux qui portent un vrai projet économique de carrière de ceux qui voudraient faire de l’agriculture avec de l’argent mais qui s’assimile plus à du loisir ou bien encore de l’optimisation d’aides PAC. »
Le statut d’agriculteur professionnel a également été évoqué dans le cadre de l’agrivoltaïsme. Le Gouvernement, pour répondre à la demande de la profession d’encadrer son développement, mentionne que « la vocation nourricière de la terre doit être prioritaire », et que le projet « s’inscrive dans le cadre d’un statut d’agriculteur professionnel », rapportait Bertrand Lapalus. Or, cette définition n’est pas inscrite dans la loi. « Faire référence à quelque chose qui n’existe pas dans la loi, c’est fort, ou plutôt, c’est bien français ! », s’indignait-il.
Perspectives de travail
Méthodes d’évaluation de l’entreprise agricole et portage du foncier ont également été débattus et sont apparus comme des sujets étant toujours d’actualité quand les perspectives de travail ne manquent pas à la SNFM. À commencer par la révision des modalités de calcul de l’évolution du fermage en raison de la fluctuation importante des données économiques en seulement quelques mois et des inégalités grandissantes entre les départements du fait des aléas climatiques de plus en plus violents. Ou encore la formation : « Aujourd’hui, trop peu de personnes qui veulent s’installer connaissent le statut du fermage », mentionnait Bertrand Lapalus Lors du parcours à l’installation, « il serait logique de dispenser aux agriculteurs de demain une formation sur les enjeux du foncier, sa protection, sa location et les solutions de portage ».
1. L’accord politique de principe sur l’évolution du statut du fermage entre la SNFM et la SNPR été validé par le conseil d’administration de la FNSEA en 2020. Il tient en six points et deux préalables. Ces derniers sont : le statut de l’agriculteur professionnel et le renforcement du contrôle des structures.
Sébastien Delafosse succède à Bertrand Lapalus
Agriculteur dans la Manche en production laitière, Sébastien Delafosse, 53 ans, succède à Bertrand Lapalus au poste de président de la section nationale des fermiers et métayers (SNFM). Denis Labri devient secrétaire général. Après deux mandats passés aux côtés de Patrice Chaillou, désormais ancien secrétaire général et Bertrand Lapalus, le nouveau président de la section est conscient du chantier qu’il reste à conduire. « Nous avons beaucoup travaillé et je pense qu’il faut continuer en ce sens. Lors de ce congrès, beaucoup de choses ont été dites et revendiquées. Il y a sans nul doute du grain à moudre pour les trois prochaines années, même si je pense qu’elles ne seront peut-être pas assez longues pour répondre aux attentes de nos fermiers ». Ainsi, la SNFM souhaite continuer de travailler sur « la transmission bien sûr, mais il y a encore des sujets, comme la fiscalité, le portage de capitaux, ainsi qu’un meilleur suivi sur les installations ». D’où le besoin urgent d’établir « une feuille de route pour les trois prochaines années ». Au nouveau président de conclure : « Ce qui m’importe avant tout, c’est le statut du fermage. Il faut mettre les terres à bail car c’est la seule solution pour les jeunes installés de pouvoir investir dans leur outil de production avant d’acheter du foncier, de le rendre performant, économiquement viable et de laisser au fermier la possibilité d’entreprendre comme il le souhaite en fonction de sa production. »