Le projet AP3C plus que jamais d’actualité
Alors que la sécheresse continue de sévir dans le Massif central, le projet adaptation des pratiques culturales au changement climatique (AP3C) prend tout son sens en offrant des alternatives intéressantes.
Des prairies brûlées comme jamais, des maïs qui par endroit ont manqué d’eau à tous les stades de leur croissance… L’année 2019 restera dans les annales climatiques comme l’une des plus désastreuse pour l’agriculture. Une année à oublier donc, mais dont les dégâts sont tels qu’il sera difficile de faire une croix dessus, d’autant qu’en 2018 dès la fin du printemps, « nous étions déjà rentrés dans une période de canicule et de sécheresse particulièrement sévère », suggèrent tous les observateurs. L’automne et l’hiver qui ont suivi, pas suffisamment arrosés, n’ont fait qu’aggraver la situation. Parce que ce type de scénario sera dans les années à venir, amené à se répéter, la profession agricole du Massif central réunie autour de la Copamac-Sidam, a lancé en 2015, le projet AP3C : Adaptation des pratiques culturales au changement climatique.
Tous mobilisés
Une cinquantaine d’ingénieurs, techniciens, conseillers de onze chambres d’agriculture épaulée par un climatologue et des acteurs de l’Institut de l’Élevage sont mobilisés sur ce dossier crucial. Le travail a démarré par une analyse fine des données climatiques de 1980 à 2015, extrapolée à l’horizon 2050. « Nous avons des projections encore plus pessimistes que celles qui sont régulièrement livrées par les instituts car elles s’appuient sur des données observées à l’échelle des différents territoires du Massif central », explique Marie Tissot, chargée de mission au Sidam. La collecte des données est une première étape, qui ne fournit toutefois pas de solutions. « Les conseillers de terrain en fonction de ces éléments sont en train de construire des indicateurs agro-climatiques portant sur l’herbe, les céréales, le maïs, la vigne ou encore les dérobés. Dates de fauche, mise au pâturage, fenêtres de récolte…ce sont tous ces éléments qui vont bouger ».
Des agriculteurs résilients mais jusqu’à quand…
La bonne nouvelle, c’est que déjà en trente-cinq ans, les agriculteurs ont su évoluer. Systèmes et pratiques ont changé au gré de l’économie mais aussi du climat. « La capacité de résilience des exploitations n’est pas à négliger ». Reste à savoir si ce qu’ont réussi à faire les paysans hier, seront-il capables de le faire demain ? « Anticiper l’imprévisible, nous sommes complètement dans ce phénomène », résume Marie Tissot. Non seulement le monde agricole doit composer avec la lame de fond du changement climatique mais aussi avec des épisodes extrêmes de plus en plus fréquents. « Une des pistes importantes sur laquelle nous travaillons est la diversification des systèmes. En ne mettant pas tous leurs œufs dans le même panier, les agriculteurs peuvent gagner en marge de manœuvre ». Mélanges d’espèces, assolement plus varié, constitution de stock quand la saison le permet… sont autant de leviers d’avenir. « Ne pas gaspiller l’herbe », reste le credo distillé par les conseillers sur le terrain. Au cœur de la plus grande prairie d’Europe, cette préconisation est essentielle. Au-delà de l’approche climatique et agronomique, le projet AP3C tend désormais vers l’expertise systémique. « On va se détacher progressivement de l’échelle parcellaire pour tendre vers des préconisations à l’échelle de la gestion du troupeau, de la dimension de l’exploitation, des bâtiments, du matériel… », poursuit Marie Tissot. À ce stade, l’enjeu est aussi de chiffrer toutes ces adaptations. En 2020, le projet devrait entrer dans une phase plus opérationnelle avec l’élaboration de fiches techniques, des rendez-vous avec des agriculteurs, des expérimentations…