« La brebis a sa place partout ! »
Interview de Michèle Boudoin, présidente de la Fédération nationale ovine.
Une semaine avant la tenue à Rodez du congrès de la Fédération nationale ovine (les 19 et 20 avril), sa présidente détaille les sujets d’actualité.
Comment se porte la production ovine en France ?
La conjoncture est plutôt favorable pour les éleveurs ovins français. En cette période de Pâques, la consommation est propice à la viande d’agneau. Cette année, nous n’avons pas vécu le même effet dévastateur sur les marchés qu’en 2017. Nos produits s’écoulent bien, il faut dire que la production est en baisse en France et les importations ont été limitées, de fait, il manque de l’agneau et comme la demande se maintient, la situation est favorable. Pour l’heure, la concurrence avec l’Angleterre est aussi mesurée, je m’en félicite à l’instant T mais je veux rester vigilante sur le moyen-long terme car il s’agit peut-être de mesures de rétorsion en vue du Brexit.
Qu’en est-il de la consommation ?
Je reste très inquiète car nous affichons toujours une baisse (-1 %) entre 2016 et 2017. Nous devons être très offensifs dans notre communication auprès des nouvelles générations. La FNO a mené un projet avec les collectivités territoriales pour organiser une journée de l’agneau dans tous les lycées et collèges de France. Ce projet sera construit dans les régions en intégrant tous les opérateurs de la filière.
Justement la table-ronde du congrès évoquera le débouché avec la restauration collective. Où en êtes-vous sur ce projet ?
Nous voulons mettre en lumière les expériences qui fonctionnent en faisant témoigner par exemple le réseau Restau’co à Paris pour convaincre les opérateurs d’aval, notamment les abatteurs, de l’intérêt de travailler nos produits autrement qu’en carcasses, pour répondre aux attentes des consommateurs. Au-delà du gigot et du navarin, nous devons proposer des portions à burger, des nuggets,... des produits simples et rapides à manger.
Quelle est l’actualité de la filière ?
Nous rencontrons les mêmes difficultés que dans les autres filières d’élevage. Lors de notre huis clos au congrès, nous parlerons bien sûr des bouleversements de l’aide ovine qui désormais exclut le soutien à la qualité et aux jeunes installés. Une aberration ! Au Président Macron, j’ai rappelé que 85 % des brebis étaient installées dans des zones difficiles, là où on ne peut pas faire autre chose. Et leur présence sur ces territoires empêche la déprise. On parle d’utilité agronomique, d’attractivité locale, d’aménagement du territoire, d’environnement,...
Bien sûr nous évoquerons aussi nos inquiétudes suite au Brexit, les discussions sont en cours au niveau européen sur les garanties de contingentement, les droits de douane, les contraintes sanitaires,...
Et le loup ?
Il en sera forcément question au congrès, qui se déroulera en Aveyron, département impacté par ce prédateur. Notre objectif reste : zéro attaque et le droit de défendre nos troupeaux hors plafond. La FNO travaille avec la FNSEA, les JA, l’APCA sur un décret d’application du plan loup territorialisé dans les départements. Nous tenons à ce que tous les éleveurs en France soient traités sur un pied d’égalité, qu’ils soient en zone de colonisation ou concernés depuis plus de 25 ans. Le loup n’est plus menacé en France, les éleveurs n’ont pas les moyens de s’en protéger. Les élus nous soutiennent sur ce dossier mais les discussions sont difficiles avec Nicolas Hulot et Stéphane Travert.
Quel regard portez-vous sur l’élevage ovin en Occitanie ?
Je suis ravie de ce choix de région pour notre congrès, car l’Occitanie élève plus de 30 % des brebis de France, sur des territoires porteurs de valeur ajoutée avec de nombreux signes de qualité en lait comme en viande, des territoires attractifs grâce au pastoralisme qui entretient les paysages. La production ovine a une vraie carte à jouer localement. Je veux être optimiste pour l’avenir même si les défis à relever sont nombreux.