FNPL : un plaidoyer engagé pour l'élevage laitier
Si le prix du lait a redonné le sourire dans les fermes, l'avenir de l'élevage laitier tricolore ne s'annonce pas un long fleuve tranquille et les combats de la FNPL s'avèrent nombreux.
Convié à intervenir jeudi 22 juin sur l'implication des producteurs dans l'enjeu RSE (responsabilité sociétale des entreprises, lire par ailleurs) au sein des filières laitières devant l'assemblée générale d'Agrolab's, Benjamin Guillaumé, directeur de la FNPL (Fédération nationale des
producteurs de lait, association spécialisée de la FNSEA) depuis début mai, a dressé les enjeux et combats pour la production laitière à l'heure d'une conjoncture plus favorable. Avec un premier motif de satisfaction, sur la mère des batailles du syndicat, le prix du lait. "On a cranté des avancées avec les loi Egalim et Egalim 2 ; on a eu des progressions aussi grâce aux marchés mondiaux, fait valoir Benjamin Guillaumé. Aujourd'hui, on a un prix du lait à un niveau assez haut, certes pas toujours suffisant face à l'envolée des coûts de production sur les exploitations. L'enjeu actuel est de cranter ce prix du lait sur le marché intérieur, d'où l'exemption qu'on a obtenue sur les négociations commerciales pour la filière laitière. C'est un point important de préserver le revenu des producteurs dans la négociation avec la grande distribution."
Des bienfaits à faire valoir
Second enjeu, et pas des moindres, défendre l'élevage attaqué de toutes parts tant sur le plan médiatique qu'institutionnel (cf. préconisations de la Cour des comptes), en portant haut les externalités positives de l'élevage laitier et en déconstruisant les poncifs erronés : "Non, l'élevage ne vit pas aux crochets de la société avec des perfusions de la Pac (Politique agricole commune), assène le directeur de la FNPL. Au contraire, les objectifs de la Pac, c'est bien de fournir une alimentation de qualité, à des prix accessibles pour le consommateur, ce n'est pas d'aller chercher des productions à l'étranger et finalement d'importer des gaz à effet de serre qu'on nous reproche en France et en Europe. L'enjeu est vraiment pour nous de remettre en avant les atouts de l'élevage laitier."
À cette fin, la FNPL a présenté au dernier Salon de l'agriculture un plaidoyer pour l'élevage laitier, promouvant les atouts santé du lait et des produits laitiers, les bienfaits de cet élevage en matière de biodiversité et de bien-être animal, mais également en termes économiques avec les emplois liés à la filière sur les territoires ruraux (298 000 emplois au total). Ce plaidoyer, affiné et nourri d'études scientifiques, sera diffusé lors des salons professionnels de l'automne et déployé dans l'Hexagone de manière offensive dans les prochains mois.
Fausses bonnes idées européennes
C'est aussi sur le terrain européen que la FNPL est mobilisée, face aux menaces que des projets - ou révision - de directives européennes font peser au-dessus de la ferme laitière française. À commencer par la directive sur les émissions industrielles (IED). Si la commission agriculture du Parlement européen a suivi la position professionnelle, à savoir un statu quo continuant d'exclure les bovins de cette réglementation, les députés de la commission environnement ont émis un tout autre avis, à quelques voix près cependant. "Tout va se jouer en plénière du Parlement mi-juillet, indique le directeur de la FNPL. On se bat pour faire comprendre aux parlementaires européens qu'il faut laisser les bovins en dehors de la directive industrielle." La FNPL se veut tout aussi vigilante, sur un autre projet, celui d'une révision de la législation communautaire en matière de bien-être animal, avec, là encore, de supposées bonnes intentions qui pourraient avoir un effet contraire. "Ce n'est pas une volonté des producteurs de ne pas y aller, appuie Benjamin Guillaumé. Mais les propositions faites sur les veaux, l'interdiction potentielle des niches individuelles... iraient finalement à l'encontre du bien-être et de la santé des animaux : si on met des veaux ensemble, on va faire circuler des maladies. Il faut faire comprendre qu'il y a des raisons aux systèmes existants. On essaie de ramener un peu de pragmatisme, de réalité du terrain aux études scientifiques."
RSE par nature
Dans ce plaidoyer en faveur de l'élevage laitier tricolore, le directeur de la FNPL souligne par ailleurs que finalement, les producteurs sont pleinement engagés par nature dans une démarche RSE, sans le savoir ou sans apposer ce terme sur leurs pratiques. En valorisant des prairies, puits de carbone avérés, l'élevage laitier français dans sa diversité est partie prenante de la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement climatique, et les 16 200 diagnostics carbone déjà réalisés sur les fermes laitières permettent d'améliorer encore le bilan carbone de ces dernières via des adaptations de pratiques ou encore la production d'énergies vertes. "Tout en restant résilient économiquement, glisse le directeur. Si on n'a pas des fermes rentables, la dimension RSE de la filière laitière ne sera pas viable à terme."
Dernier enjeu, majeur, évoqué par Benjamin Guillaumé : le renouvellement des générations au sein d'une profession qui affiche l'un des plus faibles taux de remplacement. "Avec plus de la moitié des producteurs qui ont plus de 50 ans, on a devant nous un défi immense, celui d'installer des jeunes. Et ce en montrant que la filière et le métier peuvent être attractifs alors qu'ils entendent par ailleurs que c'est pénible, compliqué..."