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« Embaucher plutôt qu’agrandir grâce à la production porcine »

À Verneiges, dans la Creuse, les frères Chassagne épaulés par leurs deux salariés ont trouvé leur rythme de croisière entre leur troupeau de blonde d’Aquitaine et leur atelier porcin qui n’a cessé de s’étoffer depuis le début des années 2000.

Gilles Chassagne, au premier plan, Cassandra et Bertrand, au second plan, les deux salariés du Gaec creusois.
Gilles Chassagne, au premier plan, Cassandra et Bertrand, au second plan, les deux salariés du Gaec creusois.
© sc

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lors que les premiers froids engourdissent la campagne creusoise, au détour d’un chemin, des bruits de marteau-piqueur entrecoupés de flash infos et de tubes des années quatre-vingt-dix percent le silence. Comme bon nombre de paysans, Gilles Chassagne a déjà enfilé sa combinaison et œuvre avec son équipe de choc : Bertrand et Cassandra, dans sa porcherie depuis tôt le matin. Si sur l’exploitation, le travail ne manque pas, l’ambiance est bon enfant. « Ici, la parité est respectée », plaisante Gilles. C’est à la faveur de la progression continue du cheptel porcin, que le recours au salariat est devenu indispensable. Lorsqu’il s’installe en 1997, aux côtés de ses deux frères, eux-mêmes installés en 1991 à la suite des parents, Gilles a déjà trente ans, et une expérience professionnelle de dessinateur industriel et de commercial qui lui sera précieuse. « Depuis tout gamin, on a baigné dans l’agriculture, mais nos parents nous ont toujours dissuadé de s’engager dans cette voie »… Au fil des années, cet attachement quasi viscéral à la terre sera plus fort. En 1997, l’exploitation ne compte qu’un troupeau de bovins¹. Sans possibilité d’agrandissement, les associés réfléchissent à la création d’un atelier hors-sol. La volaille n’étant pas retenue, ce sera donc des porcs. Culturellement et historiquement, c’est une première pour l’exploitation. « Au début, on a fait ce choix par défaut ne pouvant pas augmenter le troupeau de bovins, mais aujourd’hui avec le recul, on a bien fait car la production porcine est devenue le troupeau de tête », analyse Gilles. De 100 truies au départ, avec une activité de naissage et orienté multiplicateur, l’atelier s’étoffe régulièrement, pour accueillir 330 truies aujourd’hui. Huit bâtiments sont sortis de terre au fil de ces vingt dernières années. En 2010, une fabrique d’aliments à la ferme est créée à la faveur d’une opportunité de rachat de terrain pour cultiver du blé, de l’orge et du maïs.

En 2013, la mise aux normes liée au bien-être animal est l’occasion d’augmenter le cheptel, « car on ne peut pas engager des frais sans production supplémentaire et donc revenu substantiel », estime Gilles Chassagne.

 

« Pour que je gagne de l’argent, il faut que mes porcs soient bien »

« On a fait suivre la main d’œuvre en conséquence. Des économies d’échelle ont été trouvées. Nous avons arrêté l’activité de multiplicateur trop contraignante et pas assez rentable, pour nous consacrer à l’engraissement² ». Côté organisation, les choses roulent désormais comme du papier à musique. Le travail est régulier, indépendant de la météo et de la saison. « Toutes les cinq semaines, il se passe la même chose. Les salariés sont mobilisés à 99% du temps sur l’atelier porcin ».

Il n’a pas fallu beaucoup de temps aux associés pour apprécier le caractère complémentaire entre les productions bovines et porcines. « L’élevage de bovins a été un bon tremplin pour démarrer l’atelier porcin, y compris pour offrir des garanties aux banques ». Disposer de deux productions, c’est aussi expérimenter l’intérêt de ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier. « Quand une production décroche, l’autre peut compenser et inversement », estime l’éleveur, qui reste toutefois convaincu qu’il faut avoir une vraie vocation de chef d’entreprise. La notion de prise de risque n’est en effet pas un vain mot avec « des revenus en dent de scie dont l’amplitude est régulièrement très forte ».

Forte de cinq UTH, l’exploitation est armée pour faire face aux défis de demain, avec toutefois certaines inquiétudes : la baisse des cours, le risque sanitaire et la vision de la société. « Nous sommes souvent attaqués sur les questions de bien-être animal, mais je réponds souvent que je fais du cochon comme les gens aiment l’avoir dans leur assiette ». L’an dernier, Gilles et ses deux frères ont investi 60 000 euros dans un système de brumisation et de refroidissement pour éviter les pertes liées aux canicules. « Pour que je gagne de l’argent, il faut que mes porcs soient bien », explique de manière très pragmatique l’éleveur. Pour lui, céder à toutes les doléances des uns et des autres ne résoudra rien, par contre, communiquer de manière objective sur ce qu’est l’élevage constitue la voie à emprunter. La voie de la raison.

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