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Des vautours tuent et dépècent une vache

Une centaine de vautours se nourrissent sur la carcasse d’une vache après l’avoir tuée, sur l’exploitation laitière de Pauline et Renaud Hugony sur la commune de Saugues.

Les vautours en plein festin...
Les vautours en plein festin...
© Pauline Hugony

Stupeur, incompréhension, inquiétude, colère… Renaud et Pauline Hugony, éleveurs de vaches laitières à Villeret sur la commune de Saugues, sont encore sous le choc ce jeudi matin, en regardant la carcasse d’une de leur vache servir de festin à une cinquantaine de vautours restés sur place depuis 3 jours. Et le défilé des curieux -quelque 250 personnes sur 2 jours- venus pour voir les vautours et faire des photos, ne fait qu’exacerber le malaise qui entoure ce fait divers pour le moins inhabituel.
C’est lundi matin, qu’aux alentours de 11h, l’éleveur a repéré 7 oiseaux posés près d’une vache couchée dans le pré qui jouxte la maison d’habitation et l’exploitation. «Je suis allé voir… c’était des vautours qui bouffaient une vache que j’avais vu aller boire au bac vers 9h30 alors que j’apportais justement de l’eau avec la tonne. Elle boitait certes, mais elle était bien vivante moins de 2 heures plus tôt» relate Renaud Hugony. Il ne comprend pas, persuadé que ces rapaces étaient des charognards. Et de plus, il n’en avait jamais vu sur le secteur, sauf une fois un vol d’une vingtaine d’individus vers St Alban en Lozère à une vingtaine de kilomètres de Saugues. Il se rappelle aussi de vautours vus sur La Besseyre St Mary il y a 2 ans.
Et le choc vient aussi du nombre d’oiseaux vus sur place. «Lundi matin, il y en avait 7, le soir je n’ai pas compté, mais mardi matin, il y en avait 17 et le soir plus de 70 (un gendarme a compté). Mercredi matin, alors que la carcasse était toujours là, ils étaient plus d’une centaine» explique le jeune agriculteur. Les vautours dorment sur place haut perchés sur les sapins à proximité de la charogne, qui devait être récupérée par les services de l’équarrissage au cours de ce jeudi.
Des questions… mais peu de réponses
C’est une première, disent les éleveurs et ce de par divers aspects : attaque sur un animal vivant, nombre de rapaces en présence, secteur pas reconnu pour accueillir des vautours… Ce fait divers pose alors de très nombreuses questions, auxquelles, les autorités venues sur place pour constater, n’ont pas pu, su ou voulu donner de réponses. La gendarmerie, l’Office français de la Biodiversité (1), la Direction départementale des territoires… tous ont été avertis, contactés par les agriculteurs du Gaec des Pruneloux ou par le syndicalisme FDSEA-JA. Et à chacun,  les mêmes questions ont été posées. D’où viennent ces vautours dont un certain nombre sont bagués, identifiés ? Comment se fait-il qu’un charognard s’attaque à une vache bien vivante ? Ces rapaces sont-ils susceptibles de s’installer durablement sur le secteur ? Et si oui, qu’en sera-t-il de la sérénité des éleveurs et de leurs troupeaux ? Est-ce la faim qui explique cette attaque ? On sait qu’à quelques 150 km de la Margeride, dans les Gorges de la Jonte, un programme de réintroduction du vautour est en place depuis de longues années. Ces populations ont-elle été régulées et maîtrisées ?
Bref, à ce jour, les éleveurs restent avec leurs interrogations et leurs inquiétudes, avec la perte d’une vache et son veau puisqu’elle était gestante, sans possibilité d’indemnisation car il n’existe pas de plan de protection contre le vautour et que les assurances ne prennent pas en charge ce type de perte.
Mais l’affaire n’est pas classée. Ce jeudi matin, de nombreux jeunes agriculteurs du secteur accompagnés par Joris Coston le président du CCJA local, Laurine Rousset présidente des JA43 et Guillaume Avinain Secrétaire général, ainsi que d’autres membres du bureau, et Noël Eymard délégué cantonal FDSEA, étaient sur place auprès de Renaud et Pauline Hugony pour leur apporter le soutien de la profession (lire par ailleurs).

(1) Depuis le 1er janvier 2020 avec la loi n°2019-773 du 24 juillet 2019, l'Agence française pour la biodiversité et l'Office national de la chasse et de la faune sauvage sont regroupés au sein du nouvel Office français de la Biodiversité, sous la tutelle du ministère de la Transition écologique et solidaire et du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation.

JA et FDSEA soutiennent la famille Hugony

C’est d’abord pour soutenir ces jeunes agriculteurs, qu’une délégation de JA43 et des agriculteurs du secteur sont venus sur l’exploitation de Pauline et Renaud Hugony, ce jeudi matin. Mais c’est aussi pour constater ce qui semble être une première sur le département. «Une scène bien désolante», souligne la présidente des JA Laurine Rousset, choquée par les images qu’elle a sous les yeux. Et de se poser, elle aussi, de nombreuses questions. «On nous demande à nous paysans, d’être irréprochables sur le plan sanitaire. Et là, on laisse faire… Il n’y a pourtant rien de naturel que de voir un vautour s’attaquer à un animal vivant…». D’autres soulignent la perte pour l’éleveur, à savoir la vache et son veau, le lait à produire et le coût de l’équarrissage. Et Noël Eymard de souligner : «Aucune indemnisation n’est prévue. Et pourtant si a contrario, on tue un vautour ça nous coûtera 7 500 € avec un risque de prison à la clé».
La profession a porté le dossier auprès de la DDT et de la Préfecture et demande, dans un premier temps au moins, une indemnisation pour ces éleveurs, et une enquête pour mesurer les risques pour l’avenir.
Le loup, les rats taupiers, les sangliers, les marmottes, les corbeaux, les corneilles… et maintenant les vautours, les agriculteurs commencent à perdre patience face aux prédateurs qui menacent leurs troupeaux ou leurs cultures. «Nous ne sommes pas opposés à la biodiversité» clament-ils «mais nous souhaitons une régulation des populations des prédateurs pour permettre une bonne cohabitation avec nos élevages et nos cultures».

Il a dit…
«Il faut réguler…»

Philippe Chatain, secrétaire général de la FDSEA et avec Gilles Tempère en charge du dossier Chasse : «Les associations de défense de la nature comme la LPO sont dans le déni, et ne reconnaissent pas que ces vautours sont capables de tuer pour se nourrir, et c’est pourtant ce qui s’est passé. Au départ, les vautours ont été réintroduits dans les Pyrénées pour répondre à un besoin car les espagnols n’avaient pas de service d’équarrissage. Puis dans la Lozère, où ils étaient nourris artificiellement. Aujourd’hui, ils sont trop nombreux. On n’est pas contre le vautour… on veut bien en voir quelques uns mais pas des troupeaux. On demande donc une régulation de ces populations. Pour éviter les problèmes, on nous propose de créer des placettes où déposer des cadavres pour nourrir les vautours. Pour nous ce n’est pas une solution car cela les fixerait sur un territoire où ils ne sont que de passage. On nous dit que c’est une alternative à l’équarissage, mais non car il faut mettre des animaux morts sains, or dans nos élevages quand des animaux meurrent c’est qu’ils étaient malades et qu’ils ont été soignés… On craint aussi pour les risques sanitaires.
Nous sommes pour la diversité dans la nature dans le respect de chacun, et l’homme et l’élevage ont aussi leur place».

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