Chassé-croisé de mai, à l'estive de Récusset
La “fête” de l’estive à la Coptasa, c’était cette semaine avec la montée d’une bonne partie des bovins sur les unités de Récusset et Pradiers, dotées d’une ressource fourragère prometteuse.
La “fête” de l’estive à la Coptasa, c’était cette semaine avec la montée d’une bonne partie des bovins sur les unités de Récusset et Pradiers, dotées d’une ressource fourragère prometteuse.
Ce mardi matin, en contrebas du col de Néronne, seuls les genêts en fleurs rappellent qu’on est bientôt fin mai : six petits degrés au tableau de bord et dehors, une pluie battante qui se mêle aux nimbes de brouillard épais, conférant au cirque de Récusset des allures de Highlands écossaises. Au travers de cette purée de pois, on distingue à peine les phares des véhicules, nombreux portant. C’est en effet l’heure de pointe sur la piste cabossée qui conduit au Violental, celle d’un chassé-croisé de tracteurs et bétaillères venus décharger leur convoi de bourrettes, doublonnes, ou de couples mères-veaux. Ce premier jour de montée à l’estive, c’est près de la moitié des 1 500 têtes de bétail accueillies sur l’unité pastorale de Récusset de la Coptasa qui est acheminée sur site, avant d’être réparties en lots et de prendre une semaine plus tard leurs quartiers estivaux définitifs sur cette estive collective de 930 hectares qui s’étage de 1 100 à 1 500 mètres d’altitude. À leur arrivée, les veaux reçoivent un rappel de vaccin anti-grippal et sont déparasités, traitement antiparasitaire auquel les bourrettes ont aussi droit.
De l’herbe, de l’eau et pas de campagnols
Une fois n’est pas coutume, à peine un café avalé près du cantou dans la maison faisant office de quartier général aux deux bergers, on ne s’attarde pas. Il faut bien une vingtaine de minutes pour rejoindre au milieu de la forêt le point de déchargement, organiser les manœuvres pour faire tourner et reculer les engins et remorques sur une piste rendue boueuse par la pluie incessante et libérer montbéliarde, limousine, salers et autres aubrac pour une saison qui s’annonce cette année sous les meilleures auspices. “Les parcelles sont belles comme tout, il y a de l’herbe, de l’eau en pagaille, pas de rats, on monte avec de l’herbe au bon stade”, estime Laurent Bouscarat, directeur de la coopérative d’estives collectives qui supervise les opérations, avec son président Georges Lours, et Alexis Picarougne, vice-président.
Habitué des lieux, Sébastien Catalan y estive chaque année un lot de doublonnes, douze cette année. Éleveur laitier à Marcolès au sein du Gaec du Lac (80 montbéliarde élevées sur 95 ha), il perpétue une tradition familiale, ancrée depuis les années 80, ses parents ayant fait le choix de faire gardienne les jeunes génisses à la Coptasa. Une tradition guidée par un impératif agronomique, zootechnique et économique : alléger le chargement animal sur l’exploitation pour y constituer du stock fourrager hivernal tout en permettant aux animaux estivés de profiter (au sens propre et figuré) d’une herbe d’altitude à la flore riche et variée. C’est ce qui a aussi guidé Corentin Roquessolane et ses associés (Gaec des prairies à Maurs(1)), à confier pour la première fois à la coopérative une quinzaine de bourrettes salers, sans appréhension aucune.
Sans la Coptasa, “on aurait beaucoup moins de vaches”
“Depuis l’an dernier, on engraisse la moitié de nos taurillons, du coup on souhaite faire un peu de stock, ce qui nous a motivés à adhérer à la Coptasa. Ça nous a paru une évidence”, explique le jeune agriculteur installé en 2022. D’autant, précise Nicolas Angelvy (Gaec du Veinazès), qu’avec l’attribution d’un prorata de surfaces de l’estive collective, les aides de la Pac perçues par l’éleveur couvrent le coût de la pension “et même d’une part de transport, ça fait une mise à l’estive quasiment gratuite, ça vaut vraiment le coup”. Sans cette solution, “on aurait moins de vaches, beaucoup moins”, ajoute d’ailleurs l’éleveur de Sansac-Veinazès dont l’effectif s’élève à 150 vaches salers croisées charolais - dont 24 sont estivées à Récusset - pour 117 ha de SAU. Alléger le chargement mais aussi le travail, complète Laurent Bouscarat venu également appuyer les nouveaux bergers co-responsables de l’unité pastorale de Pradiers, Sophie Normand et Anthony Lescure, pour leur baptême du feu.
(1) Production de broutards et taurillons salers, 160 mères conduites en pur sur 230 ha.