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Broutards : du minerai à l’or brun

Les prix du broutard naviguent entre 4,25 et 5 € et la pénurie d’animaux aggravée par les 
épizooties continue de porter les cours records.
 

Sept cent mille broutards de moins ont été exportés l’an dernier de France.
© Patricia Olivieri

Longtemps, les éleveurs cantaliens ont été assimilés à des mineurs extrayant de moules à veaux une ressource dont la valeur était exploitée par d’autres, faisant des broutards du Massif central la variable d’ajustement de toute une filière. Longtemps, leurs représentants, parmi lesquels Bruno Dufayet, président de la section bovine de la FDSEA, ont prêché dans le vide, prédisant la fin d’un modèle inéquitable, mais contraint un jour ou l’autre de changer de logiciel sous peine de manquer d’animaux. Longtemps, les prémices de la décapitalisation du cheptel allaitant ont été ignorés et la pression sur les prix accentuée. Résultat : en huit ans, la France a perdu 1,1 million de vaches dont 630 000 vaches allaitantes (- 16 %) et le cheptel laitier n’est pas épargné (- 13 %) tandis que la consommation globale de viande de bœuf se tient (+ 0,04 % en 2024). Les vagues de FCO et MHE n’ont rien arrangé ces deux dernières années, avec de nombreux constats de vaches vides.

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Broutards : + 1,44 € en un an

Conséquence, logique : il s’est exporté l’an dernier 700 000 broutards de moins vers l’Italie et leur prix, en nette hausse sur l’année, a continué à flamber ces trois derniers mois. Les mâles salers R de 350-400 kg se sont vendus la semaine dernière 4,25 €/kg, 4,66 € pour les aubrac, 4,88 € pour des limousin, et les animaux classés U se négocient 10 à 20 centimes de mieux. À 5,02 €, la cotation du charolais U de 400 kg a gagné 1,44 € en un an. 
Du jamais vu et des cours qui dépassent désormais le coût de production. De minerai brut, le broutard est devenu une denrée rare, un or brun ou beige qu’on s’arrache : “Ça fait 35 ans que je n’avais pas vu les acheteurs se bousculer dans ma cour de ferme”, témoigne un éleveur aubrac, membre de la section bovine réunie le 1er avril à Aurillac. 
Même si l’évolution est moins forte, toutes les catégories d’animaux sont concernées par cette hausse tarifaire : + 0,80 € pour le JB (U-) à 6,30 €/kg carc., + 0,47 € pour la vache (R=, 400 kg) à 5,93 €.

Pour l’instant, ça fait du bien dans les têtes mais pas encore dans les trésoreries" Bruno Dufayet, président de la section bovine de la FDSEA 15.

Une situation - qui a aussi un effet ricochet sur le marché de la reproduction - dont il convient de se féliciter, affiche Bruno Dufayet, pour qui le syndicalisme doit aussi faire valoir les conjonctures favorables, surtout que côté charges, un recul de 3,6 % de l’indice Ipampa viande bovine a été enregistré sur 2024(1). Avec une nuance cependant : si les cours du broutard s’envolent, les naisseurs ne roulent pas sur l’or. “Pour l’instant, ça fait du bien dans les têtes mais pas encore dans les trésoreries, il faudrait au moins deux années  comme celle-ci pour avoir un bol d’oxygène et pouvoir de nouveau investir, moderniser nos exploitations”, expose l’éleveur mauriacois. 

L’engraissement moins rentable 

Du côté des naisseurs-engraisseurs, l’enthousiasme est moindre : avec un prix du broutard à 5 € environ en moyenne, ce sont plus de 7 € qui sont nécessaires pour conserver une marge suffisante, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, constate un éleveur de TJB et babynettes. Cette moindre rentabilité pourrait mettre à mal la dynamique d’engraissement relancée en France ces deux dernières années.

Lire sur ce sujet : https://www.reussir.fr/bovins-viande/bovins-viande-lengraissement-des-males-prend-du-poids

Cette conjoncture inédite propice à l’amont de la filière sera-t-elle durable ? Difficile de se projeter dans un monde percuté par les aléas géopolitiques et l’émergence de nouvelles maladies. Ceci étant dit, les fondamentaux du marché sont structurellement porteurs : la France reste le seul véritable bassin de production de maigre en Europe et les approvisionnements alternatifs - comme du zébu brésilien - expérimentés par les importateurs italiens et des pays tiers ont déçu : économiquement, leur prix rendu en Europe n’est guère plus avantageux et les performances à l’engraissement sont moindres. Et ailleurs sur la planète, la production bovine est partout en repli alimentant des tarifs élevés. 
Dans ce contexte, l’avenir s’annonce dégagé pour la production bovin viande cantalienne à 
condition de se protéger de la FCO 3, 8 et de la MHE qui vont inévitablement circuler cet été. À cet égard, l’allègement des protocoles sanitaires italien et espagnol va permettre de libérer des doses de vaccin pour les cheptels de souche.

Lire aussi /agriculture-massif-central/node/30910

(1) La FNB plaide pour que le volet “services” (assurances, main d’œuvre mécanique...) mais aussi le fermage soient pris en compte dans le coût de production.

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