Airport fly information service (Afis) : la tour de contrôle des pilotes
Ils sont trois agents à la tour de contrôle de l’aéroport d’Aurillac à assurer un service d’information et d’alerte aux équipages. Rencontre avec l’un d’eux, Thierry Louis-Abraham.
Ils sont trois agents à la tour de contrôle de l’aéroport d’Aurillac à assurer un service d’information et d’alerte aux équipages. Rencontre avec l’un d’eux, Thierry Louis-Abraham.
Un avion qui percute une vache égarée sur la piste au décollage ; un autre qui atterrit dans l’herbe sans son train de nez sorti ; un ULM qui rencontre par inadvertance deux buses et qui se pose in extremis : il s’en passe des choses sur les deux pistes(1) de l’aéroport d’Aurillac ! Ce n’est pas le quotidien bien sûr, mais ce genre d’événements fait partie des péripéties auxquelles peuvent être confrontés les Afis(2), ces agents assignés à la tour de contrôle qui répondent à deux missions : “On doit aux avions l’information de vol et l’alerte en cas de problème”, présente Thierry Louis-Abraham, en poste à Tronquières depuis 2014, et qui partage son fauteuil avec deux autres collègues.
Prendre de la hauteur
Les informations de vol, ce sont tous les paramètres qui assurent le bon déroulement de l’atterrissage et du décollage (le sens du vent, sa vitesse, présence d’un autre engin, la visibilité…) et l’alerte, c’est l’assistance aux avions en difficulté. “Ça peut être simplement un retard, donc dans ce cas là je dois chercher où il est. On doit comprendre la situation, les besoins du pilote. Si c’est plus grave, je préviens l’Aviation civile ou la Gendarmerie ; et si c’est un accident avéré, on applique les procédures qui sont préétablies et on organise le sauvetage”, en lien avec les pompiers de la plate-forme.
Depuis la tour de contrôle, les Afis ont une vue à 360° sur une dizaine de kilomètres à la ronde mais les jumelles ne sont jamais loin. La radio grésille souvent, les échanges avec les équipages sont brefs, mais essentiels. À côté de Thierry, un tableau avec des “stripes” scrupuleusement ordonnés, des bouts de papier bleu ou vert(3) où est consignée “la carte d’identité” de chaque aéronef : son immatriculation, le type d’appareil, la date, l’heure d’atterrissage et de décollage ; la provenance et la destination ; et les person on board (POB). “Tout est enregistré et conservé trois mois pour qu’en cas d’accident, le Bureau d’étude aéronautique (BEA) puisse les consulter. Sur cette table, je sais exactement combien j’ai d’appareils et où ils sont. Théoriquement, on gère ceux qui sont dans notre fréquence, c’est-à-dire à six nautiques et demi (13 km environ) et 1 000 pieds (en hauteur) autour de la plate-forme. Mais si besoin, on porte assistance à tous les avions s’ils peuvent avoir notre fréquence.”
Comme Obélix
Ils sont donc trois agents Afis à se relayer toute la semaine, de 6 heures à 22 heures, avec une présence le dimanche de 17 heures à 22 heures, pour un service organisé autour de la ligne commerciale vers Paris, sans oublier les astreintes si un vol sanitaire venait à être annoncé, pour assurer le transfert d’organes depuis le centre hospitalier Henri-Mondor, où les prélèvements se déroulent la nuit. En dehors des horaires “d’ouverture”, un équipage privé, militaire,… peut quand même venir se poser, mais il n’y aura personne à la tour, comme le samedi par exemple. À Aurillac, il n’y a pas de contrôleur aérien, c’est Clermont qui assume cette responsabilité. “Ce sont eux qui ont le radar. On ne peut pas guider les avions de notre propre chef, on retranscrit leurs ordres”, explique Thierry, devenu Afis par passion pour l’aviation… et par dérogation !
Ancien pilote, il a en effet démarré à Brive, où il fréquentait l’aéroclub. L’aéroport avait “un besoin urgent” d’agent et Thierry était au bon endroit, au bon moment : “Un contrôleur de l’Aviation civile m’a formé ; un inspecteur m’a agrémenté. L’avantage, c’est qu’on connaît les besoins des pilotes comme on l’a été nous aussi.” Le cursus “classique” d’un Afis, c’est d’abord une formation à l’Enac, l’École nationale de l’Aviation civile, à Toulouse, ouverte à tous, dès 18 ans, avec un bon niveau d’anglais toutefois. “Et il faut quand même une appétence pour les avions”, sous peine de ne pas performer à l’examen théorique. La qualification pratique se fait ensuite sur son site d’affectation. Par exemple, Thierry est qualifié pour Aurillac, et ne peut pas exercer à Rodez. Avant de se poser à Aurillac, il a passé cinq ans à Brive, avec deux escales en Picardie et dans le Jura. Beaucoup d’anciens militaires ou pilotes se reconvertissent en Afis. Un métier passion, dans lequel Thierry est “tombé dedans tout petit”...
(1) La 15 (orientée à 150°) et la 33 (orientée à… 330°).
(2) Pour Airport fly information service.
(3) Pour différencier le vol à vue du vol aux instruments.