Volailles alternatives en Belgique
La Wallonie veut dynamiser sa filière avicole
Partie avec un temps de retard, la Wallonie mise sur les productions avicoles alternatives pour améliorer les revenus de ses éleveurs et développer des outils amont et aval.
Partie avec un temps de retard, la Wallonie mise sur les productions avicoles alternatives pour améliorer les revenus de ses éleveurs et développer des outils amont et aval.
La filière avicole wallonne est considérée comme un secteur en devenir. La production avicole, que ce soit en chair ou en œuf, suit une courbe ascendante depuis les années 90, grâce au développement de la production standard ancrée historiquement en Flandre. Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la volonté politique était en effet d’offrir une alimentation à bon prix à tous les Belges. La Flandre s’est clairement positionnée pour relever ces défis, notamment en productions avicoles et porcines. Le port d’Anvers a constitué un levier fort pour l’importation des matières premières nécessaires à l’alimentation des animaux. Mais dans les années 90, le développement flamand a été freiné par des problèmes environnementaux dus à l’excès d’azote et de phosphore dans les sols. Les firmes d’aliments, essentiellement basées en Flandre, ont cherché à se développer en Wallonie, absente jusque-là du paysage avicole belge. Le développement de la production standard a été suivi, dès les années 2000, par l’essor de la production des volailles biologiques, puis alternatives. La Wallonie est passée de 20 000 poulets alternatifs élevés par an au début des années 2000 à 3,4 millions en 2015 (16 % de la production régionale de poulets). En Belgique, la part des volailles alternatives est estimée à 4 % ; elle atteint 75 % en Wallonie où 40 % des aviculteurs de chair sont en alternatif. De manière globale, la production de poulets en Wallonie représente 16 % de la production belge.
Des opportunités pour les agriculteurs wallons
Cette évolution laisse entrevoir des marges de développement qui séduisent les producteurs. En 2015, la Wallonie comptait près de 400 exploitations professionnelles avicoles et cunicoles, plus de 21,5 millions de places de poulets, environ 1,7 million de pondeuses, 5 500 lapines reproductrices et 25 000 canards à foie gras. Les avantages du secteur avicole sont bien connus : cycle de production court, complément de revenu améliorant la rentabilité des fermes, diversité des espèces, des modes de production et de l’organisation des circuits (longs et courts), consommation d’œufs et de volaille moins impactée qu’en viande rouge. En Wallonie, le lien au sol est important. La région est un grand producteur de céréales à paille, blé surtout, avec une montée en force du maïs grain. La valorisation des céréales de l’exploitation directement dans l’alimentation des poulets a constitué un élément essentiel du développement, suite au besoin important d’amendement organique. Certains éleveurs recherchent également à être encore plus autonomes en termes protéiques sur la ferme ou la région. L’origine régionale d’une partie de l’aliment est également inscrite dans certains cahiers des charges, dont le bio.
Un plan décennal ambitieux
En juillet dernier, le plan décennal de développement stratégique et opérationnel de la filière avicole wallonne a été présenté par le ministre régional de l’Agriculture. Le plan opérationnel joue sur deux leviers : mise en œuvre d’un cadre favorable pour la création de valeur ajoutée post-production et financement de mesures d’accompagnement (encadrement, recherche, facilitation filière, promotion,…) assorties d’un budget de 3,14 millions d’euros. Il s’agit notamment de soutenir la création de 40 poulaillers par an, dont 90 % en productions alternatives. Le plan contribuera à soutenir une croissance établie entre 7 et 9 %. Le soutien à la création d’une casserie et de trois à cinq abattoirs de proximité est prévu. Des initiatives sont particulièrement soulignées, comme les deux filières de poulets biologiques, liées pour l’une aux fabricants d’aliments ForFarmers et à la coopérative Scar, et pour l’autre à l’abattoir Belki. Découlant de celles-ci, des démarches sont mises en place par les éleveurs pour vendre en circuits courts via la coopérative Coprobel (marque Coq des Prés) ou directement (marque Roi des Champs). Quant à l’abattoir Ardenne Volaille, il assure son activité majoritairement par le développement d’un poulet sous régime de qualité (cadre wallon) et sous la mention européenne « poulet sortant à l’extérieur-système extensif ».
Un nouveau couvoir en Wallonie
Le groupe flamand Belgabroed (couvoir Belavi-Vervaeke) a investi 6 millions d’euros dans le couvoir L’œuf d’or, situé à Andenne, tout près de Namur. Il remplace le site vieillissant de Kruishoutem (Flandre orientale) détenu par Christian Van Ryckeghem, autre partenaire du projet. Le site débutera sa production avec 130 000 poussins par semaine, uniquement en souches colorées à croissance lente. La plupart est destinée à la production wallonne de volailles alternatives. L’œuf d’or a voulu prendre en compte les attentes sociétales, tout en répondant aux exigences professionnelles.
Bien-être animal : toutes les manipulations mécaniques sont exclues. L’adoption des dernières technologies limite le stress des poussins : vaccination dans l’œuf (système Vinovo Flex), casiers d’éclosion plus grands, tri et comptage manuels, salle d’expédition climatisée, durée de transport limitée ;
Environnement : 100 % de l’énergie est renouvelable (panneaux solaires, pompes à chaleur, récupérateurs d’énergie). En cas de besoin, l’énergie achetée sera verte. Un effort particulier est réalisé pour réduire le gaspillage énergétique ;
Qualité sanitaire : la biosécurité est optimisée dans les fermes intégrées au couvoir, comprenant les programmes de vaccination et les plans de contrôle. Au couvoir, le contrôle sanitaire est complet de l’œuf au poussin.
Des faiblesses et des menaces
Avec un taux d’auto approvisionnement de l’ordre 50 %, la Wallonie n’est pas autosuffisante pour sa consommation de poulets, contre 158 % pour la Belgique. La région manque d’outils de proximité (abattoirs, casseries…), alors que les circuits courts se développent. Les éleveurs ne disposent pas de ces outils, mais ont besoin de structures agréées pour vendre eux-mêmes… Il reste aussi à rendre les aides à l’investissement plus efficaces et mieux concertées. Les budgets pour la recherche et la promotion des produits sont peu élevés. L’interdiction du gavage est considérée comme un risque. Sont considérés comme pénalisants l’image négative de la production standard et le manque d’investissement dans l’aménagement des parcours des volailles.