En Bretagne, Eureden muscle son offre « installation »
Le groupe coopératif Eureden met la main à la poche pour accélérer son nombre de jeunes adhérents installés et compenser en partie l’hémorragie de départs en retraite qui touche ses 18 500 adhérents.
Le groupe coopératif Eureden met la main à la poche pour accélérer son nombre de jeunes adhérents installés et compenser en partie l’hémorragie de départs en retraite qui touche ses 18 500 adhérents.

Confronté au scénario catastrophe de l’effondrement du nombre d’agriculteurs pour la prochaine décennie (1), Eureden ne reste pas les bras ballants.
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C’est surtout le sort des productions animales qui inquiète, car les terres trouveront toujours des bras pour les cultiver. « Depuis deux-trois ans, on sent un décrochement du côté des installations d’éleveurs » constate Michel Bloc’h, éleveur de porc et président de la commission installation d’Eureden. « On perd globalement 3 % d’agriculteurs par an, mais en porc ça monte à 12-13 % » précise Damien Craheix, responsable du pôle stratégie des exploitations. Seulement une dizaine s’installe en porc et autant en volaille. L’enjeu dépasse les seuls intérêts de la coopérative estiment les responsables car seul un départ sur trois est remplacé en Bretagne.
Moyens d’accompagnement renforcés
Eureden soutient déjà l’installation de 200 jeunes agriculteurs par an, mais il veut atteindre les 300.
Le niveau du défi est élevé, eu égard aux 432 installations DJA comptabilisées en 2023 pour toute la Bretagne. L’objectif fixé par la Région Bretagne est de parvenir à 1 000 installations aidées en 2028. Eureden défend le modèle de l’exploitation de polyculture-élevage à capitaux familiaux et à dimension humaine.
Pour attirer plus de jeunes, la coop renforce son accompagnement avec le dispositif « Passeport Jeunes agriculteurs ». Destiné aux futurs installés, mais aussi aux primo installés depuis moins de cinq ans, ce passeport aborde tous les aspects de l’installation avec ses quatre « Pass ».
Nerf de la guerre, le budget du « Pass Finance » a été doublé à 2 millions d’euros. « Le jeune installé doit pouvoir définir son propre système global d’exploitation qui lui permettra de gagner sa vie dans la durée et d’être résilient » résume Éric Humphry, éleveur et président de la section avicole.
Ce pass comprend des prêts à taux réduits, des aides adaptées à chaque filière végétale et animale (non détaillées), des remises sur les achats des structures intégrant un jeune (fin du principe de la « quote-part »).
En contrepartie, l’agriculteur s’engage avec la coopérative (et vice versa) pour une durée variant de 5 à 10 ans selon la filière. « En volaille, Eureden participe à la hauteur de 12-14 % de l’investissement », précise Jean-Marc Le Trionnaire, l’expert volaille.
Pour se donner les meilleures chances de réussite, le porteur de projet pourra s’appuyer sur trois autres volets du Passeport JA. Ainsi, le « Pass compétence » donne accès à des formations (notamment l’encadrement de salariés) et à des groupes de progrès pour se préparer au pilotage de l’exploitation. Le « Pass Performance » accompagne techniquement chaque activité (indicateurs, GTE, conseils…). Enfin le « Pass Environnement » vise à sécuriser l’exploitation au plan agro environnemental, notamment sur la réglementation (plans de fumure, d’épandage, Pac, …).
Neuf experts métiers pour construire le projet
Damien Craheix, responsable du pôle stratégie des exploitations, souligne qu’Eureden est la seule coopérative bretonne à disposer aussi d’une équipe de neuf experts par domaine (porc, œuf, volaille, lait…).
Ils se consacrent au conseil sur la faisabilité technique et la viabilité économique des projets considérée par Jean-Marc Le Trionnaire comme « un prérequis avant l’installation. Nous n’avons pas du tout intérêt à aider des jeunes qui iront au casse-pipe d’ici 3 à 5 ans ».
Aides obligent, il leur est demandé une certaine transparence de leurs comptes, au moins les trois premières années.
L’accompagnement comprend aussi l’aide aux démarches administratives, au montage du business plan, à la mise en relation avec des cédants adhérents ou non.
Eureden va aussi faire connaître les métiers dans les écoles d’agriculture et organise des formations « maître d’apprentissage » pour les agriculteurs.
Les prochaines années vont être cruciales, car même avec 300 installés par an, le déséquilibre persistera pour remplacer les 800 départs d’adhérents, sauf s’ils sont compensés par le recours massif au salariat.
Coup de pouce en volaille

Aurélien Bernier s’est installé en octobre 2020 à Nivillac (56) à la suite de ses parents, avec 110 ha et 2 vieux poulaillers de 1000 m², datant des années 80 et « qui étaient des passoires énergétiques ».
Après sa formation agricole (Bac et BTS), il a travaillé en exploitations puis bifurqué dans le transport d’animaux vivants. « J’ai toujours voulu être agriculteur, mais cela m’a pris une quinzaine d’années. »
Il a reçu 25 000 euros d’aides avicoles, montant qui a depuis été rehaussé avec le contexte inflationniste. Désormais, ce sera 30 €/m², plus 15 à 30 % d’aides pour les travaux de rénovation ou d’adaptation aux cahiers des charges des acheteurs.
La remise à niveau des poulaillers (un statique Louisiane et un dynamique Colorado) a coûté 300 000 euros à Aurélien, y compris la mise en conformité à la charte Nature d’éleveurs.
Il produit exclusivement de la dinde (7 500 animaux dans le Colorado et 4 100 dans le Louisiane). Cette année, il va réinvestir 115 000 € dans un préau de 400 m² pour répondre à un cahier des charges spécifique. « Je vais recevoir une aide d’Eureden de 40 % (46 000 €) ».