De faibles niveaux des mycotoxines dans les aliments pour poules reproductrices
Avec l’Itavi, les couvoirs Boyé accouvage, Caringa, Gallina Perrot et Orvia, regroupant près de quarante élevages, ont participé à la construction d’un observatoire pour mieux comprendre l’impact des mycotoxines en poules reproductrices.
Avec l’Itavi, les couvoirs Boyé accouvage, Caringa, Gallina Perrot et Orvia, regroupant près de quarante élevages, ont participé à la construction d’un observatoire pour mieux comprendre l’impact des mycotoxines en poules reproductrices.
Souvent incriminée lors de baisses de performances inexpliquées, la présence de mycotoxines dans l’aliment questionne les fabricants et les accouveurs. Même si on a coutume de dire que la « dose fait le poison », la diversité des mycotoxines, leurs effets propres ou combinés restent difficiles à objectiver.
Pour ce faire, l’Itavi et les professionnels, avec le soutien financier du Cas Dar, de l’interprofession chair (Anvol) et du syndicat des accouveurs (Sna), ont mis en place un observatoire en 2022 et 2023 dans plus de 40 élevages de poules reproductrices chair.
Dans chaque élevage, un échantillon était collecté à chaque livraison d’aliment (tous les 15 jours environ) durant toute la durée de production du troupeau et les performances de production étaient relevées. Compte tenu du nombre important de mycotoxines recherchées et du coût analytique, 62 échantillons d’aliment ont été sélectionnés et analysés. Ils ont été choisis rétrospectivement, car consommé par les poules lors des chutes inexpliquées de performances (hors maladies, coup de chaleur ou problème technique avéré). Des échantillons témoins ont aussi été retenus (même formule, même usine, fabrication et distribution au même moment sans baisse de performance) pour comparaison avec le lot incriminé. Dans ces aliments témoins/suspects, un total de 42 mycotoxines a été analysé.
Des niveaux de contamination relativement bas
Les outils analytiques ayant beaucoup évolué, il est aujourd’hui possible de faire une recherche élargie des mycotoxines, avec une très bonne sensibilité et quantification (de l’ordre de 0,010 à 0,05 mg/kg, selon les molécules, jusqu’à 0,001 mg/kg pour les aflatoxines).
Des mycotoxines ont été détectées dans 100 % des 62 échantillons analysés, avec en moyenne 9 molécules différentes retrouvées par échantillon. Tous les niveaux en toxines étaient largement en deçà des limites maximales recommandées et connues pour induire des effets aigus sur la santé des poules. Sur les 42 mycotoxines recherchées, seulement 22 ont été retrouvées. Les mycotoxines les plus fréquemment détectées sont les trichothécènes de type B : les DON (détecté dans 100 % des échantillons), le nivalénol (76 %), la D3G (100 %) et le 15-O-AcétylDON (100 %) ainsi que les fumonisines (90 % FB1), la zéaralénone (98 %) et l’acide ténuazonique (85 %). À noter qu’aucune des aflatoxines – une famille de mycotoxines particulièrement à risque pour la santé et la reproduction des oiseaux – n’a été détectée.
Liens entre toxines et baisse de performances
Des liens entre la présence de toxines comme les fumonisines et le nivalénol (toutes produites par le champignon Fusarium) et une baisse de consommation d’aliment ont été observés la semaine de distribution de cet aliment, mais également la semaine suivante. La présence de 15 O-Acétyl-DON affecterait également négativement le niveau de consommation d’aliment ainsi que le taux d’éclosion, et la présence de D3G affecterait le taux de ponte. Ces effets sont sensibles mais globalement limités (par exemple 2 à 3 % de baisse du taux de ponte en moyenne).
Avec des doses faibles et inférieures aux limites maximales, l’identification de combinaisons de mycotoxines agissant en synergie au sein des aliments analysés reste à investiguer. L’observatoire se poursuit en 2024 pour permettre d’acquérir de nouvelles données et apporter des outils d’interprétation permettant une meilleure sécurisation des aliments par les fabricants.
Des contaminants naturels
Défi majeur pour l’industrie avicole, les mycotoxines sont des métabolites toxiques produits par certains champignons contaminant naturellement de nombreuses matières premières végétales (blé, maïs, coproduits de céréales, etc.). Ils se développent au champ (mycotoxines des champs) ou en cours de stockage après la récolte (mycotoxines de stockage). Ils sont favorisés par les pratiques culturales et les conditions climatiques (chaleur, humidité). Le changement climatique favorise le développement de certains champignons et pourrait notamment avoir pour conséquence l’apparition de nouvelles mycotoxines comme les aflatoxines dont le champignon source (aspergillus) était jusqu’ici inadapté au climat Européen.
Essai avec un aliment volontairement contaminé
Une expérimentation de l’Itavi sur des poules reproductrices chair est en cours pour évaluer l’impact de l’ingestion, répétée ou non, d’un aliment contaminé avec de la zéaralénone (à 1 mg/kg) et des fumonisines (10 ou 20 mg/kg), à différentes périodes de la vie (poulette et/ou ponte).
Grâce à la maîtrise des doses de toxines administrées et de la période d’exposition, l’étude permettra de préciser les effets directs et indirects sur ces poules reproductrices, les œufs, les embryons et/ou les poussins.
L’essai se focalise sur les effets de la multicontamination par les fusariotoxines (fumonisines et zéaralénone) qui ont des effets toxiques avérés sur la reproduction et provoquent des altérations métaboliques susceptibles d’avoir des conséquences sur la descendance. Le fait que ces toxines puissent s’accumuler dans l’organisme des volailles est suspecté dans des travaux précédents de l’École nationale vétérinaire de Toulouse et de l’Itavi.