" Réagissons face aux attaques contre l'élevage "
Jean-Louis Peyraud, chercheur à l'Inra, s'attaque aux discours simplistes qui exhortent à réduire notre consommation de viande pour agir en faveur du climat.
Jean-Louis Peyraud, chercheur à l'Inra, s'attaque aux discours simplistes qui exhortent à réduire notre consommation de viande pour agir en faveur du climat.
On peut comparer les émissions directes de l'élevage (7 à 9 % des émissions françaises, 7 à 8 % au niveau mondial) et les émissions directes des transports (14 % des émissions mondiales). Mais quand la FAO chiffre l'élevage à 14,5 % des émissions mondiales, il s'agit d'émissions qui tiennent compte des changements d'utilisation des terres. Par exemple, quand on utilise du tourteau de soja qui provoque de la déforestation au Brésil, cela impacte les émissions indirectes de l'élevage. Or, on ne connaît pas ce chiffre pour les transports. Il est faux de comparer le chiffre de la FAO aux émissions directes des transports. Il faudrait inclure les émissions liées à la production des carburants. Par contre, l’élevage doit faire des efforts pour réduire ses émissions, faute de quoi sa contribution aux émissions totales s’accroîtrait fortement, dans l’hypothèse où les autres secteurs économiques s’engageraient dans la transition énergétique. "
Toutefois, il convient de rappeler que l'Union européenne pèse environ 15 % de la consommation mondiale de viande, alors que la Chine et l'Asie du Sud-Est représentent environ déjà 45 % et que leur consommation de viande par habitant augmente ; les enjeux sont là ! Notre mode de consommation riche en viandes ne doit pas se répandre chez eux, si on veut que les émissions mondiales de l'élevage n'explosent pas. L’Europe peut donner l’exemple en réduisant sa consommation de produits carnés.
Il y a des bénéfices à réduire notre consommation de viande. Les Européens y ont intérêt pour des raisons de santé, notamment les plus gros mangeurs de viande (20 % de la population), pour mieux équilibrer leur alimentation avec plus de produits végétaux ; mais pas des produits ultratransformés. "
J.-L. P. - " Elle peut quand même rappeler les arguments scientifiques et les efforts réalisés par les acteurs des filières d'élevage. Il faut aussi faire attention à ne pas dégrader ce qui fait la force de l'élevage français vis-à-vis de ces attaques, c'est-à-dire l'élevage familial à taille humaine, avec des vaches à l'herbe, qui consomment des fourrages locaux, dans un paysage bocager. Malheureusement, la tendance est plutôt à réduire la part du pâturage dans les troupeaux laitiers. Ce n’est souhaitable ni d’un point de vue écologique, ni du point de vue de la valeur nutritionnelle des produits laitiers. "