Prairies : plus de résilience avec plusieurs variétés bien choisies
Associer plusieurs variétés par espèce dans les mélanges multi-espèces peut permettre de stabiliser le rendement. Il reste encore à trouver les meilleures complémentarités.
Associer plusieurs variétés par espèce dans les mélanges multi-espèces peut permettre de stabiliser le rendement. Il reste encore à trouver les meilleures complémentarités.
Qu’apportent des prairies multi-espèces et multi-variétés, de 3 à 7 espèces et 2 à 5 variétés par espèce, par rapport à des prairies multi-espèces mono-variétés ? Permettent-elles de garantir un rendement élevé malgré les aléas climatiques ? Permettent-elles de préserver l’équilibre entre espèces au fil des ans, et de ne pas perdre la richesse en protéine des mélanges au bout de trois à cinq ans ?
Des expérimentations menées à l’Inrae de Lusignan, dans la Vienne, ont conclu à une réduction de la variabilité interannuelle des rendements, à une stabilisation des proportions d’espèces au sein des mélanges diversifiés, mais à une absence d’effet sur la productivité globale des mélanges.
Plusieurs fermes expérimentales (Mauron dans le Morbihan, Les Bordes dans l’Indre…) testent aussi des mélanges multi-variétés comparés à des mono-variétés, fauchés pour l’enrubannage et l’ensilage. « Les premiers résultats sur deux ans montrent — comme à Lusignan – que les mélanges multi-variétés ne sont pas plus productifs, résume Patrice Pierre, d’Idele. Mais la variabilité de rendement selon les coupes et les années est atténuée, ce qui est intéressant. »
Un peu plus de rendement aux Bordes
Petite exception à la ferme des Bordes, où « les prairies (4 kg de RGA, 3 kg de dactyle, 10 kg de fétuque élevée, 2 kg de trèfle blanc, 10 kg de luzerne ou 6 kg de trèfle violet) les plus productives en 2022 et 2023 sur trois fauches étaient celles où plusieurs variétés de ray-grass anglais et de trèfles blancs ont été associées, indique Carole Gigot, d’Arvalis. Certes, la différence de rendement entre le témoin (une variété par espèce) et le mélange multi-variété n’est pas significative quand on regarde le rendement moyen annuel. Mais l’écart devient significatif en été lorsqu’on compare les modalités où le RGA n’est représenté que par une variété à l’ensemble des modalités où le RGA est représenté par plusieurs variétés. Est-ce liée à une synergie entre les variétés ? »
Équilibre fragile entre espèces
Mais à Mauron et aux Bordes, contrairement à Lusignan, la composition du mélange multi-variété a beaucoup évolué au terme des deux premières années de suivi. Les légumineuses et les ray-grass anglais régressent au profit du dactyle. « Le dactyle tend à prendre la place du RGA. La proportion de légumineuses baisse, mais les observations ailleurs en région indiquent qu’il s’agit en partie d’un effet année : 2022 a été favorable aux légumineuses, 2023 non », nuance Carole Gigot.
Associer des dynamiques de croissance différentes
Phillipe Barre, de l’Inrae de Lusignan, précise qu'« associer plusieurs variétés par espèce ne fonctionne pas à tous les coups. Il faut choisir des variétés complémentaires : des tailles et des ports différents, comme le trèfle blanc nain que l’on associe au géant et à l’intermédiaire ; des rythmes de croissance différents ; des précocités différentes ; des types méditerranéens et des types tempérés pour la luzerne par exemple. L’objectif est d’obtenir un meilleur maintien des proportions entre espèces dans un mélange au fil des cycles et des ans. »
Patrice Pierre, de l’Idele, regrette la variabilité réduite des espèces disponibles au catalogue français, offrant peu de possibilités de complémentarité entre variétés, et l’absence de sélection sur le critère « sociabilité » des variétés, ce qui pose problème avec le dactyle notamment.