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Plein air intégral sur le plateau de Millevaches

Installé à Vallière, au sud de la Creuse, cet élevage de 150 mères limousines valorise un haut niveau génétique et commercial jouant en collectif la carte de la performance économique, environnementale et sociale.

« Je recherche un maximum de valeur ajoutée sur mes animaux : reproducteurs et animaux de boucherie ainsi que la réduction optimale des charges », souligne Cédric Couegnas installé seul depuis 2015 après 20 ans en Gaec avec son père sur une exploitation à Vallière, aux confins de la Creuse et de la Corrèze.

« Le Gaec est en suivi individuel à Bovins croissance et au herd-book limousin depuis 1976 et je suis en suivi collectif depuis 2018 avec le groupement d’intérêt économique et énvironnemental (GI2E) de Vallière. Nous travaillons entre voisins sur l’adaptation aux changements économiques, climatiques, environnementaux et sociaux. »

La quasi-totalité du cheptel est conduit en plein air intégral. La particularité des parcelles de pâturage est qu’elles sont toutes entourées de bois. Cela offre des abris naturels que ce soit l’hiver (vent) ou l’été (ombre).

Travail : dépendant des saisons !

L’EARL compte 1,6 unité de main-d’œuvre dont 0,60 salarié partagé avec une autre exploitation. Ce dernier est formé à la plupart des tâches sur le troupeau et les surfaces ce qui permet de dégager un peu de temps pour des congés ou des réunions professionnelles. La configuration morcelée de l’exploitation (78 îlots sur cinq gros blocs répartis sur quatre communes) nécessite un équipement spécifique complet pour chaque site (couloir de contention pour les tris, pesées, prophylaxie…) et une organisation méthodique du travail tout au long des saisons.

Deux bâtiments servent à pratiquer les IA sur les génisses vêlant à 36 mois, complémenter les primipares entre le premier et le deuxième vêlage, finir les femelles de boucherie et préparer les reproducteurs pour la vente.

L’hiver, les lots sont visités tous les jours : surveillance et distribution des fourrages grossiers. « Si les vaches se lèvent quand on arrive avec la botte de foin, c’est qu’il n’y en a pas eu assez ! Avec un fourrage correctement distribué à volonté, il n’y a pas de concurrence entre les animaux et les rations sont équilibrées pour tout le monde. » Un aliment adapté est également distribué aux veaux dès 3 mois pour qu’ils s’habituent progressivement à rentrer dans le nourrisseur.

Le sel est fourni à volonté. Les minéraux adaptés à la ration au pâturage sont fournis en granulé par un « Culbuto », distributeur mobile résistant aux intempéries. L’entretien des clôtures : renouvellement du barbelé et piquets de châtaigner prend beaucoup de temps. Les interventions sur veaux sont faites lors de ces visites.

L’absence de concentration des animaux supprime grippes et diarrhées. « Avec ces visites quotidiennes, je ne compte pas mes vaches mais je sais absolument tout de chacune d’entre elles sans me référer à mon carnet d’élevage ou mon suivi Boviclic sur smartphone ! »

Au printemps, c’est la remise en état de toutes les parcelles avec un passage systématique de l’émousseuse et sur-semis avec du ray-grass, seule espèce suffisamment agressive pour s’implanter au printemps.

Cette pratique est primordiale pour la reconstitution des prairies après le piétinement hivernal et l’apparition récente de rats taupiers dont il va falloir contenir la prolifération. Du 15 mai au 15 juillet, la récolte se fait avec deux à trois coupes soit en enrubannage, soit en foin selon les stades végétatifs de l’herbe et les conditions météorologiques.

Autre gros travail, le ré-allotement au mois de mars de l’ensemble des animaux avant la rotation des lots sur les parcelles de pâture débutant au 1er avril. Les lots sont constitués selon leur destination future : broutards, reproducteurs, femelles par lot d’environ 25 vaches. « Toutes les femelles sont gardées pour être mises à la saillie. Elles sont triées soit pour mon renouvellement (environ 30 génisses) soit pour la vente en reproductrices pleines. » Le gène sans corne est progressivement introduit et il est à noter qu’un ébourgeonnage systématique des jeunes veaux se fait à 15 jours-3 semaines.

L’été, les foins se terminent et les moissons de triticale sont réalisées avec un rendement de 55 quintaux de moyenne. Si l’autonomie fourragère est de 100 %, il manque cependant de la paille qu’il faut acheter en complément pour les deux bâtiments. La grosse opération est le sevrage de tous les veaux et le dressage (manipulation et attache au licol) pour tous les futurs reproducteurs mâles et quelques femelles de concours (élevage ou boucherie). Sont gérés en simultané 14 lots d’animaux qui « tournent » sur les parcelles des différents îlots. C’est aussi en été que débute la période de concours et ventes.

L’automne, s’il y a encore quelques concours et ventes, c’est surtout le pic de vêlage sur septembre octobre (100 à 110 naissances) qui accapare l’essentiel du travail : surveillance des couples mère-veau et bouclage des veaux ainsi que la préparation des semis.

Haute valeur génétique

L’analyse du BGTA (bilan génétique des troupeaux allaitants) montre un effet élevage positif (+7,2 kg), exceptionnel pour un élevage en plein air, témoignant de la maîtrise technique du système. La sélection constante sur la valeur laitière des mères et la croissance des pères permet une incidence génétique attendue sur la production de + 6,1 kg ! Une garantie pour les acheteurs de reproducteurs et un gage de finition à l’engraissement sur des rations essentiellement à base d’herbe. « Mes objectifs de sélection sont prioritairement la recherche d’une vache qui vêle seule, élève seule son veau et s’entretient bien. Secondairement je cherche des bêtes à volume. »

Haute valeur commerciale

Le chiffre d’affaires est proportionnellement plus important avec la catégorie Reproducteurs : 52 % en valeur pour 38 % des animaux vendus. La génétique amène une réelle plus-value à l’élevage de même que la finition en animaux haut de gamme qui font 26 % de la valeur des ventes pour 22 % des effectifs. L’éleveur a pour projet d’augmenter la part de la finition sur des circuits valorisant les bêtes de boucherie tout en maîtrisant les coûts induits par la finition. Ce qui passe par une meilleure autonomie énergétique et protéique.

L’exploitation bénéficie de la mention haute valeur environnementale (HVE) qui garantit que les pratiques agricoles utilisées sur l’ensemble d’une exploitation préservent l’écosystème naturel et réduisent au minimum la pression sur l’environnement (sol, eau, biodiversité…). Il s’agit d’une mention valorisante pour l’élevage et la promotion de ses produits finis auprès des consommateurs.

Cédric Couegnas souhaite en premier lieu optimiser l’organisation du travail. Si restructurer son foncier est une piste, diminuer le nombre de vaches et faire davantage de finition lui semble plus réaliste. Mais cela nécessite d’être plus autonome en céréales et paille et donc mettre davantage de surfaces en culture. Une marge existe d’autant plus que le chargement n’est pas trop élevé (0,9 UGB/ha). Si socialement Cédric Couegnas redoute la désertification du plateau de Millevaches (7 exploitations proches sont sans repreneur…) il pense qu’au niveau environnement, la zone a beaucoup d’atouts en main sur lesquels il faudra jouer : adapter et promouvoir une production écologique avec de la finition à l’herbe et des animaux élevés dans le respect du bien-être animal.

Anthony Lemasson, conseiller Bovins croissance Creuse

Anthony Lemasson

"Un cheptel rustique facile à conduire et à commercialiser"

« Cédric Couegnas travaille sur la voie femelle depuis des années pour sélectionner des vaches à grand gabarit typées élevage qu’il commercialise en carcasses lourdes et bien finies. Il accorde une importance primordiale aux qualités maternelles (aptitude vêlage, lait) mais aussi à la docilité du troupeau mesurée au pointage et valorisée par des tris de reproducteurs (taureau, génisses de renouvellement…)

 

Ses vaches sont particulièrement rustiques et ont la capacité à très bien s’entretenir. Les bassins sont larges, il n’y a pas de difficultés de vêlage. La très bonne profondeur de poitrine génère une forte capacité d‘ingestion et de transformation des fourrages grossiers : un atout majeur en plein air intégral. Toutes ces qualités génétiques sont reconnues ce qui lui permet de commercialiser en ferme de nombreux reproducteurs. »

Chiffres clés

]]> 270 ha situés entre 600 et 750 m d’altitude

]]> 253 ha dont moitié-moitié de prairies naturelles et prairies temporaires réalisées en sur-semis après deux rotations de triticale (13 ha)

]]> 150 vaches limousines inscrites, vente de reproducteurs et de femelles finies

]]> 0,9 UGB/ha SFP

]]> 1,6 UMO dont 0,60 salarié

Un GI2E pour aider à faire face aux évolutions du climat

Ardent partisan du travail collectif (Cuma, GVA…), Cédric Couegnas adhère au groupement d’intérêt économique et environnemental (GI2E) créé en 2019 suite à la situation de stress que la sécheresse a généré sur la campagne 2018-2019.

Le GI2E travaille sur cinq actions pour sécuriser les systèmes d’exploitation face aux aléas climatiques :

- améliorer l’autonomie fourragère en diversifiant productions et cycles de végétation, en recherchant espèces et variétés fourragères mieux adaptées au climat de demain ;

- travailler la gestion du plein air hivernal pour optimiser la pousse de l’herbe au printemps ;

- travailler le sur-semis des parcelles d’hivernage ;

- développer le stockage et la distribution collective de l’eau ;

- maîtriser les charges d’intrants et développer la finition des produits à l’herbe.

Travail collectif accompagné par la chambre d’agriculture

Les éleveurs partagent leurs indicateurs technico-économiques, réalisent des bilans fourragers, analyses de sol, rendements des récoltes… Des réunions sont animées pour échanger entre éleveurs et déterminer les actions à entreprendre, programmer et suivre des essais, faire des commandes groupées.

Un programme de formation s’appuie sur des visites comme le salon de l’herbe, les stations Inrae de Lusignan ou Theix sur les aspects recherche de nouvelles variétés et associations pour les prairies pour faire face aux évolutions du climat. Un partenariat a été passé avec le CFFPA d’Ahun et le GI2E de Vallière faisant de ce dernier un véritable outil de recherche développement sur ce territoire.

Axé d’abord sur la performance environnementale pour faire face aux aléas climatiques, le GI2E recherche la performance économique (diminution des charges, valorisation de la production) mais aussi sociale par l’amélioration des conditions de travail et la lutte contre l’isolement en milieu rural.

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