Pérou : un avocat certifié pour traverser l’océan
Le Pérou reste le premier fournisseur d’avocats de l’Europe. Les certifications Global Gap et Smeta avec leur volet RSE sont devenues indispensables pour les grands producteurs sous la pression des acteurs des GMS européennes. Mais les certifications bio y sont encore une rareté.
Le Pérou reste le premier fournisseur d’avocats de l’Europe. Les certifications Global Gap et Smeta avec leur volet RSE sont devenues indispensables pour les grands producteurs sous la pression des acteurs des GMS européennes. Mais les certifications bio y sont encore une rareté.
Ambiance au MIN de Nantes, où le commercial vétéran d’un grossiste importateur d’avocats du Pérou (bien rangés dans la chambre froide la plus proche de la caisse) lâche « le bio, c’est comme l’amour, ça n’engage que ceux qui y croient ! ». Les intermédiaires qui fournissent les gens qui font les marchés du Grand-ouest font a fortiori peu de cas des certifications autres que sanitaires des fruits qu’ils revendent.
Un record avec une hausse de 20 %
Il n’en va pas de même pour les poids lourds des GMS européennes, qui exigent pour la vente de ce fruit au détail une certification privée complémentaire à la garantie sanitaire péruvienne, en l’occurrence, une certification Global Gap complétée de son volet RSE, (Grasp) ou Smeta. Cette année, la saison de l’avocat péruvien a démarré en trombe avec 205 000 t écoulées de janvier à avril derniers. « On en a exporté 410 000 t l’an dernier, un record qui devrait être battu en 2021 avec une hausse de 20 % », selon Julio Vivas, inspecteur de l’autorité sanitaire péruvienne (Senasa).
Selon cet organisme, le marché français seul en aurait absorbé 5 330 t en 2020. Autant qu’en 2019, mais deux fois moins qu’en 2018 lorsque les importations françaises auraient atteint plus de 10 000 t. La raison de cette baisse serait la concurrence accrue de l’origine colombienne sur le marché européen. « Nous sommes devenus le 4e exportateur mondial », dit Julio Vivas. Le premier producteur mondial d’avocats, le Mexique, fournit avant tout les Etats-Unis et les Pays Bas, qui sont surtout une place de transit. Donc, le Pérou s’illustre comme le premier fournisseur d’avocats de l’UE. En 2020, 33 % des avocats du Pérou sont allés aux Pays Bas, 22 % aux Etats-Unis, 17 % en Espagne, et presque autant au Royaume-Uni.
Une prime avocat bio de 15 à 20 %
Or, les exigences accrues des consommateurs européens sur les critères environnementaux obligent la filière péruvienne de l’avocat à y répondre. Toutefois, l’avocat bio demeure une rareté au Pérou. « Seuls quelques opérateurs, comme Comexa du groupe Westfalia, allongent de 15 à 20 % de prime bio par rapport à un lot d’avocats « seulement » certifiés Global Gap avec son volet RSE, Grasp, lequel est devenu indispensable pour fournir des chaînes de GMS comme Lidl ou Walmart », selon Josselyne Lazo, la directrice de l’exportateur Fresh Baez.
Selon Julio Vivas du Senasa, près de 38 500 hectares d’avocatiers ont été certifiés pour l’export en 2021. Une surface en nette hausse par rapport aux 31 145 ha certifiés l’an passé. « Nous concentrons nos efforts dans la formation des petits agriculteurs des régions montagneuses (dans les Andes), pour qu’ils atteignent les exigences minimales requises par les protocoles sanitaires signés avec l’UE », précise le fonctionnaire péruvien. « Le protocole d’accord avec l’UE est systémique, précise-t-il. Du champ au bateau, en passant par l’emballage, nous auditons les lots. Jusqu’ici, aucun lot d’avocats du Pérou n’a fait l’objet d’une notification de non-conformité de la part d’Eurofit ». Le sceau sanitaire public péruvien garantit avant tout la traçabilité du produit.
« Une certification sur l’usage de l’eau »
Josselyne Lazo est une ex-employée de Camposol, un groupe aux ramifications aux quatre coins du monde qui cultive plusieurs milliers d’avocatiers sur la côte nord du Pérou, une région où est également implantée la douzaine de grands couteaux du secteur, tels que Avocado Packing Company, Westfalia Fruit Peru, Agrícola Cerro Prieto, Agrícola Drokasa et Virú. Selon elle, « avoir la certification Global Gap ne garantit pas forcément à l’exportateur un meilleur prix, mais elle lui permet de rester dans le haut du panier lorsque l’offre abonde, comme actuellement [entretien réalisé le 1er juin] », résume Josselyne Loza.
La certification bio des avocats, au Pérou, en serait à ses premiers pas. Josselyne Loza cite le cas d’une ferme reconvertie au bio à qui il a fallu quatre ans pour être certifiée et qui obtient des rendements bien inférieurs à la moyenne de 10 à 14 t/ha d’avocats obtenues par les agriculteurs péruviens (avec des plants de sept ans d’âge ou plus), et très loin des 17 t/ha atteintes dans les vergers des grosses exploitations implantées sur la côte nord péruvienne.
« La certification la plus récente concerne l’usage de l’eau, un volet intégré au système Global Gap depuis deux ou trois ans », dit-elle. Selon elle, au Pérou, il n’y a pas de certification de type bas carbone en vue. S’il traverse les océans, l’avocat du Pérou le fait essentiellement par bateau, « sauf certains envois par avion vers les pays de la péninsule arabique, par exemple », précise Josselyne Loza.
Global Gap avec son volet RSE, Grasp, est devenu indispensable pour fournir des chaînes comme Lidl ou Walmart
L’aliment « réconfortant »
Lors de Fruit Attraction LIVEConnect 2020, l’Organisation mondiale de l’avocat (Wao) a confirmé la croissance imparable de la consommation d’avocats en Europe. Plus de 700 000 t y ont été vendues en Europe, soit 100 000 t de plus qu’en 2019. Pendant la pandémie, l’avocat est devenu le nouvel « aliment réconfortant ». « Beaucoup de consommateurs se sont tournés vers des aliments qui renforcent le système immunitaire. L’avocat s’inscrit dans les nouvelles habitudes et besoins des consommateurs en 2020 », a déclaré Xavier Equihua, PDG de Wao.
Les données de recherche en ligne montrent également la popularité croissante de l’avocat dans les foyers du monde entier. La Wao a également annoncé diverses propositions pour encourager les ventes d’avocats notamment l’usage de coupons électroniques. Ces codes numériques sont l’équivalent des coupons papier utilisés pour offrir des rabais ou des promotions aux consommateurs lors de l’achat d’un produit. « Les coupons électroniques sont un excellent outil pour fidéliser mais aussi pour attirer de nouveaux clients. Leur utilisation est répandue aux Etats-Unis. Avec la numérisation de nombreux services pendant la pandémie, c’est le moment idéal pour les étendre en Europe », a déclaré Xavier Equihua, PDG de Wao.
Nadia Venticinque
Camposol investit dans Hass
L’exportateur péruvien de fruits et légumes Camposol cultive plus de 2 600 ha d’avocat au Pérou. L’entreprise a également investi massivement dans la production d’avocats Hass en Colombie, dépassant son objectif initial de 2 000 ha en moins de trois ans. « Cela nous permettra d’offrir des avocats tout au long de l’année », déclare Jorge Ramírez, CEO Camposo.
Lors de la pandémie de Covid-19, l’entreprise a été en mesure de répondre rapidement à la demande grâce à son réseau mondial aux Etats-Unis, en Europe et en Chine et constate maintenant sa progression au Royaume-Uni, en Espagne et sur la côte ouest des Etats-Unis. Camposol développe une stratégie comparable avec les mandarines en investissant dans des zones de culture en Uruguay et au Pérou pour « couvrir toute la fenêtre » d’approvisionnement de l’Hémisphère sud.
Source : Eurofresh distribution