Aller au contenu principal

Orge brassicole : adapter la fertilisation azotée pour sécuriser le taux de protéines

Depuis de nombreuses années, la filière brassicole s’interroge sur le pilotage de l’azote des orges d’hiver et de printemps. Elle demande des outils fiables pour gérer au mieux leur teneur en protéines et répondre aux cahiers des charges.

En orge brassicole, la tendance est au fractionnement de la fertilisation azotée pour une meilleure efficience des apports. © J.-C. Gutner
En orge brassicole, la tendance est au fractionnement de la fertilisation azotée pour une meilleure efficience des apports.
© J.-C. Gutner

Ni trop, ni trop peu en protéines ! Les malteurs comme les brasseurs recherchent des orges brassicoles avec un taux de protéines compris entre 9,5 et 11,5 %. Ces protéines solubles interviennent dans le process lors de la fermentation. « Le tunnel de protéines est étroit. Tous les abaques de calcul des besoins en azote des orges sont faits sur des objectifs de rendement. S’il est atteint, la qualité l’est aussi. Mais attention aux évolutions de pratiques d’application, du nombre d’apports et du type d’engrais utilisé, qui ne doivent pas mettre les agriculteurs à défaut en termes de qualité », prévient Édouard Renault, responsable agronomique des malteries Soufflet.

Selon Luc Pelcé, animateur national de la filière orges brassicoles chez Arvalis, la majorité des agriculteurs utilise la méthode du bilan pour calculer la dose d’apport d’azote. « Cette méthode, inspirée de celle du blé, est-elle la bonne et unique solution ? Dans un contexte de chaos climatique, nous assistons à des extrêmes en rendement et en teneur en protéines. » En 2019, la moitié des orges de printemps affichait un taux de protéines inférieur à 9,5 % contre plus de 11,5 % en 2020. « Utiliser des OAD, c’est se donner les chances d’être dans la fourchette des 9,5 et 11,5 % de protéines, souligne l’animateur Arvalis. Malheureusement, ces utilisations restent anecdotiques et c’est regrettable ! »

Piloter l’azote pour mieux gérer son efficience

« Un pilotage au stade '1 nœud' permet de vérifier que la plante est correctement alimentée en azote et qu’elle peut produire du rendement et de la qualité brassicole », rappelle Luc Pelcé. La méthode HNT extra ou N-Tester développée par Yara, ou l’outil Farmstar proposé par Arvalis, permet de déplafonner la dose calculée par la méthode du bilan, lorsque les conditions agroclimatiques sont favorables.

« Le service Farmstar ne nécessite pas de zone surfertilisée comme pour le HNT extra. Par contre, les délais de livraison des cartes auprès des agriculteurs sont plus longs. Il arrive souvent que l’orge soit à un stade trop avancé et que la dose préconisée soit, de ce fait, trop élevée », remarque Luc Pelcé. Pour une dose calculée supérieure à 150 unités ou avec un pilotage Farmstar, le régime est plutôt de trois apports. Ce fractionnement est de plus en plus préconisé auprès des agriculteurs. L’apport tardif d’azote évite de trop faibles taux de protéines.

 

 
L'outil Farmstar peut être mis à profit pour le pilotage de la fertilisation azotée sur orge. © Arvalis
L'outil Farmstar peut être mis à profit pour le pilotage de la fertilisation azotée sur orge. © Arvalis

 

Adapter la fertilisation pour les variétés de printemps semées à l’automne

Conséquence de l’évolution climatique, de nouvelles techniques de production, comme le semis d’orge de printemps à l’automne, se développent dans certaines régions. Le pilotage de la fertilisation doit être ajusté en conséquence. « La pratique du fractionnement des apports mérite d’être préconisée pour ce type de semis, affirme Emmanuel Bonnin, technicien filières chez Soufflet Agriculture. Elle permet de gagner en potentiel pour l’agriculteur et en qualité pour le malteur. C’est judicieux ! » Pour Édouard Renault, « la date de semis, les conditions climatiques et le stade de la culture en sortie d’hiver sont des paramètres à prendre en compte plus finement pour piloter au mieux la fertilisation azotée des orges de printemps semées à l’automne ».

 

 
L'utilisation d'outil, tel que le N-Tester ici, aide à la modulation de l’azote en orge de printemps pour apporter la bonne dose au moment où la plante en a besoin. © Arvalis
L'utilisation d'outil, tel que le N-Tester ici, aide à la modulation de l’azote en orge de printemps pour apporter la bonne dose au moment où la plante en a besoin. © Arvalis

Quel que soit l’itinéraire technique, la météo joue fortement sur la teneur en protéines. « L’azote n’est valorisé que s’il pleut dans les quinze jours qui suivent l’apport, rappelle Arvalis. C’est une nouvelle approche qu’il faut considérer. » En 2015 et 2019, un printemps favorable a permis un déplafonnement de 40 unités par hectare, ce qui s’est traduit par des gains de rendement de plus de 7 quintaux à l’hectare en restant dans la fourchette de « l’objectif protéines ». En 2020, malgré une dose calculée de 120 unités, l’OAD n’a pas préconisé d’apport supplémentaire. Le printemps sec avait déjà altéré le potentiel de l’orge. Le meilleur pilotage, c’est la précision de la météo et non plus le stade de la culture.

 

Le projet Prosit apporte des connaissances sur les protéines

« Physiologiquement, l’orge ne remobilise pas l’azote de la même manière que le blé, souligne Louis-Marin Bossuet, responsable des études Vate orge au Geves, et le processus est moins bien documenté qu’en blé tendre. Par ailleurs au-delà de l’aspect quantitatif, la qualité des protéines et leur incidence sur les process (maltage, brassage) restent largement méconnues. »

Pour répondre à cette problématique, la filière travaille sur un projet, intitulé Prosit. « Ce programme consiste à comprendre quelle fraction protéique est liée à la qualité brassicole et s’il est possible de 'piloter' la qualité des enzymes et des protéines via la fertilisation azotée », indique Marc Schmitt de l’Institut français des boissons, de la brasserie et de la malterie (IFBM). « La France dispose des trois premiers malteurs mondiaux, signale Marc Schmitt. Cela nous ouvre des perspectives pour revisiter la construction des protéines dans les orges ! »

Les plus lus

<em class="placeholder">Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne.</em>
Mauvaises récoltes 2024 : « On rogne sur notre rémunération et sur l’entretien du matériel, faute de trésorerie suffisante »
Mathieu Beaudouin est agriculteur à Évry-Grégy-sur-Yerre, en Seine-et-Marne. Il témoigne de ses difficultés depuis un an liées…
<em class="placeholder">Agriculture. Semis de blé. tracteur et outil de travail du sol à l&#039;avant. agriculteur dans la cabine. implantation des céréales. lit de semences. semoir Lemken. ...</em>
Semis tardif de céréales : cinq points clés pour en tirer le meilleur parti

Avec une météo annoncée sans pluie de façon durable, un semis tardif de blés et d'orges dans de bonnes conditions de ressuyage…

[VIDÉO] Dégâts de grand gibier : une clôture bien installée pour protéger le maïs des sangliers

Agriculteur à Saint Fuscien dans la Somme, Valère Ricard a pu recourir aux services de la fédération des chasseurs de son…

<em class="placeholder">Bord de champ inondé après un excès de pluie en bordure d&#039;un champ de céréales. Avril 2024 dans le nord de l&#039;Eure-et-Loir</em>
Difficultés de trésorerie : quelles sont les mesures existantes pour faire face ?

Les mauvaises récoltes pèsent sur les trésoreries. Des mesures ont été annoncées par l’État alors que la MSA, les banques et…

Pierre Devaire, agriculteur en Charente, dans une parcelle.p
Récoltes 2024 : « une campagne traumatisante » pour les céréaliers du Poitou-Charentes

L’heure est au bilan chez les producteurs de céréales, au terme d’une campagne 2024 qui fut difficile du début à la fin. Les…

<em class="placeholder">Moisson du Colza dans les plaines cerealieres de la Marne. Agriculteur moissonnant sa parcelle de Colza avec une moissonneuse bateuse Claas 740 Lexion.  Livraison du Colza a ...</em>
Prix du blé et du colza 2024 : quand vendre votre récolte ?

L’embellie du prix du colza depuis quelques semaines offre quelques opportunités aux producteurs de grandes cultures. C’est…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 90€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures