Méthanisation:« Grâce aux digestats, nous avons supprimé la quasi-totalité de l’ammonitrate »
Au Gaec Moulins de Kerrolet, dans le Morbihan. Grâce à une gestion très fine des digestats, l’exploitation n’utilise quasiment plus d’azote minéral et produit des luzernes très riches en matière azotée.
Au Gaec Moulins de Kerrolet, dans le Morbihan. Grâce à une gestion très fine des digestats, l’exploitation n’utilise quasiment plus d’azote minéral et produit des luzernes très riches en matière azotée.
« Les personnes défavorables à la méthanisation disent souvent qu’elle va tuer l’élevage. Dans notre exemple, elle a permis de le développer », affirme Bruno Calle, un des trois associés du Gaec Moulins de Kerrolet, à Arzal dans le Morbihan. La première installation de méthanisation, en 2012, avait une puissance de 250 kWe. Depuis, elle a été portée à 700 kWe. Les cultures de vente classiques ont été supprimées et la quasi-totalité de la surface (250 ha) est désormais consacrée à l’élevage laitier (230 vaches). Les effluents fournissent 60 % de la ration du méthaniseur (20 m3 de lisier et 10 t de fumier par jour). Elle est complétée par des produits de l’exploitation (refus d’alimentation, fourrages de moins bonne qualité en périphérie des silos, excédents de stocks) et des produits extérieurs (sous-produits de la laiterie, pulpe de citron, marc de pomme, poussière de céréale), qui assurent respectivement 15 et 25 % de la ration.
130 unités d’azote sur le maïs
L’installation de méthanisation est équipée d’un séparateur de phases. La fraction solide du digestat est très riche en phosphore (5 N, 8 à 10 P, 5 K) car les perméats de laiterie, la pulpe de citron et le marc de pomme sont fortement pourvus. La fraction liquide affiche des valeurs plus faibles (3 à 3,5 N, 2 P, 4 K). « Équilibrer la fertilisation est quelquefois un peu compliqué. Nous avons des prêteurs de terre pour équilibrer le phosphore. En revanche, grâce au digestat, nous n’avons pas besoin des 170 unités d’azote organique permises par la réglementation pour fertiliser nos cultures parce que le coefficient d’efficacité de la fraction liquide est très favorable. En balance azotée, nous sommes à 120 unités totales. Sur des maïs à 14 tMS/ha, nous n’apportons pas plus de 130 unités d’azote. Nous gérons le digestat de la manière la plus optimale possible. Sur nos 200 hectares, avant la méthanisation, nous utilisions 50 tonnes d’ammonitrate par an. Aujourd’hui, nous ne sommes plus qu’à une tonne pour des parcelles non épandables. »
Des luzernes à 23-24 % de protéine
L’exploitation est équipée d’un épandage sans tonne avec un tuyau de 1,2 km raccordé au réseau d’irrigation de 6 km. Sur les parcelles non desservies, l’épandage est effectué avec une tonne avec rampe à pendillards. Mais, au printemps, dès que la température dépasse 25 °C ou que l’hygrométrie descend au-dessous de 80 %, un enfouisseur à disque remplace le pendillard. Le digestat solide est épandu avec une table d’épandage en fin d’été-début d’automne sur les luzernes et les prairies riches en trèfle et après la première coupe sur les luzernes (20 t/ha/an en deux fois). Après la deuxième coupe, les luzernes peuvent recevoir en complément 60 UN de digestat liquide pour booster la teneur en protéine.
Le dérobé (ray-grass d’Italie) est fertilisé avec 80 UN. Trois passages de digestats sont effectués sur les prairies de fauche. « Sur la luzerne, nous sortons entre 12 et 14 t MS/ha les bonnes années et entre 10 et 11 tonnes les années plus normales, assure l’éleveur. Elle a peu de nodosités mais elle exprime complètement son potentiel. Elle est conduite de manière intensive sur trois à quatre ans. Séchée avec la chaleur de la méthanisation, elle oscille entre 23 et 24 % de protéine à partir de la deuxième coupe. Nous avons économisé 400 kg/VL/an de correcteur azoté, à performance laitière égale. »