« ll faut mieux tenir compte des spécificités des petits producteurs de volailles», demande le président du Cnada
Patrick Mille, président du Comité national des aviculteurs indépendants, alerte sur le secteur sinistré des volailles démarrées et demande une adaptation des réglementations pour les producteurs en circuits courts.
Patrick Mille, président du Comité national des aviculteurs indépendants, alerte sur le secteur sinistré des volailles démarrées et demande une adaptation des réglementations pour les producteurs en circuits courts.
Comment sont impactés les producteurs indépendants de volailles traditionnelles ?
Les éleveurs de volailles démarrées sont en grandes difficultés, en chair et en ponte, du fait de la fermeture des marchés de volailles vivantes et des animaleries. Ils ont perdu la majeure partie de leurs débouchés du jour au lendemain. Certains ont réussi à écouler un peu de leurs produits mais cela reste à la marge. Seulement 15 % des animaux sont commercialisés. Nous avons demandé aux pouvoirs publics que les achats de volailles à destination des particuliers soient considérés comme des achats de première nécessité, au même titre que les plants potagers qui ont été réautorisés, mais nous n’avons pas eu gain de cause jusqu’à présent (1). Il est possible de reporter de 2 à 3 semaines la vente de poules prêts à pondre mais c’est impossible sur des volailles démarrées en chair. Les bâtiments sont pleins. Les achats de poussins ont été stoppés. On redoute une pénurie de volailles démarrées d’ici 1 à 2 mois.
Il y a moins d’inquiétudes pour les éleveurs de volailles finies qui réussissent à écouler leurs produits sans trop de difficultés, en innovant dans les modes d’accès aux particuliers (vente directe, page Facebook…). Les producteurs qui disposent d’un abattoir et d’un magasin à la ferme ont dû gérer une énorme augmentation de la demande. Or ils ont peu de flexibilité sur les volumes et connaissent des difficultés de main-d’œuvre.
Quel est l’impact sur la pérennité des entreprises ?
En l’absence d’aides extérieures, les éleveurs de poules prêtes à pondre vont avoir du mal à s’en sortir et risquent d’arrêter leur activité, de même que les revendeurs. Une grande partie d’entre eux ont déjà subi la crise de l’influenza de 2015-2016. Ils peuvent difficilement encaisser une crise tous les 2-3 ans. L’ouverture rapide des marchés de volailles vivantes limiterait la disparition d’entreprises, d’autant plus qu’il y a actuellement beaucoup de demande de poules de compagnie.
Qu’est ce qui change par rapport à la crise de l’IA ?
Les marchés de volailles vivantes ont été fermés également, ce que nous comprenions car il y avait à l’époque un risque de transmission du virus de la volaille vivante à l’homme. Ce n’est pas le même contexte aujourd’hui. L’impact avait été moins important car la fermeture des marchés avait eu lieu à l’automne et pas au printemps comme actuellement, qui est traditionnellement le pic saisonnier pour la vente de volailles de basse-cour. On était les seuls sinistrés, c’est loin d’être le cas aujourd’hui. On craint que les aides de l’État ne soient pas à la hauteur des pertes.
Quelles sont vos demandes auprès des pouvoirs publics ?
Cette crise montre l’importance du maillon des producteurs indépendants. Sans nous, des magasins dans certaines régions auraient été très mal achalandés. On contribue au maintien de la chaîne alimentaire, malgré les difficultés de manque de personnel et de produits. Pour que nos petites et moyennes entreprises puissent continuer à exister, il faut que les pouvoirs publics tiennent davantage compte de nos spécificités et adaptent la réglementation à nos petites structures : biosécurité en élevage, agrément sanitaire des tueries et petits abattoirs, mesures de bien-être animal (anesthésie au gaz)… Sinon beaucoup d’établissements risquent de disparaître.
Cette crise peut-elle durablement modifier les comportements d’achat ?
On constate un engouement pour les circuits courts et les produits locaux. On espère que ces changements de comportements d’achats perdurent. Cette crise va inciter davantage les producteurs à aller vers de nouveaux circuits de commercialisation (Amap, vente directe, magasin…). La création de ces marchés parallèles à la grande distribution permettra une meilleure redistribution des marges.