Prairie : L’albédo des prairies, levier de lutte contre le changement climatique
En plus du stockage du carbone dans les sols, les prairies ont un autre atout : leur capacité à réfléchir la lumière du soleil. C’est l’albédo. Son bénéfice dans la lutte contre le changement climatique pourrait atteindre près de la moitié de celle du stockage du carbone.
En plus du stockage du carbone dans les sols, les prairies ont un autre atout : leur capacité à réfléchir la lumière du soleil. C’est l’albédo. Son bénéfice dans la lutte contre le changement climatique pourrait atteindre près de la moitié de celle du stockage du carbone.
Après la baisse des émissions de gaz à effet de serre et le stockage du carbone dans les sols, l’albédo des prairies est le troisième levier d’atténuation du réchauffement climatique à disposition des éleveurs de ruminants. Il traduit le pouvoir réfléchissant du rayonnement solaire. Plus ce rayonnement est renvoyé dans l’atmosphère, plus l’albédo est élevé, plus l’effet refroidissant est important.
Les conclusions du projet Albédo-Prairies, porté par Pierre Mischler de l’Idele, ont montré que les prairies ont un effet refroidissant et que celui-ci est supérieur à celui d’un sol nu (hors sol calcique) ou à un blé de 33 % à 40 %. En termes de comptabilité climatique carbone, le bénéfice de l’albédo, traduit en eq. CO2 pour le comparer aux gaz à effet de serre, serait équivalent à la moitié de celui du stockage de carbone selon les mesures effectuées dans six fermes expérimentales(1).
La fauche limite le pouvoir refroidissant
Le projet a également permis de montrer que les pratiques pouvaient influer sur le niveau d’albédo d’une prairie. « Le sol nu, c’est l’ennemi », illustre Pierre Mischler. Alors pour maintenir voire tenter d’augmenter l’albédo d’une parcelle, il faut couvrir le plus longtemps possible le sol (dérobées, couverts intermédiaires, avancer la date de semis, variétés à développement rapide, maintenir les résidus de cultures au sol…).
Une fauche ou un pâturage avec un chargement élevé réduisent transitoirement l’effet refroidissant car il y a plus de sol nu visible qui a un albédo plus faible. « La diminution de l’albédo peut être relativement conséquent après une fauche. » À la ferme expérimentale de Trévarez, il a fallu un mois pour que l’albédo retrouve son niveau initial après une fauche.
Une prairie fortement dégradée pourrait même voir son pouvoir refroidissant neutralisé voire basculer vers un pouvoir réchauffant. Éviter le surpâturage, en réduisant le chargement et/ou en augmentant la hauteur d’herbe en sortie des animaux en cas d’herbe peu poussante serait alors une piste pour augmenter le pouvoir refroidissant d’une prairie.
La météo est également un facteur améliorant ou altérant. Quand l’humidité du sol augmente fortement, alors l’albédo baisse. Il en est de même pour un sol plus sec. L’albédo varie également selon les espèces implantées. Les études continuent pour pouvoir mieux le caractériser et pourquoi pas à terme l’intégrer dans le diagnostic Cap'2ER ou dans les critères de choix variétales.
Repère
L’empreinte carbone moyenne d’un litre de lait est de 1,06 kg eq. CO2
Mise en garde
« Il ne faudrait pas dire qu'en combinant le stockage et l’albédo, nous arrivons à la neutralité carbone et que les éleveurs n’ont rien à faire pour lutter contre les émissions de gaz de serre, prévient Jean-Baptiste Dollé, d’Idele. Il faut différencier méthodologie et contribution à la lutte contre le changement climatique. » De plus, les graminées semblent avoir un albédo plus élevé que les légumineuses. « Il faut faire attention à ne pas avoir un message inverse à ce qui peut être dit sur l'intérêt des légumineuses pour l’autonomie protéique », alerte René Beaumont, d’Inrae.