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Le maïs population commence à faire son trou

En Rhône-Alpes, les groupes d'éleveurs qui travaillent sur les maïs population obtiennent des rendements de même ordre qu'avec les hybrides mais une valeur énergétique qui peut être limitante.

" Je suis fier de faire ma semence de maïs. J'ai une population qui s'adapte à mon exploitation ", expose Didier Bruyère, éleveur dans le Rhône, adhérant à l'Addear. Ce réseau de l'agriculture paysanne anime des groupes d'agriculteurs, suit leurs travaux et leurs résultats. " À partir de 2016, le maïs population a connu un engouement chez les éleveurs, surtout les bios, mais pas uniquement. Aujourd'hui, nous suivons environ 60 exploitations dans la Loire et le Rhône ", indique Carl Waroquier, de l'Addear.

L'autre grosse motivation est l'économie réalisée sur le coût de la semence, surtout en bio. " Pour ceux qui sont en agriculture de conservation, le maïs population fait partie des options pour réaliser des couverts estivaux à faible coût ", ajoute Florence Fargier, de Rhône Conseil élevage, qui suit les groupes.

La principale contrainte est que " faire " son maïs population prend du temps : observer, trier, égréner... Il faut réserver une petite parcelle isolée, à plus de 300 mètres des parcelles de maïs hybrides, pour réaliser la semence. Enfin, la valeur alimentaire est un peu différente.

Moins riche en amidon, plus riche en sucre

Les résultats des essais suivis par l'Addear et Rhône Conseil élevage montrent que les populations ont des rendements corrects, presque dans la moyenne des hybrides.

Par contre, l'ensilage des maïs populations est souvent moins riche en amidon et plus riche en sucre soluble. Les valeurs UFL sont sensiblement les mêmes au final. " Les maïs population ont une très bonne capacité à développer leur appareil végétatif. Par contre, il y a plus de plantes sans épi qu'avec des hybrides. Chez les populations, la période de levée est plus étalée que chez les hybrides, la période de fécondation aussi. Lors de stress hydrique ou thermique sur la floraison, une partie des plantes ne féconde pas. Ainsi, le rapport tige-feuille/épi est plus élevé que pour un hybride ", explique Florence Fargier. 

Viser 28-30 % MS pour l'ensilage

Les populations sont donc plus riches en eau, hémicellulose, cellulose, lignine et sucre. " Pour avoir de bonnes valeurs UFL, il faut donc que la plante reste verte, et ensiler précocément. On recherche donc un taux de matière sèche plus faible que pour un ensilage d'hybride, autour de 28-30 % MS, pour garder une bonne digestibilité ", explique Florence Fargier. 

Pour améliorer les maïs populations, les groupes sélectionnent pour obtenir des plantes capables de rester vertes à maturité, moins sensibles à la verse, moins sensible au charbon... La sélection porte aussi sur la recherche de variétés plus précoces, notamment pour les parcelles à plus de 500 mètres d'altitude. " L'indice de précocité " estimé des populations est compris entre environ 300 et 450.

Une densité de semis plus faible

L'autre travail des groupes porte sur l'itinéraire technique. " Les maïs population ont tendance à faire plus de végétation, donc on sème moins dense pour éviter de pénaliser la fécondation. Si on semait à 95 000 grains avec un hybride, il faut passer à 80 000 grains avec une population ", préconise Florence Fargier. Une autre piste serait de réduire l'écartement entre les rangs et d'augmenter l'espace entre deux grains sur le rang, sans modifier la densité de semis. La contrainte est d'adapter le reste des matériels.

Le reste de l'itinéraire technique est le même qu'avec des hybrides, hormis qu'il faut réaliser un test de germination sous serre trois semaines à un mois avant de semer, avec 20 à 50 grains. En fonction du taux de levée, on ajuste la densité de semis. Selon les éleveurs et les conseillers, les populations sont capables de se contenter d'une moindre fertilisation et de mieux résister à des périodes de stress hydriques. Mais il manque d'essais pour étayer cette hypothèse.

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Définition

Une population est une " variété " ancienne, non hybride, issue de semences paysannes. Elle est adaptée à un terroir, avec une hétérogénéité entre les individus plus élevée que pour une variété hybride.

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Vitrine 2018 de variétés chez Pierre-Olivier Rajot, éleveur dans la Loire

Les taux de matière sèche sont élevés car la récolte a été retardée par l'organisation de la journée porte ouverte. " Une semaine avant, les maïs populations que j'ai ensilés étaient à 33 % de matière sèche environ ", ajoute l'éleveur.

" L'ensilage de population est plus riche en cellulose, mais comme je n'en utilise qu'à un tiers de la ration, pour des vaches allaitantes, ce n'est pas un problème. Chez mes voisins en vaches laitières, l'ensilage de maïs constitue moins qu'un tiers de la ration ", commente Pierre-Olivier Rajot.

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Un intérêt économique même en conventionnel

Le BTPL a estimé l'intérêt économique de produire sa semence de maïs population par rapport à l'achat de semence hybride en conventionnel et en bio.

Le calcul a été réalisé pour une ferme où la production de semences sur 30 ares a permis de récolter 10 ares et de semer 8 ha l'année suivante.

Le temps de travail, rémunéré 15 €/h, a été estimé à 36 heures : implantation, interventions, ramassage manuel, observation, sélection des poupées et stockage, égrenage, trajets, triage et mise en sac, une journée de formation. Le coût de production de la semence population est complet : fermage, préparation du sol, semis, culture, récolte et conservation.

Une économie de 118 €/ha en bio

Le coût total est d'environ 3,50 €/kg semence population (plus ou moins selon la réussite de la récolte). Par comparaison, le coût d'achat de semence hybride est d'environ 5 €/kg en conventionnel et de 9 €/kg en bio.

En semant à 80 000 grains par hectare, on peut semer 8,3 ha. Soit 85 €/ha de coût de semences. Par rapport au coût de semence d'un hybride conventionnel (150 €/ha), l'économie réalisée est de 65 €/ha. Par rapport au coût d'une semence bio (250 €/ha), l'économie réalisée est de 165 €/ha. En déduisant la recette que l'on ne dégage pas en consacrant 10 ares à la production de semence, l'économie est d'environ 37 €/ha en conventionnel et d'environ 118 €/ha en bio.

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