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Le bien-être animal, une voie pour réconcilier élevage et société

Le concept de bien-être animal évolue et invite à changer de mode d'élevage avec, dans le viseur, un mieux pour les animaux, les éleveurs et l'environnement. Explication avec Inrae.

Depuis le XVIIIe siècle, il est reconnu que l'animal est un être doué de sensibilité. Mais être sensible, qu'est-ce que ça signifie ? « C'est être capable de percevoir des sensations physiques mais aussi de ressentir des émotions », répond Pierre Mormède, éthologue à l'Inrae, lors d’une récente journée organisée par l’association Lit Ouesterel à Nantes. La science a démontré que les animaux éprouvent de la douleur, de la souffrance, du plaisir et de la satisfaction. Les chercheurs de l'Inrae ont proposé en 2009 une règle de prise en compte de la douleur, la règle des 3S : supprimer, substituer, soulager. Si on prend l'exemple de l'écornage, la première question à se poser est : Est-ce vraiment indispensable ? Si oui, l'ébourgeonnage du jeune veau, moins douloureux, peut-il remplacer l'écornage de l'adulte ? Si non, un anesthésiant peut-il aider l'animal à mieux supporter l'intervention ?

Plus récemment, une expertise collective de l'Inrae a conclu à une conscience chez les animaux mammifères. Et cela modifie la conception de leur bien-être. « Il ne suffit plus de bien traiter les animaux, il convient aussi de prendre en compte la façon dont ils ressentent la situation qu'ils vivent. » Les cinq libertés du rapport Brambell de 1965 définissant les besoins fondamentaux des animaux d'élevage ne sont plus qu'une feuille de route, un préalable. La manière dont l'animal perçoit le monde, ses émotions, ses désirs, ses préférences et ses attentes s'ajoutent à la bientraitance de base. Cette conclusion scientifique a conduit l'Anses à poser en 2018 la définition du bien-être d'un animal. Une bonne santé, un niveau de production satisfaisant et une absence de stress ne sont plus suffisants. « Il faut se soucier des perceptions subjectives déplaisantes, telles que la douleur et la souffrance, mais aussi rechercher des signes d'émotions positives que sont le plaisir et la satisfaction. » On parle aussi de qualité de vie, qu'il faut évaluer de la naissance à la mort, donc jusqu'à l'abattage.

Changer le modèle d'élevage

L'évolution de l’élevage, dictée par la modernisation de l'agriculture, a établi une forte pression sur les animaux et détériore parfois leur milieu de vie, les conditions de travail des éleveurs et l'environnement. Le bien-être des animaux, longtemps passé au second plan, occupe aujourd'hui le devant de la scène sous la pression conjuguée des citoyens, des consommateurs et des associations de protection animale. « Ce n'est pas une tendance passagère, ni un effet de mode, mais une évolution de la société qui monte depuis quinze ou vingt ans », confirme Eric Baratay, historien à l'université de Lyon. Bien-être des animaux et des éleveurs, santé humaine et protection de l'environnement, tout converge vers une refonte des systèmes d'alimentation et d'élevage. « La demande sociétale pour un mode d'élevage et d'abattage amélioré est forte. » Les vidéos choc de L214 ont laissé des traces dans les esprits... Pierre Mormède considère que l'étiquetage est au cœur de cette évolution. « Le consommateur est décideur et il est prêt à payer pour ça. »

Comment faire pour progresser ?

La génétique a un rôle majeur à jouer. Longtemps axée exclusivement sur la performance laitière, elle s'intéresse aussi aux caractères fonctionnels. Facilité de mise-bas, qualité des aplombs, efficacité du système immunitaire, résistance aux maladies, caractéristiques comportementales : autant de critères qui apparaissent dans les schémas de sélection et qui participent au bien-être des vaches. Deuxième point, les conditions d'élevage. L'accès à l'extérieur permet de mieux exprimer les comportements naturels. Dans tous les cas, la solution semble se dessiner dans une prise en compte à la fois du bien-être des animaux, des humains et de l’environnement. C'est le concept émergent du One welfare, un seul bien-être.

Le saviez-vous ?

Les cinq libertés de Brambell

- Absence de faim et de soif

- Absence d’inconfort

- Absence de douleurs, de blessures et de maladies

- Liberté d'expression des comportements naturels propres à l’espèce

- Absence de peur et de détresse

Définition

L'Anses définit le bien-être animal comme un état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l'animal.

Les Français et les conditions d'élevage

D'après un sondage Opinionway, 60 % des Français connaissent mal les conditions d'élevage, de transport et d'abattage des animaux. Mais la moitié considèrent qu'elles sont mauvaises en France. Le point positif, c'est que 47 % de la population pense que les conditions de vie des animaux d'élevage se sont améliorées depuis dix ans. Le degré de confiance pour assurer le respect du bien-être animal est faible vis-à-vis des transporteurs et des abattoirs, très bon pour les vétérinaires et les éleveurs.

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