Pesticides
Réduire les risques liés à l’utilisation
Le plan triennal proposé par quatre ministères entend diminuer de 50 % les volumes de ventes des substances jugées comme les plus dangereuses
UN PLAN interministériel de réduction des risques liés à l’utilisation de pesticides a été présenté le 28 juin en conseil des ministres. Mis en place par les ministères de l’Agriculture, de l’écologie, de la Santé et de la Consommation, il entend limiter les risques liés à l’utilisation de phytosanitaires et de biocides pour la santé, des utilisateurs notamment, mais également des conséquences néfastes sur l’environnement et la biodiversité. Le plan, applicable sur 2006-2009 et articulé autour de cinq axes, prévoit « une réduction de 50 % » des ventes des 47 substances actives les plus dangereuses, selon un communiqué commun aux quatre ministères.
Mesures incitatives en perspective
Les autorités entendent tout d’abord améliorer les conditions de mises sur le marché des produits. Les matières actives les plus dangereuses seront taxées au titre de la redevance prélevée par les agences de l’eau de manière à en réduire les volumes commercialisés. Le gouvernement défendra auprès de la Commission européenne l’application du principe de substitution dans la réglementation communautaire. Le plan entend également optimiser les procédures d’évaluation et la gestion des risques, liés à la distribution et l’utilisation des différents produits. Il intègre d’ailleurs le transfert de l’évaluation des phytosanitaires à l’Afssa (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) dès le mois de juillet. La signature du décret est prévue pour la mi-juillet. Il prévoit aussi le lancement de l’Observatoire des résidus de pesticides, qui sera placé sous la responsabilité de l’Afsset (Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail). Rassemblant les données sur la présence de pesticides dans l’environnement, celui-ci a pour objectif d’améliorer la connaissance et la transparence en matière d’impact sanitaire et environnemental. Le plan entend en effet développer la formation des professionnels, et renforcer l’information et la protection des utilisateurs.
Les pratiques et systèmes de production plus économes en pesticides seront par ailleurs encouragés, « par l’acquisition et la diffusion de références techniques et des incitations financières ». Un système incitatif sera par exemple mis en place pour implanter des zones végétalisées permanentes (bordures enherbées, haies) le long des cours d’eau. Par ailleurs, dès la prochaine campagne, une zone non traitée d’au moins cinq mètres devra obligatoirement être respectée le long des 400.000 km de cours d’eau afin de limiter les transferts de pesticides dans l’eau. Enfin, un comité de suivi, ouvert à la société civile, sera mis en place « pour évaluer les progrès accomplis ». L’UIPP (Union des industries de la protection des plantes) aspire à cet égard à prendre part à son instauration « compte tenu de son expérience dans ce domaine », explique-t-elle dans un communiqué du 30 juin.
L’UIPP en « complet désaccord avec la fixation d’objectifs » arbitraires
L’APCA affirme, dans un communiqué du 28 juin, « s’inscrire pleinement dans l’optique du plan gouvernemental ». Les Chambres d’agriculture sont en effet « déjà fortement engagées dans cette démarche. Elles travaillent activement sur le développement des méthodes alternatives et des systèmes de production intégrée avec des groupes d’agriculteurs et organisent des démonstrations afin de sensibiliser le plus grand nombre aux résultats obtenus. »
Les représentants des industriels de la protection des plantes s’engagent, pour leur part et d’une manière générale, à accompagner ce plan. De fait, « ces mesures sont en parfaite cohérence avec les actions initiées par l’UIPP depuis plusieurs années dans le domaine des bonnes pratiques phytopharmaceutiques » (Adivalor, École de bonnes pratiques, bassins versants et études épidémiologiques). Et l’organisation de rappeler que les différentes actions menées, « combinées à une utilisation raisonnée par les agriculteurs, ont entraîné une baisse de 35 % des volumes de substances actives depuis 1999 ». De 120.000 t à l’époque, elles ont chuté à 78.000 t en 2005.
L’UIPP est en revanche « en complet désaccord avec la fixation d’objectifs qu’elle juge arbitraires tels que “ réduction de 50 % des quantités de substances actives les plus dangereuses, introduction du principe de substitution, réduction des mélanges ” dans la mesure ou ceux-ci sont en complète contradiction avec le principe d’évaluation scientifique des risques sur lequel repose l’Autorisation de mise sur le marché ». Or celui-ci a permis « des progrès majeurs dans le profil des produits autorisés et une réduction des quantités appliquées », affirme-t-elle. Pour l’Union, « l’application de ces mesures ne ferait que mettre en péril la compétitivité de l’agriculture française déjà touchée par le contexte économique international et des distorsions de concurrence ».
Dans un communiqué, la Confédération paysanne qualifie ce plan de « coquille vide », de « catalogue de bonnes intentions dans lequel les ministères ont omis de préciser quels étaient les moyens à mettre en œuvre, si ce n’est la sempiternelle promotion de l’agriculture raisonnée ». Et le syndicat d’ajouter : « Alors que la France est le premier utilisateur de pesticides en Europe et le troisième au niveau mondial (...), la Confédération paysanne attendait des mesures fortes qui permettent d’inverser la tendance. »