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Projet de loi d’Avenir, un manque d’ambition souligné

« Améliorer la compétitivité de nos filières, développer l’agro-écologie, renouveler les générations, et rénover les relations entre acteurs du monde agricole ainsi qu’avec le reste de la société. » Voilà les quatre grandes orientations du projet de loi d’Avenir pour l’agriculture qui doivent « nous permettre de relever le défi de la compétitivité économique, sociale et environnementale », déclare le ministre de l’Agriculture, Stéphane Le Foll. Le point sur quelques mesures phares.
GIEE, pluralisme syndical, contractualisation et statut de l’agriculteur
La création des GIEE (groupements d’intérêt économique et environnemental) doit venir « conforter la transition de l’agriculture vers des systèmes agro-écologiques en s’appuyant sur des dynamiques collectives ascendantes, ancrées dans les territoires ». Une partie des aides du second pilier de la Pac devrait leur être spécifiquement allouée.
À l’instar de la loi de Consommation, la loi d’Avenir veut « rééquilibrer les relations entre les différents maillons de la filière, entre agriculture, industrie agroalimentaire et distribution », Stéphane Le Foll considérant que la contractualisation, telle qu’elle avait été conçue par le précédent ministre de l’Agriculture « n’était pas à la hauteur des enjeux ». Cela passera par une clause de renégociation des contrats agricoles en cas de variation importante des cours des matières premières, et un « recours accru à la médiation pour mieux réguler les relations commerciales ». Le rôle du médiateur des contrats sera renforcé et « clairement défini dans la loi ». Ce dernier pourra « émettre des recommandations sur les modalités de partage équitable de la valeur ajoutée, tout au long de la chaîne alimentaire ».
Par ailleurs, les règles du pluralisme syndical de producteurs sont étendues aux interprofessions. Pour qu’un accord interprofessionnel soit reconnu et obligatoire, il faudra donc que les signataires représentent 80 % de la production agricole. Cela permet d’ouvrir les interprofessions aux syndicats minoritaires comme la Confédération paysanne ou la Coordination rurale.
En ce qui concerne la définition du statut d’agriculteur, « la surface minimale d’assujettissement est redéfinie pour y incorporer une notion d’activité ». Néanmoins, les heures travaillées et le chiffre d’affaires limites restent à préciser.
Pas assez d’ambition, selon les syndicats agricoles
Les acteurs du monde agricole, que ce soit les syndicats ou bien encore Coop de France, restent sceptiques. « Le contenu est maigre », a lancé le président de la FNSEA, Xavier Beulin, réagissant à la présentation du projet de loi d’Avenir le 17 septembre. « Il y a un décalage entre les aspirations qu’on partage pour l’agriculture et ce qui est proposé dans ce projet », dit-il. Concernant le statut des agriculteurs, « peut être faudrait-il commencer par le définir. Le projet passe à côté de l’essentiel. » Par ailleurs, « nous n’avons rien vu ni entendu sur le couple recherche/innovation alors que certaines solutions ne pourront venir que de la recherche, quand on parle d’avenir ». « La question aujourd’hui est de savoir si ce projet de loi est de nature à infléchir la courbe déclinante sur laquelle se trouve l’agriculture française, alors qu’on a perdu trois places sur le podium en une quinzaine d’années », relève Xavier Beulin. Dans le même esprit, Philippe Mangin estime qu’alors que, « partout ailleurs, l’agriculture pète le feu, nous accumulons les charges et les réglementations absurdes ». « Nous n’arrivons pas à créer de dynamique de reconquête de marchés », dénonce le président de Coop de France. Il regrette par ailleurs que « la promesse de la distribution, de prix toujours plus bas, semble toujours être cautionnée par les pouvoirs publics ».
Pour la Confédération paysanne, la loi d’Avenir « pourrait poser les jalons d’une vision de l’agriculture enfin tournée vers l’emploi, l’alimentation, la vie des territoires et l’environnement », mais le syndicat s’interroge sur les moyens à disposition, notant que « les manques sont plus visibles que les réels progrès ». Le syndicat souhaite « un contrôle des structures digne de ce nom », renforcer « la formation et la recherche », « donner un véritable statut à tous » les agriculteurs, et « se donner les moyens de maintenir des paysans sur l’ensemble du territoire, pour avoir une économie relocalisée, porteuse d’emplois et de vitalité des communes rurales ».