Les élèves ingénieurs prennent la plume…
L’évaluation du bilan Carbone s’affine
Les élèves ingénieurs prennent la plume…
Cloé Bresler: Après un stage effectué à l’Institut Français des Boissons de la Brasserie et de la Malterie à Nancy, souhaite s’orienter vers un poste en production ou dans la R&D.
Marion Reux : A réalisé un premier stage à la Minoterie Matignon (45). S’imagine d’ici quelques années chef
Dans un contexte mondial très axé sur le développement durable, il est légitime de s’intéresser à l’impact environnemental des produits agro-alimentaires. Le pain, produit de tradition française par excellence, n’échappe pas à cette interrogation chez les acteurs de la filière.
Des chiffres commencent à émerger
En faisant le ratio du tonnage de CO2 émis à l’année sur la quantité de blé écrasée au cours de cette même année, le groupe Nutrixo obtient une valeur d’émission de gaz à effet de serre (GES) similaire à celle calculée par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) au cours de son étude bilan Carbone soit environ 125 kg d’équivalent carbone par tonne de farine produite.
La boulangerie-pâtisserie Nault (Vienne) évalue quant à elle son bilan carbone de l’année 2009 à 1.477 t d’équivalent carbone, soit le dégagement obtenu en effectuant 535 tours de la Terre en voiture ou encore avec un troupeau de 1.134 vaches en un an.
Enfin, des calculs effectués par la Chambre des métiers et de l’artisanat de Grenoble nous montrent que la fabrication d’une baguette de pain entraîne des émissions GES de l’ordre de 140 g d’équivalent carbone, ce qui correspond à un trajet d’environ 1 km en voiture. Ce chiffrage a été obtenu en calculant une moyenne sur sept boulangeries artisanales (de la culture du blé à la vente en boulangerie).
La mise en place d’un bilan carbone
De nombreuses méthodes de calcul du bilan carbone se sont développées depuis quelques années. La méthode de comptabilisation des émissions des GES mise en place par l’Ademe semble être un des outils les plus adaptés. Il est d’ailleurs d’ores et déjà utilisé par de nombreuses entreprises.
La difficulté de ce bilan réside dans la définition des étapes à prendre en compte dans la fabrication du pain. Faut-il se contenter de la fabrication en elle-même, du façonnage à la cuisson, ou doit-on s’intéresser à l’impact de toute la filière, depuis la récolte du blé jusqu’à l’achat du client en boulangerie ? Il faut de plus tenir compte de la qualité des installations, des différents types d’énergie utilisés, et des écarts liés aux moyens de transport et aux saisons.
Certaines entreprises françaises, à l’instar du groupe Nutrixo sur leur site des Grands moulins de Reims, ont mis en place une analyse de grande ampleur afin d’obtenir des résultats chiffrés. « La première étape consiste à sensibiliser le personnel afin d’impliquer le maximum de personnes dans une démarche de développement durable », explique Hugues Favier, responsable de l’étude. Une fois le périmètre d’étude défini, la collecte des données et leur exploitation demandent plusieurs mois. Une des difficultés majeures réside dans la mise en forme des données afin de pouvoir les utiliser avec les outils du bilan Carbone.
L’entreprise Nault explique avoir pris en compte différents postes dans son calcul, en plus de la transformation du blé en farine. Les sources fixes (engrais, gaz, électricité), les achats de matières premières, les machines de transformation de la farine en pain, mais aussi les emballages, les déchets, la fin de vie des produits fabriqués et les déplacements ont été étudiés.
Selon les calculs et les données de l’Ademe, le postes dégageant le plus de GES dans la fabrication du pain est celui de la production de matières premières, et en particulier la culture du blé. Viennent ensuite dans l’ordre le fret, les types d’énergies utilisées, les emballages, les déplacements du personnel et enfin les déchets.
L’impact du bilan sur les entreprises
Que faire alors des résultats du bilan Carbone ? Plus que le chiffre obtenu, ce sont les mesures prises par les entreprises pour réduire les émissions de GES qui semblent essentielles.
Suite à ces résultats, la boulangerie Nault a notamment entrepris de supprimer des chambres froides pour limiter sa consommation d’électricité et de fluides frigorigènes. La réorganisation des tournées de livraison est aussi un point étudié chez Nault et chez Nutrixo. Comme nous l’explique Hugues Favier, « l’optimisation des tournées avec un remplissage maximum des camions et l’adoption d’une éco-conduite permet de réduire les émissions de GES de manière non négligeable, tout en réalisant des économies ».
Des pistes sont également étudiées dans la culture du blé, afin de limiter l’usage d’engrais responsable d’une quantité importante de gaz à effet de serre.
Actuellement, il est encore difficile d’évaluer l’impact des mesures concernant la réduction des GES lors de la fabrication d’une baguette, du fait de la mise en place récente des études visant à chiffrer le bilan Carbone. Mais devant la prise de conscience écologique, et l’obligation d’étiquetage énergétique des produits avec la Loi Grenelle 2, on peut s’attendre à la mise en place de diverses mesures au sein de tous les acteurs de la filière.