Les chambres d’agriculture ouvrent le dialogue sur la réforme de la Pac
Les 8 et 9 mars derniers, une délégation de l’Apca s’est rendu en Pologne et en République tchèque afin de rencontrer ses homologues
Pour une réforme efficace, il est « important d’aller à l’écoute de nos partenaires pour comprendre leurs positions, leurs cheminements, et qu’il y ait des rapprochements entre nous », a estimé Guy Vasseur, président de l’Assemblée permanente des chambres d’agriculture (APCA), lors de sa conférence de presse du mardi 15 mars. Et il y a effectivement eu rapprochement sur plusieurs sujets. Le premier d’entre eux est la régulation des marchés. En cette période de panique sur les marchés agricoles, le filet de sécurité souhaité par les chambres d’agriculture respectives semble plus que jamais d’actualité. Disposer des instruments nécessaires à la lutte contre la volatilité et à la prévention des chutes de prix est un enjeu essentiel. Les « outils assurantiels contre les risques sanitaires et climatiques » évoqués dans le communiqué franco-tchèque prennent eux aussi tout leur sens au regard des événements dramatiques qui ont eu lieu au Japon. Autre point essentiel abordé par les chambres d’agriculture, la préférence communautaire. Si les délégations veulent renforcer ce principe de l’Union, et s’assurer qu’il soit bien respecté, elles ambitionnent aussi de le compléter. L’Apca, comme ses consœurs tchèque et polonaise, aimerait que les conditions de production imposées aux membres de l’UE soient étendues aux produits importés des pays tiers.
Renforcer le premier pilier
Les trois gouvernements concernés par ces rencontres sont tombés d’accord sur un autre sujet : refuser toute diminution du budget de la Pac. « Un budget ambitieux est nécessaire et par conséquent, le budget de l’UE devrait également être important », détaille le communiqué franco-tchèque ayant suivi la rencontre. Les chambres d’agriculture ont d’ailleurs une vision bien précise de ce que devra être ce budget. Selon elles, pour que l’aide à l’hectare se rapproche d’une moyenne européenne identique sur l’ensemble des territoires, il faut renforcer les aides directes du 1er pilier de la Pac. Mais sous la condition sine qua non que les différences de coûts de production entre les agricultures et la notion de pouvoir d’achat soient prises en compte.
La rencontre a aussi abordé la question des coopératives. « l’UE devrait permettre et encourager les agriculteurs à mettre en place des organisations de producteurs et coopératives afin de renforcer leur position dans la chaîne alimentaire », indique le communiqué franco-polonais. « Les agriculteurs sont considérés comme des avionneurs, on les compare à Airbus, c’est intolérable et ça ne correspond pas à la réalité », assène le président de l’Apca.
Verdissement ou simplification ?
Autre point de concordance, l’idée d’une simplification de la Pac en matière de conditionnalité. Or, la création de nouvelles mesures de verdissement irait à l’encontre d’un tel processus. Instaurer de nouvelles conditions d’obtention d’aides, écologiques ou non, ne ferait que complexifier un système déjà bien embrouillé. Les chambres d’agriculture françaises, tchèques et polonaises souhaitent donc intégrer dans le premier pilier les actions de verdissement déjà opérées par leurs agriculteurs, mais non pris en compte dans les aides directes de la Pac (directive nitrate, système anti-érosion).
Des points de divergences subsistent
De leurs côtés, la Pologne et la République tchèque souhaitent également mettre fin aux références historiques. Une réforme qui « ne va pas aller sans poser de problème à un niveau franco-français », craint Guy Vasseur. Pour l’APCA, cette demande sera impossible à satisfaire pour 2014, comme le demandent les deux interlocuteurs des chambres d’agriculture françaises. Mais elle concède que la « répartition équitable des aides et des enveloppes nationales entre Etats membres » doit effectivement s’appuyer sur des critères objectifs.
Les désaccords entre les différentes délégations portent sur un autre sujet : le plafonnement. En effet, la République tchèque y est fermement opposée. Mais les chambres d’agriculture françaises ont fait un premier geste envers leurs homologues européens en s’engageant à « ne pas faire blocage sur cette question si tous les autres points sont acceptés » (budget, verdissement, régulation des marchés...). Les ministres européens de l’Agriculture ont d’ailleurs opposé jeudi dernier à Bruxelles une fin de non-recevoir au projet visant à plafonner les aides versées aux grands exploitants.
Au mois de mai prochain, les chambres d’agriculture françaises continueront leur tournée européenne en visitant l’Autriche et la Hongrie. Mais Guy Vasseur le précise bien, ces rendez-vous n’impliquent pas un changement d’opinion des différents gouvernements. Le débat lui est bel et bien lancé.