Sécheresse
Le plan d’aide de Nicolas Sarkozy laisse les éleveurs sur leur faim
Malgré le déblocage de moyens financiers importants et de quelques mesures d’urgence, le compte n’y est pas pour les éleveurs.
L’annonce par le Président de la République, Nicolas Sarkozy, d’un plan sécheresse pour les éleveurs, ce 9 juin, ne les a pas complètement rassurés. C’est en tout cas le sentiment partagé par les agriculteurs participant à la clôture du 45e congrès des Jeunes agriculteurs (JA), qui s’est déroulé dans l’Aveyron, terre d’élevage, quasiment en simultané au déplacement du président de la République en Charente. Ce plan engage logiquement « la solidarité de l’Etat et celle des acteurs privés comme les banques ou les assurances », a expliqué Bruno Le Maire, ministre de l’Agriculture venu clore le congrès. Il a appelé les agriculteurs à le soutenir car les arbitrages sont difficiles et « les contraintes budgétaires sont fortes », a-t-il rappelé dans un discours qu’il a voulu de « vérité ».
« Je ne crois pas au Canadair qui déverse une tonne d’eau et tout en est fini de la sécheresse », a lancé, le 9 juin, Bruno Le Maire, le ministre de l’Agriculture venu assurer le service après-vente du plan sécheresse annoncé par Nicolas Sarkozy, quelques heures avant.
Le ministre qui s’exprimait en clôture du 45e congrès des Jeunes agriculteurs à Rodez a, sans surprise, plaidé pour une gestion de cette crise avec « sang-froid et méthode ». Fraîchement accueilli par les 600 congressistes, et malgré un « échange rugueux » avec les syndicalistes, selon ses termes, il est parvenu à faire applaudir certains points du plan Sarkozy.
Pas d’argent frais
Soulager la trésorerie des éleveurs passe par un report d’un an des échéances de prêts contractés au titre du plan de soutien exceptionnel annoncé par le chef de l’Etat en pleine crise agricole de 2009. « Si on continue à reporter les prêts, on va aller tous à la faillite », a lancé au ministre le président des JA de l’Aveyron, Bruno Montourcy. Pour le président des JA, Jean-Michel Schaeffer, « il ne faut pas des prêts mais donner une bouffée d’air aux éleveurs ». En effet, le Crédit agricole s’est engagé à prêter à court terme 700 millions d’euros pour les agriculteurs en difficulté à des taux préférentiels et en attendant le versement des aides Pac.
Autre annonce de Nicolas Sarkozy : tous les éleveurs des zones reconnues en calamité bénéficieront d’une exonération de la taxe sur le foncier non bâti (TFNB) normalement payée en octobre. Soit un coup de pouce de 300 millions d’euros selon les pouvoirs publics (à noter toutefois que le principe même de la TFNB prévoit un dégrèvement en cas de baisse significative de la valeur de la production). Autre enveloppe débloquée : 200 millions d’euros pour des avances sur le versement des garanties du fonds de calamités agricoles (fonds financé à parité entre agriculteurs et pouvoirs publics). L’objectif est de faire vite pour pouvoir payer les premières avances aux éleveurs dès septembre, a promis le ministre. Une clause de rendez-vous à la rentrée pour ajuster les mesures est entérinée.
Une question de tempo
« Nous avions une demande d’urgence, elle est traitée », a estimé Xavier Beulin, le président de la FNSEA. Pour lui, le rendez-vous de septembre permettra de faire le bilan des pertes et la mise en place « d’un plan plus massif », a-t-il expliqué en marge du congrès. « Il y aura forcément une partie de soutiens directs pour certaines exploitations », a-t-il prédit. Reste à en définir les modalités.
Un timing qui ne convient pas à l’Aveyronnais, Bruno Montourcy, qui demande une prise en charge de la totalité des annuités d’emprunts des éleveurs et des cotisations sociales... tout de suite. « L’équivalent de 30.000 euros par exploitation agricole », calcule-t-il. Quant à l’annonce par Nicolas Sarkozy de la mobilisation de l’armée et de 300 wagons pour transporter la paille, le syndicaliste fait parler son bon sens paysan. « Ce que je demande, c’est d’avoir de la paille à transporter » pour nourrir les bêtes. Le ministre a toutefois consenti à réfléchir à des mesures particulières pour les jeunes agriculteurs.
Gérer la ressource
Beaucoup plus consensuelles sont les mesures visant à prévenir les futures sécheresses. L’enjeu du stockage de l’eau, évoqué par la FNSEA et les JA, a été compris par le chef de l’Etat. Nicolas Sarkozy a annoncé la mise en œuvre d’un plan de création ou de rétablissement d’ouvrages de gestion de l’eau sur cinq ans.
Il s’agit aussi de modifier la législation française sur les retenues d’eau et les retenues collinaires. Evoquant des recours administratifs qui bloquent l’approvisionnement en eau d’agriculteurs, le ministre a promis de faire son possible pour « changer les règles administratives ». « Cela ne sera pas facile (...) j’aurai besoin de votre soutien », a-t-il lancé sous les applaudissements d’une salle tout acquise à cette cause.