La contractualisation avance et se dotera d’un cadre le 29 juin
LES DISCUSSIONS progressent sur la question de la contractualisation entre les filières végétales et animales et devraient déboucher sur des propositions concrètes du monde agricole qui seront présentées au ministère de l’Agriculture dans un rapport le 29 juin. Une sortie jugée toutefois « trop tardive » par la filière élevage qui réclame des mesures d’urgence depuis plusieurs mois. A l’issue, d’une première réunion interfilière au ministère de l’Agriculture à laquelle ont participé les principales parties prenantes au sujet, céréaliers, fabricant d’aliments et coopérateurs semblent sur la même longueur d’onde et décidés à définir un cadre contractuel et des outils afin de sécuriser les marges de la filière élevage française. Au regard des éléments présentés lors de la réunion, il s’agit davantage de créer de nouveaux outils que de solidariser les filières. Autrement dit, la filière végétale ne participera pas à un éventuel effort financier pour soutenir l’élevage. « Nous devons travailler sur du structurel et non sur du conjoncturel », estime Philippe Pinta, président de l’AGPB. Il s’agit plutôt de mieux gérer les coûts à travers les contrats d’approvisionnement, l’utilisation de marchés à terme plus transparents, et de pouvoir tirer les prix d’achat des grandes surfaces vers le haut si nécessaire. D’où, un consensus des intervenants agricoles : sans la bonne volonté de la grande distribution, tout ce travail aura été vain.
Créer de nouveaux contrats
Les discussions autour de la contractualisation tournent autour de trois axes principaux. D’abord, les contrats. Coop de France en propose deux en particulier, dans un document paru le 24 mars. Le premier, dit contrat “achat à prix lissé”, concerne la relation collecteur/fabricants d’aliments composés et pourrait présenter les caractéristiques suivantes : « un engagement pluriannuel ferme (sur trois ans par exemple), un tonnage annuel (couvrant par exemple 30 % des besoins », à un prix déterminé à chaque livraison, égal à la moyenne d’une cotation de référence (marché physique ou à terme) sur une période déterminée, associé à une prime positive ou négative négociée. Est aussi évoqué un contrat entre le fabricant d’aliments et l’éleveur comprenant la « désignation précise de l’aliment faisant l’objet du contrat », « un engagement de durée couvrant au moins un cycle de production », « un tonnage objectif par période avec échéancier », « un prix ferme ou fixé selon une règle d’indexation négociée » et « des conditions et pénalités en cas de litiges avec un renvoi à une structure d’arbitrage ». L’idée étant de sécuriser le revenu de l’éleveur par une anticipation de ses prix de vente et de ses coûts de production le plus tôt possible. « Les difficultés sont moins grandes pour nos relations avec nos fournisseurs de matières premières, car nous avons déjà la culture du contrat avec les Incograins et le marché à terme. C’est différent avec l’aval. Ce qui est important, c’est d’avoir le maximum de matières premières à notre disponibilité dans un marché le plus fluide possible », a indiqué Adolphe Thomas, président du Snia.
Mieux gérer la volatilité
Apprendre à gérer la volatilité des prix est un élément clé pour les opérateurs. Coop de France propose d’améliorer la transparence sur les marchés à terme, les options et autres produits dérivés en publiant les positions détenues par catégorie d’opérateurs et en contraignant les opérateurs diffusant des OTC à adhérer à une chambre de compensation. L’usage combiné d’options d’achat et de vente, « permettant d’encadrer les transactions dans un tunnel de prix tout en limitant le coût de couverture », est également évoqué. Enfin, limiter le coût des options par un financement particulier est à l’étude.
Autant de propositions avec lesquelles l’industrie de la nutrition animale et les céréaliers sont d’accord. «Pour limiter la volatilité et donc mieux la gérer, le premier levier est une augmentation de la production», a ajouté Philippe Pinta.
Sans la grande distribution, peu d’intérêts
Toutes ces réflexions et les outils qui pourraient en découler ne serviront à rien si, en bout de chaîne, l’éleveur ne peut répercuter une hausse du coût de production, reconnaissent unanimement Coop de France, le Snia et l’AGPB. Mais comment évaluer le poids de la fermeté des matières premières dans le coût de revient d’un éleveur ? Pour la fédération des entreprises du commerce de la distribution (FCD), il n’est pas question d’indexer les prix d’achat des produits de l’élevage sur ceux des matières premières. «Les hausses légitimes sont acceptables et envisageables. En revanche, une indexation revient à sortir du marché et du point de vue du droit communautaire, c’est impossible», tranche Mathieu Pecqueur responsable des filières agro-alimentaires à la FCD.
Pour l’heure, de nombreux points techniques restent à finaliser et aucune divergence majeure concernant la proposition de Coop de France n’a été mise en avant par les Fab ou les céréaliers. « Nous devons maintenant rentrer dans le concret et finaliser les aspects pratiques » a déclaré Philippe Pinta, président de l’AGPB.