Élections aux Chambres agricoles
La Confédération paysanne défend une agriculture plus équitable
À trois mois des élections aux Chambres, la Conf’ apparaît comme un syndicat « responsable » défendant une agriculture plus « équitable »
CHALLENGER. C’est armée d’un pré-projet chiffré et argumenté – qui doit être finalisé et présenté courant octobre –, d’un programme de colloques chargé et d’une solide ambition que la Confédération paysanne s’apprête à aborder la campagne pour la course aux sièges des Chambres agricoles dont les élections se dérouleront du 20 au 30 janvier 2007. À l’approche de cette échéance, elle prépare un projet « qui a vocation à être appliqué », selon Régis Hochard, le porte-parole de la Confédération paysanne. Le syndicat se veut « responsable ». « On va aux chambres avec l’idée qu’on est prêt à les gérer pour organiser le maintien des agriculteurs », explique-t-il.
La Conf’ défend « une plus juste et légitime répartition des aides » …
Fidèle à ses orientations idéologiques historiques, la Confédération paysanne défend un projet mutualiste, fondé sur « une plus juste et légitime répartition des aides entre les paysans », afin de « soutenir leurs revenus qui en ont réellement besoin, et pour favoriser réellement la multifonctionalité de la Pac ». Pour répondre à ces objectifs, le second syndicat agricole français a opté pour un projet dont les dernières lignes restent à préciser. La version finale sera présentée à la presse le 17 octobre. Pour l’heure, le projet – « tout à fait réalisable dans le cadre général de la Pac modifiée en 2003 », précise le syndicat – est fondé sur « trois axes de mesures fondamentales ».
En premier lieu, la Confédération paysanne entend se tourner « vers une mutualisation nationale des aides par hectare » et « la suppression des DPU jachère », « pour arriver à une situation plus égalitaire et, ainsi, gommer de terribles aberrations », justifie Geneviève Savigny, secrétaire générale du syndicat agricole.
Deuxièmement, le syndicat souhaite que soit instauré « un plafonnement des aides par exploitation, modulé selon le nombre d’actifs » pour « tendre vers un modèle d’agriculture paysanne ». Le dispositif proposé par la Conf’ prévoit notamment une franchise de modulation proche de 15.000 € ; un taux de modulation progressif selon la taille de l’exploitation et son nombre d’actifs ; la minoration ou la majoration du niveau de franchise selon le poids des aides dans la formation du revenu et selon le niveau plus ou moins rénumérateur des prix des produits agricoles ; et un plafonnement de fait de 100.000 € par exploitation.
Enfin, le dernier point défendu par la Confédération paysanne est « le transfert d’au moins 20 % des aides du 1 erpilier vers le 2 e pilier afin de renforcer l’agriculture paysanne et durable, la contribution de l’agriculture à la préservation et à la pérenité des ressources naturelles, la compensation des handicaps naturels et structurels, et enfin les politiques de développement local et territorial pour relocaliser les productions, les emplois et les richesses » .
… mais reste réservée sur le dossier des biocarburants
La Confédération paysanne a également formulé certaines réserves concernant le développement de la filière bioéthanol et plus généralement des biocarburants. « Vouloir produire des biocarburants est une bonne chose, mais vouloir développer à tous crins sans savoir où l’on va est une erreur », estime Régis Hochard, ajoutant : « On peut se retouver dans le cas du Brésil où il manque des terres, donc méfiance même si la situation est différente en France. » Et de conclure : « Il faut des organismes de contrôles indépendants et organiser tout ça. » D’autre part, le porte-parole de la Confédération paysanne juge illégitime que la Politique agricole commune traite des questions énergétiques car « la Pac a été créée pour les productions alimentaires ». Et de poser la question : « La Politique agricole commune doit-elle soutenir de manière indifférenciée les productions agricoles quelle que soit leur destination sachant que le besoin alimentaire est une priorité aussi fondamentale que peu extensive pour chaque habitant de la planète alors que la demande énergétique s’avère insatiable avec l’augmentation du niveau de vie et surtout la mondialisation des échanges ? »
« À quelques nuances près, le constat de Ségolène Royal est le nôtre »
S’exprimant devant les militants socialistes à Guingamp, le 1 er octobre, la candidate à la candidature du PS, Ségolène Royal, a déclaré vouloir « remettre de l’ordre juste dans la politique agricole de la France ». Elle souhaite réaliser une réforme de la Pac « pour décourager la destruction de l’environnement ». Elle a dénoncé « l’invraissemblable injustice » qui fait qu’aujourd’hui « l’irrigation et la pollution par les pesticides sont encouragées puisque l’agriculture intensive est davantage subventionnée », rappellant que « 20 % des agriculteurs consomment 80 % des aides à l’agriculture ». « Qui peut accepter que les jachères donnent accès à des primes alors qu’on a besoin de terres pour installer les jeunes ?», a lâché la probable candidate de la gauche à l’élection présidentielle.
Une vision assez proche de celle de la Confédération paysanne, du moins sur le papier. Reçue par une délégation du syndicat ce même jour, elle a affirmé en partager «la révolte». « À quelques nuances près, son constat est le nôtre », a déclaré Régis Hochard, réagissant aux déclarations de Ségolène Royal. Pour l’heure, le syndicat a démarré une série de rencontres avec la majorité des partis politiques qui présenteront un candidat aux présidentielles, à l’exception de Lutte ouvrière et du Front national. Actuellement en discussion avec le PS, Régis Hochard a déclaré « qu’il y aura sans doute moyen que le projet agricole du parti socialiste se rapproche de celui de la Conf’, notamment en ce qui concerne la représentativité des syndicats au sein des organes de décision, la limitation des aides ou encore la modification des pratiques agricoles ».