Pourquoi la campagne commerciale en luzerne déshydratée s’ouvre sur des niveaux historiquement hauts ?
Le climat général économique est favorable à la luzerne
Le climat général économique est favorable à la luzerne
« La campagne commerciale en luzerne déshydratée va démarrer fin avril selon un calendrier que l’on peut considérer comme normal », affirme Pierre Bégoc, directeur général de Désialis, principal opérateur du marché en France et en Europe, avant de préciser : « le prix de la luzerne est historiquement haut dans un environnement 2022 qui a été tendu, et qui le sera aussi en 2023, sur une ressource moins accessible, dû notamment à des conditions météorologiques particulièrement sèches, à la guerre en Ukraine, à la concurrence prix des céréales et à des coûts de production à la hausse liés aux prix de l’énergie ».
Il convient de signaler aussi que les stocks de l’an passé ne sont pas reconstitués. « On verra ce que dit la plaine au moment des première et deuxième coupes mais on aura encore besoin d’eau », complète Pierre Bégoc. Cette problématique eau devient structurelle pour l’ensemble des producteurs dans le monde.
Autre élément marquant de la campagne 2022, et qui pèse sur la nouvelle, le décalage dans le temps entre les différentes évolutions des prix de marché : ceux concernant le secteur de la luzerne ont atteint leur pic à la fin de l’année 2022 quand les prix du blé poursuivaient leur baisse (361 €/t le 10/10 à 306 €/t fin décembre), déjà entamée dès la mi-mai.
« Pour la campagne qui commence, nous réaffirmons notre stratégie d’organisation sur l’ensemble de la durée de celle-ci, ce qui donne une bonne visibilité à nos clients, avec la garantie que la matière est disponible pour l’ensemble des contrats signés », précise Pierre Bégoc.
Coûts de production, assolement en baisse et attractivité de la luzerne
Il convient de noter que si la France est particulièrement touchée par cet environnement complexe et instable, les autres grands producteurs européens de luzerne, comme l’Espagne ou encore l’Italie, le sont encore plus. A titre d’exemple, même si la filière luzerne française a été exposée de façon sensible à la crise des marchés de l’énergie, elle s’en est mieux tirée que les filières de ces deux pays grâce à un travail continu depuis les années 2000 sur la question de la transition énergétique (préfanage à plat au champ, adoption de la biomasse en substitution aux énergies fossiles). Aux Etats-Unis, autre grand producteur dont une partie de la récolte part à l’exportation vers la Chine, la contrainte raréfaction de l’eau a également pesé dans les coûts de production.
Il existe cependant des tensions sur l’assolement 2023 en France (un fait qui concerne aussi les autres pays producteurs en Europe). « Nous avons un vrai sujet d’attractivité de rémunération des planteurs de luzerne pour éviter l’érosion des surfaces emblavées, au plus bas depuis 2012 », conclut Pierre Bégoc.
Lire aussi : Quelle place pour la luzerne dans la PAC ?
Cependant, le climat général économique est favorable à la luzerne avec une nouvelle Politique agricole commune (PAC) plutôt à l’avantage de sa culture (aide couplée renouvelée, accès au niveau supérieur de l’écorégime, nouveau dispositif baptisé Programme opérationnel qui permet aux Etats membres de réserver une enveloppe dédiée aux actions menées par les organisations de producteurs).
Par ailleurs, la filière poursuit ses travaux de recherche agronomique, de certains effets de la luzerne en nutrition animale ou encore de diversification sur les marchés équin et porcin (sur ce dernier, La Coopération Agricole – Luzerne de France part du constat que la luzerne déshydratée est absente de l’alimentation porcine en France).
La luzerne en chiffres
En France :
- 6 500 fermes concernées ;
- 12 coopératives ;
- 24 unités industrielles ;
- Entre 1 000 et 1 500 emplois dans les territoires ;
- 70 000 hectares dédiés à la déshydratation ;
- 755 000 t produites (granulés et balles) ;
- Principaux débouchés : à 36 % la fabrication d’aliments composés et à 34 % la fabrication d’aliments à la ferme ;
- 10 % des produits sont certifiés AB.
En Europe :
- La France est le 2è producteur en Europe avec 23 % de la production, derrière l’Espagne (39 %) et l’Italie (28 %). Viennent ensuite l’Allemagne (7 %) et les Pays-Bas (3 %).