Catherine Dagorn
« Je crois en la modernité du Gnis »
Entretien avec la nouvelle directrice générale du Groupement national interprofessionnel des semences et plants. Elle prend ainsi la 3ème direction du Gnis depuis sa création en 1962, succédant à Philippe Gracien.

Quel est votre sentiment concernant l’arrêt du dernier essai OGM de l’Inra ?
Catherine Dagorn : D’abord, notre interrogation porte sur la disparition progressive de tous les essais OGM en plein champ. La recherche privée a été la première à les arrêter en France et à les délocaliser à l’étranger, puisque les OGM sont une réalité dans de nombreux pays. L’essai sur les peupliers était le dernier de la recherche publique. C’est en cela que c’est inquiétant. La transgénèse est une des techniques utilisées pour l’amélioration des plantes et s’en priver pour de mauvaises raisons est dangereux. Si une technologie présentait des risques avérés et identifiés, oui, il faudrait l’arrêter ou creuser pour minimiser ces risques. Le problème avec les OGM, c’est que depuis le début, la science et la rationnalité ne dominent plus. Des décisions sont prises pour des raisons de peur citoyenne ou politique. Pas pour des raisons rationnelles. Pourtant, il peut y avoir une diversité d’application des PGM : résistance à un herbicide, aux maladies, à la sécheresse ou autre... On ne peut globaliser ou faire des amalgames. D’un côté, certains estiment qu’il faut faire de la recherche publique sur les OGM, et quand celle-ci se lance, les mêmes arguent du manque de recul sur cette technologie pour demander l’arrêt des recherches. C’est paradoxal. Par ailleurs, la recherche en milieu confiné a ses limites. à un moment donné, il faut passer au champ. Peut-on s’en priver alors même qu’il n’y a pas de fondements scientifiques pour s’en écarter ? Pourquoi une telle diabolisation ? Au Gnis, nous essayons de sortir d’un débat binaire pro ou anti-OGM pour faire de la pédagogie, expliquer ce que sont les OGM, resituer la transgénèse dans un panel d’outils utilisables en amélioration des plantes et leur intérêt au travers d’arguments factuels et scientifiques. Le secteur des semences en France représente près de 300 entreprises de production avec un maillage très fort. Si demain les OGM se développent de façon importante en Europe, la filière française aura perdu du temps. Et la concurrence étrangère, qui aura développé cette technologie, inondera le marché.
Ne craignez vous pas un recul des semences de blé certifiées avec une récolte abondante risquant de peser sur les prix ?
C. D. : Quand le prix du blé est très haut, l’agriculteur a tendance à vendre sa récolte plutôt qu’à la resemer. C’est un élément qui peut expliquer des évolutions. Le renouvellement variétal peut aussi jouer ponctuellement. Le taux d’utilisation à venir dépendra des prix, des actions des distributeurs, des récoltes tardives et des problèmes de fusariose et autres.... Les agriculteurs favorisent les semences certifiées pour avoir plus de garanties qualitatives. Les producteurs préfèrent aussi disposer de semences traitées, prêtes à l’emploi, plutôt qu’avoir à le faire eux-même. Ce sont des élements à prendre en compte, mais il est difficile de faire des prévisions.
Que souhaitez-vous apporter dans votre nouvelle fonction ?
C. D. : J’ai une forte croyance dans l’intérêt d’une structure interprofessionnelle comme le Gnis et en sa modernité. De nombreux sujets tels que la contractualisation, la traçabilité, la certification produit, font l’actualité et sont au cœur des thématiques du Gnis depuis des années. C’est pourquoi je crois en sa modernité. C’est cette image que je souhaite transmettre à l’extérieur. Il faut nous faire connaitre davantage. Pour ce qui est des nouvelles idées, je ne peux en dire davantage à l’heure actuelle, car les orientations se décident en lien avec le président et le conseil d’administration. La première réunion se déroulera au mois de septembre. Nous travaillerons ensemble sur la stratégie à mettre en place.
Il n’y aura pas de révolution pour autant, mais plutôt un changement dans la continuité. Comment s’adapter aux enjeux de demain ? Il y a des sujets chauds actuellement, notamment au niveau européen avec le dossier “Better regulation” qui doit définir le cadre réglementaire pour les semences dans les prochaines années. Il est important de savoir quelles sont les meilleures options à prendre pour l’avenir. Le Gnis a toujours su s’adapter. Il faut être à l’écoute des professionnels et des services publics pour donner un certain cap à l’interprofession.