Fusion Bayer/Monsanto : quel impact pour la filière agri-agro
L’UE enquête en profondeur sur les répercussions de la fusion projetée de Bayer et Monsanto. Mais qu’en pensent les acteurs de terrain ?
Les groupes Bayer et Monsanto dominent le marché mondial des semences et de la protection des cultures, en maïs et soja. En rapprochant leurs activités, ils renforceraient leurs positions sur ces marchés. Quelles seraient les conséquences pour les agriculteurs européens ? « Le marché français est protégé, certains produits phytosanitaires ne sont pas autorisés ici », note Quentin Mathieu, économiste à l’APCA. Cependant, il juge possible que les produits renchérissent, et que la dépendance des agriculteurs à ce groupe dominant augmente, d’autant plus que Bayer connaît bien les aspects réglementaires européens.
Quid des obtenteurs nationaux
Thierry Hache, courtier en semences de grandes cultures, pense que la fusion aurait un impact sur le développement des semences hybrides, sur des espèces autres que maïs et colza pour lesquelles Monsanto est déjà leader. Concernant les principales céréales en Europe, blé tendre et orge, la supériorité des hybrides n’est cependant pas acquise. La recherche privée en céréales autogames est dynamique en France avec chaque année de nouvelles variétés performantes adaptées à chaque marché régional, selon Thierry Hache. « La tendance des groupes multinationaux est de ne développer que des variétés disposant d’une large aire de culture et adaptées à l’intensification », souligne-t-il.
Avec les changements climatiques et la diversité des sols, l’agriculteur a besoin de variétés régionales, rustiques et tolérantes aux stress et aux maladies et le risque de concentration est de voir disparaître des obtenteurs nationaux qui assuraient une diversité d’offres génétiques, précise le courtier.
« Si je regarde l’évolution du nombre des semenciers depuis vingt ans dans les principales espèces de grandes cultures dans l’UE, dans dix ans, j’arrive à un seul, résume Thierry Hache. Est-ce souhaitable et raisonnable ? On peut créer une dynamique avec un autre schéma de développement, des entreprises de sélection diverses, pas seulement sur les espèces majeures, permettant des rotations longues adaptées à l’échelle d’une grande région, pour garder la richesse de l’agriculture française et européenne. »