Interview de Philippe Heusele, président de France Export Céréales
« Des attentes européennes proches de celles des Français »
En amont de la journée France Export Céréales qui se déroulera le 20 mars à Paris, son nouveau président, Philippe Heusele, répond à nos questions.
En amont de la journée France Export Céréales qui se déroulera le 20 mars à Paris, son nouveau président, Philippe Heusele, répond à nos questions.
La Dépêche-Le Petit Meunier : En tant que nouveau président de France Export Céréales, vous êtes-vous fixé des objectifs ?
Philippe Heusele : L’objectif est double. D’abord, conserver ce qui fonctionne bien à France Export Céréales, c’est-à-dire le réseau lié à notre présence chez les principaux acheteurs de blé français, notre professionnalisme, les événements organisés chaque année. Tout cela est reconnu. Mais le contexte évoluant, il faut aussi avoir un œil affûté sur nos concurrents. Le 20 mars, la journée France Export Céréales s’intéressera à l’Argentine pendant notre matinée. Et surtout, il faut faire prendre conscience aux opérateurs français, jusqu’à la production, que le monde change. Qu’on ne s’impose plus sur les marchés comme une origine évidente. Il est maintenant admis que la zone mer Noire est devenue le driver du marché, en tout cas l’origine la plus présente. Et ce, sur des destinations que l’on pensait être nôtres, il y a peu encore. Des messages doivent être passés. Il n’y a pas de marché Export, mais une somme de clients dans l’UE ou pays tiers. À nous de les écouter et les servir au mieux. Et c’est peut-être là que l’on pourra faire la différence avec le rouleau compresseur russe.
LD-LPM : La montée en gamme est souvent évoquée pour relancer la filière céréalière en France. Cela a-t-il du sens pour l’export selon vous et si oui vers quel(s) client(s) ?
Ph. H. : Le type d’attente n’est pas le même en fonction du client auquel on s’adresse. Dans les pays tiers, les besoins sont différents de ceux que l’on connaît actuellement en France. En revanche, au niveau européen, nous trouvons des attentes spécifiques proches de celles rencontrées dans l’Hexagone. Certains industriels veulent du durable, d’autres du sans pesticide, comme certains Italiens qui souhaitent des produits exempts de traitement insecticide au stockage.
C’est particulièrement vrai chez les acteurs de l’agroalimentaire qui possèdent des marques et peuvent valoriser une qualité auprès des consommateurs. Donc nous pouvons espérer construire avec leur fournisseur, quelque chose de spécifique. France Export Céréales essaiera de cibler ce qui est possible de faire en fonction des espèces et des pays.
LD-LPM : Le secrétaire d’État Jean-Baptiste Lemoyne avait proposé à la filière céréalière d’envoyer une délégation en Algérie au premier trimestre pour défendre l’origine France. Où en est ce projet et quel regard portez-vous globalement sur l’attitude du gouvernement vis-à-vis de la filière Export ?
P. H. : La proposition du secrétaire d’État était bienvenue et en phase avec nos attentes. Mais toutes les parties ont convenu que le timing [premier trimestre 2019, donc en pleine période électorale en Algérie, NDLR] n’était pas opportun. Plus généralement, concernant le gouvernement, les débats politiques récents sur l’agriculture se sont focalisés sur les EGAlim. L’exportation de céréales a été évoquée mais n’a pas fait l’objet de débat. L’inquiétude sur la prise en compte de l’importance des exportations de céréales demeure. Mais le ministre de l’Agriculture, Didier Guillaume, y fait presque systématiquement référence au même titre que la filière nationale. La question actuelle est la compétitivité qui doit progresser pour faire face à la concurrence exacerbée de certaines zones plus avantagées que les nôtres. Nos atouts reposent sur le professionnalisme des producteurs, un rendement à l’hectare élevé, et une logistique performante. Si cela est battu en brèche, des questions se poseront.