Economie
[Covid-19] Déconfinement : la filière Agri-Agro se prépare
Le plan de déconfinement du 11 mai annoncé, il s'agit désormais de le décliner territoire par territoire et secteur par secteur. Le télétravail va rester de mise pendant encore plusieurs semaines.
Le plan de déconfinement du 11 mai annoncé, il s'agit désormais de le décliner territoire par territoire et secteur par secteur. Le télétravail va rester de mise pendant encore plusieurs semaines.
La préparation du déconfinement d’une coopérative ou d’une entreprise, qui a poursuivi son activité, ne sera évidemment pas la même que pour une installation qui a cessé totalement ou partiellement son activité. La mise en place des plans de continuité de l’activité, dans les unités qui sont restées ouvertes, va faciliter la reprise progressive du travail in situ.
Un faible taux d’absentéisme
La plupart des entreprises de la filière agri-agro, considérée comme un secteur prioritaire par le gouvernement, ne devrait pas rencontrer trop de difficulté à préparer le déconfinement. Le taux d’absentéisme moyen dans les entreprises coopératives de collecte et de transformation, chez les fabricants d’aliment du bétail ou encore dans les malteries est faible, inférieur à 10 %.
Dans la coopération, avec un taux d’absentéisme proche de 10 % des effectifs habituels , toutes filières et régions confondues, à la fin du mois de mars, il est désormais en baisse régulière et semble se stabiliser aux alentours de 8,5, selon le baromètre hebdomadaire mis en place par La Coopération agricole. « Evidemment, il est à noter que ces chiffres sont des moyennes et que nous avons eu, notamment dans la région Grand Est, des taux d’absence pouvant aller jusqu’à 30 % », précise Corinne Lelong, directrice des affaires sociales de La Coopération agricole. Du côté du Syndicat national de l’industrie de la nutrition animale (Snia), même avant la mise en place du confinement, les fabricants d’aliments pour animaux s’étaient mis comme objectif la continuité de livraison des élevages. Des cellules régionales et nationale, en lien avec le gouvernement, ont été mises en place pour identifier les éventuelles difficultés du secteur. « Au 27 avril, l’objectif est rempli puisque aucun arrêt d’usine a été enregistré, grâce à la mobilisation des salariés - avec un taux d’absentéisme inférieur à 10 % - et à la continuité d’activité des fournisseurs », se réjouit Stéphane Radet, directeur du Snia.
Des organisations professionnelles en soutien
Dans le cadre du déconfinement, les coopératives agricoles attendent de pouvoir anticiper la situation, en concertation avec les organisations syndicales et les médecins du travail. « Si la protection des salariés reste l’absolue priorité, la question des tests et des conditions de leur utilisation par les médecins du travail sont, avec les conditions de réouverture progressive des crèches et des écoles, des points importants dont dépend l’organisation du travail pour la période de déconfinement », note Corinne Lelong. Pour accompagner au mieux les entreprises-coopératives dans cette crise, l’organisation professionnelle continuera, comme initié au début de la crise, à réaliser un flash d’information, des permanences téléphoniques et une rubrique questions/réponses sur son site. « Nous avons également mené plusieurs enquêtes auprès des entreprises, dont une, en cours, sur l’impact économique engendré par la crise sanitaire afin d’anticiper les mesures qu’il sera nécessaire de prendre pour surmonter ces difficultés. Pour l’ensemble des coopératives, et en particulier les plus petites qui constituent 95 % de nos adhérents, nous travaillons, avec les organisations syndicales et les acteurs de la filière, à la réalisation et la publication d’un guide de reprise d’activité. Pour une meilleure appropriation de ce guide, nous réfléchissions également à une déclinaison sous forme d’un webinaire», détaille la directrice des affaires sociales de La Coopération agricole.
Dans l’industrie de la nutrition animale, chaque usine a défini son plan de continuité d’activité, notamment en instaurant le télétravail et en limitant les déplacements dans les élevages des technico-commerciaux aux seules visites nécessaires d’un point de vue technique ou réglementaire, selon les recommandations du Snia. Dans le cadre du déconfinement, l’organisation patronale a travaillé à une levée de cette disposition à partir du 11 mai, en déterminant les bonnes conditions de travail des technico-commerciaux qui assureront leur sécurité et celle des éleveurs, avec notamment la mise en place des gestes barrières. « Cette nouvelle recommandation syndicale a été diffusée, vendredi 24 avril, auprès des adhérents du Snia », précise Stéphane Radet. Par ailleurs, le Snia se réunit avec les syndicats des salariés tous les quinze jours, pour faire le point de la situation. La plupart du temps, les questions techniques trouvent réponse dans le dispositif d’information que le gouvernement a mis en place à l’adresse des salariés et des entreprises.
Les procédures envisagées
Concernant les procédures de déconfinement, le Premier ministre a d'ores et déjà demandé « avec insistance » aux entreprises de maintenir le télétravail autant que possible et de veiller à mettre en place des horaires décalés et à équiper les salariés en masques dans le cas contraire. Les entreprises s’adapteront à ces directives en fonction de leur environnement et de leur organisation interne. « Il est très sain qu’elles aient cette réflexion au regard de leur situation individuelle. Dans certaines régions, la pression du Covid-19 est plus forte qu’ailleurs, par exemple », explique le directeur du Snia.
Côté coopération, « d’ores et déjà, lorsque la poursuite du télétravail sera compatible avec un plan de reprise d’activité, il sera privilégié. Au-delà, des réflexions sont en cours pour limiter les contacts entre les salariés, notamment par la mise en place d’équipes par roulement ou de sens de circulation d’entrée et de sortie », explique Corinne Lelong. Beaucoup de directeurs des ressources humaines de coopératives ont un point d’attention particulier concernant le management. « Ils vont en effet, parfois, devoir gérer les ruptures au sein des collectifs de travail, générées par les différentes situations de travail (les salariés présents sur les sites, les salariés « à risques élevés » qui en ont été dispensés, les salariés qui sont restés chez eux pour garder les enfants, les télétravailleurs…). Il sera nécessaire de résoudre ces fractures pour retrouver une performance économique et une cohésion sociale des équipes. »
Lors du déconfinement, les malteries devraient, quant à elles, maintenir ce qui est en place et l’élargir aux salariés qui ne seront plus en télétravail. « Etant donné les effectifs de la malterie française par site de fabrication (près de 500 salariés sur quatorze sites), la distanciation sociale n’a pas été trop difficile à maintenir, avec à la clef un faible taux d’absentéisme », déclare Thomas Gauthier, secrétaire général des Malteurs de France et de l’USIPA. Et d’ajouter : « Nous sommes très fiers de la mobilisation des salariés sur le terrain, qui ont fait preuve d’un esprit positif dans une période très anxiogène ». Entre autres mesures barrières, on peut citer le réaménagement des postes de travail, la fermeture des salles de pause, la vérification de la température des salariés à l’entrée de l’usine ou encore le marquage au sol, sans oublier la mise à disposition de masques et de gel hydro-alcoolique, fabriqué en partie par des malteurs.
Quid des masques et du gel hydro-alcoolique ?
Les initiatives d’achats groupés d’équipement de protection et autre produit désinfectant s’organisent surtout à l’échelon régional ce qui facilite la gestion des commandes d’un point de vue logistique et organisationnel, et permet de réduire les coûts importants liés à l’import (fret maritime ou aérien, procédures douanières). Plusieurs acteurs (Chambres de commerce et d'industrie, Chambres régionales d’agriculture, Régions…) ont notamment pris en charge l’organisation de commandes groupées.
Du côté de La Coopération agricole, les fédérations régionales informent les coopératives qui souhaitent connaître les initiatives d’achats massifiés dans leur région, voire passent directement des commandes groupées pour les entreprises-coopératives de leur région. « En parallèle, pour les commandes individuelles de masques et gels hydroalcooliques, nous diffusons régulièrement les sources d’approvisionnement validées par la DGE du ministère de l’Economie », indique Corinne Lelong. Certaines coopératives, comme Tereos, Cristal Union, la Maison Ackerman, ou ARD (une filiale de Vivescia), ont réorienté partiellement leur activité pour pouvoir produire du gel hydroalcoolique ou de l’alcool éthylique entrant dans la composition des gels. « Cette réorientation permet d’approvisionner les personnels de santé ou de couvrir les besoins internes des coopératives pour la production alimentaire. »
Le Snia a également anticipé la demande. S’agissant des masques, « nous avons eu l’opportunité de nous regrouper avec d’autres interprofessions de la filière des productions animales, pour effectuer des commandes communes pour le compte de nos différents adhérents », déclare Stéphane Radet. Cette initiative complète les démarches des entreprises pour obtenir des masques. S’agissant du gel hydro-alcoolique, les fabricants d’aliments pour animaux ne rencontrent pas de tension, des adhérents du Snia en produisant dans leurs usines.