Céréales
Collecte en recul et fermeté des cours en maïs biologique
La baisse des rendements plaide pour une tension des prix, mais conduit les fabricants d’aliments à réduire leurs incoporations de la céréale.
La baisse de 13 % de la collecte de maïs biologique et C2 (1), selon les estimations de FranceAgriMer, incite à la fermeté du cours de cette céréale stratégique. Mais les hausses sont-elles justifiées ?
Des rendements en retrait
Les conditions climatiques de 2012 n’ont pas été favorables au maïs biologique. Problèmes de maturité, taux d’humidité élevé, récolte qui a traîné en longueur. Les rendements s’en sont trouvés affectés, avec des chutes, estimées jusqu’à 25 %, dans certaines régions comme le Poitou-Charentes ou le Midi-Pyrénées. Notons qu’en maïs bio, la fourchette des rendements est large, comprise entre 20 q/ha et 100 q/ha, selon qu’il est cultivé en sec ou arrosé. Elle dépend aussi de la maîtrise technique du producteur, notamment pour la gestion de l’enherbement. Fin 2011, selon l’Observatoire de l’Agence Bio, le maïs grain représente 7,8 % de la surface consacrée aux grandes cultures bio, qui couvrent au total 197.077 ha (+13 % par rapport à l’année précédente). Les principales régions productrices, les Pays-de-la-Loire, la Bretagne et l’Aquitaine, concentrent la moitié des surfaces. La Vendée arrive en tête, suivie des Landes et de la Vienne.
Pédale douce sur les conversions
Malgré des surfaces en maïs grain qui ont progressé de 10 % environ (dues notamment à la vague de conversions de 2011) pour atteindre 15.500 ha, la collecte a reculé, surtout en C2, car les conversions ont mis la pédale douce. Cette collecte est estimée au total, selon le groupe d’expert de FranceAgriMer (chiffres ajustés à fin novembre 2012), à 48.000 tonnes, en repli de 13 % par rapport à l’an dernier. Si le maïs bio n’a pas baissé (+1 %), les volumes en C2 ont nettement fondu (-51 %). D’où une tension sur les cours, qui suivent aussi la pression des prix du conventionnel. « Ce mauvais bilan n’est pas seulement français, explique un courtier. En Europe de l’Est ou en Italie, les récoltes sont également catastrophiques, et les prix à l’importation très soutenus. » Il est vrai que les achats extérieurs en maïs grain bio ont longtemps pesé dans la balance. Estimés à 10.000 t environ en 2011/2012, ils seraient en net repli, de 37 % environ. La production française comble peu à peu le déficit, d’autant plus que la demande intérieure progresse moins vite. « L’offre en maïs bio français aura du mal à couvrir les besoins, affirme pourtant Nicolas Lecas, directeur d’AgroBio Union, collecteur dans le Sud-Ouest. D’où une fermeté des cours, qui s’explique aussi par des récoltes mauvaises sur des surfaces non irriguées majoritaires. Les producteurs doivent vivre de leur métier, pour que les filières bio se développent. »
Baisse des incorporations de maïs bio
Sur les 135.000 tonnes de céréales et oléoprotéagineux bio françaises incorporées dans l’alimentation animale (chiffres Agence Bio fin 2011), le maïs tient une place non négligeable. Cette année, ce sont 47.000 t (toutes origines) que les fabricants d’aliments ont utilisées dans leurs formules. Or ces quantités seraient en diminution de 10 % par rapport à l’an dernier. « Les positions de fermeté des vendeurs nous incitent à être prudents, pour essayer de contenir le prix de l’aliment », explique Hervé Mücke, directeur de l’Union des coopératives Bio Sud-Est aliment et du Fab Barnier, qui produit 20.000 t d’aliments bio, surtout pour pondeuses, et utilise 8.000 t de maïs. Comme les autres fabricants, il a réduit les incorporations de maïs au profit du blé, de l’orge et surtout du triticale, « sans réduire les performances bien-sûr, mais c’est notre métier ». La récolte record du triticale bio (44.000 t de collecte, +52 %) a fait bondir la part de cette céréale dans l’aliment (28.000 t, +65 %). Pour Jean-Charles Cizeron, fabricant d’aliment dans la Loire qui consomme 4.000 t de maïs bio par an pour 22.000 t d’aliments bio, « le maïs bio peine à trouver son prix, il a été réajusté en 2010, car sous-coté, mais ce qu’en proposent les vendeurs, est-ce réellement en phase avec le marché ? » Difficile de se passer de cette céréale pour un équilibre nutritionnel de qualité. « Nous n’avons répercuté que la moitié de la hausse sur l’aliment, pour ne pas fragiliser une filière animale bio, qui doit passer un cap délicat de structuration », souligne le fabricant. Après un fort développement, les poules pondeuses, et même l’élevage de porcs, réduisent leur voilure. « Nous passons un cap, analyse Jean-Charles Cizeron. La filière se professionnalise sur le plan commercial, pour devenir plus efficace et innovante, et repartir sur sa lancée. »
(1) C2 signifie issu de la 2e année de conversion, possible à incorporer à hauteur de 30 % dans la formule de l’aliment (du RCE n° 889/2008).