Pascale Briand, de l´Afssa
« Une évaluation des phytos fiable, impartiale et rapide »
Pascale Briand, de l´Afssa
L´évaluation des produits phytosanitaires est désormais confiée à l´Agence française de sécurité sanitaire des aliments. Rencontre avec Pascale Briand, directeur général.
Avec l´évaluation des produits phytosanitaires, l´Afssa élargit ses compétences ?
Pascale Briand - La loi de 1998, créant l´Agence française de la sécurité sanitaire des aliments, prévoyait déjà de lui confier l´évaluation des risques sanitaires concernant les produits phytopharmaceutiques(1). La loi d´orientation agricole du 5 janvier 2006 a confirmé cette mission. Enfin, le décret du 21 septembre précise les conditions d´intervention de l´Agence. Ainsi, se voit renforcée la cohérence globale de l´Afssa qui a déjà en charge, par ailleurs, l´évaluation des médicaments vétérinaires.
En quoi l´homologation des produits phytosanitaires est-elle modifiée ?
P. B. - L´Afssa a pour mission d´évaluer les risques et les bénéfices apportés par les produits phytosanitaires ou les matières fertilisantes en vue de l´autorisation de mise sur le marché. Elle doit aussi formuler des recommandations sur les conditions d´emploi des produits. Il s´agit de fournir une évaluation scientifique complète, fiable et impartiale.
Par rapport à la situation antérieure, la différence porte sur les procédures avec une distinction réelle entre l´évaluation, confiée donc à l´Afssa, et la décision d´homologation qui reste de la responsabilité du ministre de l´Agriculture et sera prise au vu de notre avis. Auparavant, évaluation et décision étaient concentrées au ministère de l´Agriculture.
Un autre aspect nouveau est le changement d´échelle dans les moyens. Il y a désormais adéquation avec les objectifs, notamment en terme de délai d´instruction d´un dossier. Ceci est permis grâce à une revalorisation de la taxe d´homologation versée par les entreprises. Une direction du végétal et de l´environnement vient d´être créée au sein de l´Afssa. Elle compte 90 personnes récemment recrutées.
Pratiquement, quel va être l´itinéraire d´un dossier ?
P. B. - Il y a maintenant un guichet unique de dépôt des dossiers à l´Afssa. Pour les professionnels, c´est une simplification importante. Quand un dossier est complet, un coordinateur élabore le programme de travail pour des unités d´évaluation qui sont au nombre de six(2). La synthèse est ensuite soumise à un comité d´experts scientifiques (CES) d´horizons variés qui élabore un projet d´avis en lien avec l´unité de coordination.
Pourquoi des experts extérieurs ?
P. B. - Les personnes chargées d´instruire les dossiers en interne ont des compétences scientifiques et techniques qui leur permettent de les examiner et de procéder à un premier niveau d´expertise collective. Elles apportent un appui aux scientifiques des CES qui sont des chercheurs pour la plupart. Or chaque dossier peut soulever de nouvelles questions, d´où la nécessité d´avoir l´avis d´experts scientifiques extérieurs. C´est "e;la science en marche"e; au bénéfice de l´évaluation des risques !
Ces comités sont au nombre de trois et spécialisés : produits phytosanitaires chimiques, produits phytosanitaires micro-organismes et matières fertilisantes. Pour donner de la robustesse à nos avis et répondre dans les délais, il faut réunir les forces des unités internes et du collectif d´experts. Après consultation du comité d´expert concerné, un avis est rendu par l´Afssa et remis au ministre. L´Agence a aussi pour mission le suivi des produits après homologation.
Avez-vous déjà reçu des dossiers de demandes d´homologation ?
P. B. - Nous avons réceptionné trois cents dossiers, dont certains, complets sont en cours d´examen. Les premiers avis de l´Afssa vont être remis au ministre d´ici la fin de l´année. Celui-ci a ensuite deux mois pour prendre sa décision d´homologation.
Avant même la signature du décret d´application, nous avions anticipé le montage de la structure adéquate : les responsables d´unités d´évaluation et la majorité des équipes étaient recrutés. Le lendemain de la signature, nous étions prêts à recevoir des dossiers.
Quid des dossiers en attente et notamment de ceux des traitements de semences ?
P. B. - Une convention est en cours de finalisation entre la DGAL (ministère), les professionnels et l´Afssa, pour recruter du personnel supplémentaire afin de résorber, au maximum en trois ans, les dossiers en stock (5000 environ). Tous seront traités avec la même rigueur dans l´analyse risques/bénéfice et avec la même impartialité, en se basant sur des expertises scientifiques.
(1) L´Afssa a aussi en charge l´évaluation des matières fertilisantes et des supports de culture et adjuvants.
(2) Physico-chimie/méthodes d´analyses ; toxicologie/santé au travail ; résidus/sécurité du consommateur ; environnement/écotoxicologie, efficacité et unité de coordination.