Les solutions pour limiter les tassements des sols avec les engins agricoles
Les machines agricoles intervenant dans les parcelles sont de plus en plus lourdes. Des solutions existent pour limiter le tassement en superficie et en profondeur.
Les machines agricoles intervenant dans les parcelles sont de plus en plus lourdes. Des solutions existent pour limiter le tassement en superficie et en profondeur.
De plus en plus lourds, les engins agricoles ont des impacts sur les tassements de sols. Si certaines technologies permettent de limiter la compaction en superficie, leur effet sur le tassement profond a très peu d’impact. On peut résumer ainsi : le tassement en superficie dépend du poids par unité de surface de la bande de roulement en contact avec le sol, tandis que la compaction en profondeur est principalement conditionnée par le poids par essieu. Le tassement en superficie peut se rattraper facilement avec un bon travail du sol. Celui en profondeur (au-delà de 25-30 cm) ne peut pas être récupéré par le travail du sol. Il faut alors compter sur la faune du sol et sur le travail des racines de certaines espèces végétales, avec au moins une bonne année de repos pour agir sur ce travail profond.
Quoi qu’il en soit, il est préférable de limiter ces tassements. Cela passe par le choix des équipements et par la manière dont on les utilise. Ce choix est également à prendre en compte avec la saisonnalité. Après un fort épisode de chaleur, des sols bien secs se montrent généralement très résistants au tassement. Mais si la fin du printemps est humide, même la moisson peut s’avérer néfaste pour les sols. Certaines moissonneuses-batteuses, dotées d’une coupe dépassant les 13 mètres et d’une trémie pouvant atteindre 17 000 litres, excèdent les 40 tonnes en charge, en majeure partie concentrées sur l’essieu avant. Cela peut générer un tassement profond. Point positif tout de même de ce genre d’engin de récolte, les passages de roue sont plus espacés et les surfaces « sacrifiées » moins importantes.
Les plus grosses machines ne sont pas forcément celles qui tassent le plus
En revanche, les récoltes automnales (maïs, pommes de terre, betteraves…) interviennent souvent dans des conditions plus humides. L’humidité favorise le glissement des particules de terre entre elles et donc le tassement dès que l’on exerce une pression. Bien que largement chaussées, les intégrales, notamment lorsqu’elles sont chargées, exercent des pressions importantes. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce ne sont pas les plus grosses machines qui tassent le plus en profondeur. Même si elles atteignent, voire dépassent les 60 tonnes en charge, la répartition de la charge sur trois essieux limitent le poids par essieu et le tassement profond, comparativement à une intégrale d’une trentaine de mètres cubes (autour de 50 tonnes en charge). Seule la LightTraxx d’Agrifac propose un poids par essieu équivalent aux plus grosses intégrales. Mais son autonomie est limitée à 20 mètres cubes, ce qui peut nécessiter un flux de bennes pour les grandes parcelles.
De nombreuses intégrales offrent la possibilité de rouler en crabe, afin d’éviter de passer au même endroit avec les différents essieux, la répétition des passages aggravant le tassement. « C’est une solution intéressante en début de campagne, lorsque les sols sont humides en superficie, mais encore secs en profondeur, explique Guillaume Brisset, de l’Institut technique de la betterave. En revanche, s’il y a suffisamment de pluie pour traverser les horizons de sol, en roulant en crabe, on va tasser en profondeur sur la grande majorité de la surface. Il est alors préférable de rouler roue dans roue pour ne 'sacrifier' qu’une partie de la surface. » La récupération de ces sols profonds par la vie du sol sera d’autant plus facile s’il y a des zones préservées à côté de ces passages de roue compactés.
Deux ou trois essieux sur la benne
Malgré l’autonomie des engins de récolte, il n’est pas rare de voir circuler des transbordeurs ou des bennes dans la parcelle, afin de limiter l’immobilisation de l’automotrice à la vidange en bout de champ et de maximiser son utilisation à la récolte pure. Dans la mesure du possible, il faut privilégier un tracteur à la puissance et au gabarit adaptés, de façon à offrir un bon compromis poids/performance. À cubage équivalent et monte identique de pneumatiques, même si cela rajoute du poids, le troisième essieu sur le véhicule remorqué permet de réduire la compaction en profondeur, à condition bien sûr de ne pas surcharger la benne. En réduisant la charge par essieu, cela permet d’abaisser la pression des pneumatiques, d’augmenter l’empreinte au sol et de diminuer le tassement, aussi bien en superficie qu’en profondeur.
Stratégies de semis et de circulation
Le choix du matériel n’est pas le seul critère qui intervient dans la limitation du tassement : il y a également la manière dont on l’utilise. « Avant de se placer sous la vis de vidange ou sous l’élévateur de l’automoteur de récolte, il est pertinent de rouler dans le champ dans les traces de roue du pulvérisateur, afin de limiter les zones tassées, confie Vincent Tomis, chef de projet à Agro-Transfert, qui a piloté Sol D’Phy, un projet visant à identifier tous les facteurs contribuant aux tassements des sols.
Pour les cultures se récoltant à l’automne, certains agriculteurs ont fait le choix de semer non pas dans le sens de la longueur de la parcelle, mais dans le sens de la largeur. « De cette façon, en vidant à chaque aller-retour, le remplissage de l’intégrale et son impact sur le sol sont limités », justifie Vincent Tomis. Multiplier les entrées de parcelle participe aussi à réduire le trafic dans le champ.
Les chenilles n’appliquent pas une pression homogène
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la pression exercée par une chenille n’est pas homogène sous toute la surface de contact de la bande de roulement. Une étude réalisée par l’Irstea publiée en février 2013 montrait des pics de pression de 7 à 9 bars à la verticale des trois galets. Cette pression pouvait redescendre à moins d’un bar entre les galets de la chenille de 760 mm de large testée. En comparaison, un pneu IF de 900 mm gonflé à 1,4 bar affichait une pression constante de 4 bars. « Depuis, les technologies ont évolué, aussi bien pour les pneumatiques qu’on peut descendre à 0,4 bar que pour les chenilles qui ont des systèmes de suspension et de galets montés sur boggie avec une certaine latitude verticale, met en perspective Emmanuel Piron, de l’Irstea. Aujourd’hui, les pics de pression observés à la verticale des galets sont certainement réduits, par rapport à la chenille que nous avions testée à l’époque et qui était rigide. »