" L’assurance récolte doit être réformée " estime François Jacques
Trois questions à François Jacques, agriculteur et responsable
de la commission Économie de l’exploitation d’Orama, au sujet de l'assurance récolte.
. Stéphane Le Foll a présenté une nouvelle approche de l’assurance récolte. Combien de céréaliers sont couverts par ce contrat ?
On considère qu’environ un tiers des surfaces Scop sont couvertes en assurance récolte. En augmentation régulière depuis la création du contrat en 2005, ce chiffre s’est stabilisé. Désormais, il y a autant de nouvelles souscriptions que de
résiliations… La nouvelle approche du ministre consiste à mettre en œuvre un contrat socle,
s’apparentant à une assurance « coup dur ». Elle permettrait de relancer un cycle de production en cas de mise en péril de l’exploitation et, par son coût plus faible, toucherait un plus grand nombre de producteurs.
. Qu’est-ce qui freine les agriculteurs à s’assurer ?
C’est le rapport montant de la cotisation sur risque couvert. Depuis l’exclusion des grandes cultures du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA), en janvier 2009, les
producteurs de grandes cultures n’ont d’autres choix que de souscrire l’assurance récolte s’ils souhaitent bénéficier d’un filet de sécurité. Mais avec le jeu des franchises et des seuils de déclenchement, l’intervention de l’assureur est très rare… Encore plus si on a un assolement peu diversifié.
À l’inverse, avec de petites soles, le seuil de déclenchement est plus facilement atteint. Finalement, nous nous trouvons déjà presque sur un modèle d’assurance « coup dur » mais avec
des niveaux de cotisations difficilement acceptables.
. Que faire pour rendre la couverture plus séduisante ?
Entre la fluctuation des rendements et la volatilité des prix, les niveaux de chiffre d’affaires peuvent varier du simple au triple.
Il faudrait à la fois couvrir les risques climatiques et le risque prix. Pour cela, nous imaginons que les premiers pourraient être garantis par l’assurance « coup dur » et le second par de l’auto-assurance. D’autant plus que l’outil auto-assurance existe déjà : il s’agit de la déduction pour aléas (DPA).
Pour l’instant limitée à 27 000 euros, il suffirait de la déplafonner pour qu’en bonnes années,
les exploitants puissent se constituer une réserve qu’ils pourraient réintégrer les mauvaises années. Les règles de réintégration doivent aussi être simplifiées pour inciter la déduction, donc
la couverture. Concernant l’assurance « coup dur », nous pensons qu’elle devrait être propre à chaque secteur de production. Il nous paraît également injustifié de cotiser à la cagnotte « fonds de calamités » sans pouvoir y prétendre. Enfin, pour parfaire le contrat d’assurance récolte, les références historiques seraient plus pertinentes si elles étaient revalorisées les années sinistrées (grêle, dégâts de gibier…), sinon la base de référence est faussée et l’agriculteur pénalisé.
Propos recueillis par Emmanuel Dessein