La retraite anticipée en agriculture possible sous conditions
Lorsque la fatigue se fait sentir ou bien parce que cela peut faciliter l’installation d’un jeune, il peut être intéressant de prendre une retraite anticipée. C’est possible pour les carrières longues. Comment celles-ci sont-elles définies ? À quoi peut-on avoir droit ? Le point.
Lorsque la fatigue se fait sentir ou bien parce que cela peut faciliter l’installation d’un jeune, il peut être intéressant de prendre une retraite anticipée. C’est possible pour les carrières longues. Comment celles-ci sont-elles définies ? À quoi peut-on avoir droit ? Le point.
Oui, il est possible de partir en retraite à taux plein avant 60 ans. C’est le dispositif de la retraite anticipée. « L’âge légal de la retraite est de 62 ans, que la carrière soit complète ou non, rappelle Hélène Devoye, conseillère d’entreprise au Cerfrance Val-de-Loire. Mais il est possible de partir à 60 ans à condition d’avoir tous ses trimestres et d’avoir commencé à travailler tôt ». Avoir « tous ses trimestres »signifie d'abord remplir la condition de durée d'assurance cotisée pour l'ensemble de sa carrière. Sont comptabilisées les périodes « rééllement cotisées », qui comprennent toutes celles ayant donné lieu à une cotisation à la charge de l'assuré, et ce, quel que soit le régime. Avoir exercé un autre métier que celui d’agriculteur pendant un temps donné ne pose donc pas de problème. Sont pris en compte dans le calcul de cette durée le rachat des cotisations (par exemple les rachats de périodes d'aide familiale mineur, voir plus loin), les congés de formation type formation professionnelle continue, notamment, les cotisations arriérées (pour l’apprentissage en début de carrière par exemple)… Les périodes « réputées cotisées » sont également intégrées. Il s'agit par exemple du service national, du chômage indemnisé (dans la limite de quatre trimestres chacun), mais également des congés maternité (tous les trimestres), des périodes liées à l'invalidité (deux trimestres au plus) ou à la pénibilité. Dans ce dernier cas, tous les trimestres de majoration de durée d'assurance sont pris en compte. « Pour les non salariés agricoles, seules les périodes de service national sont réputées cotisées, c’est la seule exception », signale Sonia El Heit.
Trimestres à racheter pour les aides familiaux mineurs
Pour avoir droit à une retraite anticipée dans le cadre d’une carrière longue, il faut également justifier d’une durée d'assurance minimale en début de carrière. Pour les salariés, cela signifie avoir cotisé pendant au moins cinq trimestres à la fin de l’année pendant laquelle est survenu son 16e, 17e ou 20e anniversaire. Pour ceux qui ont commencé leur activité comme non salarié agricole ou qui sont nés au cours du dernier trimestre de l'année, cette durée est ramenée à quatre trimestres. Les période d'activité qui n'ont pas donné lieu à une cotisation pour la retraite de base, dites « équivalentes », ne sont pas retenues dans les périodes d'assurance en début d'activité. Cela pose problème pour ceux qui ont commencé leur carrière comme aide familial mineur, « L’affiliation au régime MSA n’était possible qu’à partir de la majorité, fixée à 21 ans avant le 1er janvier 1976 et à 18 ans après, précise Sonia El Heit, spécialiste des retraites à la MSA. Or, la fin de l'obligation scolaire était fixée à 14 ans puis à 16 ans. Pour remplir la condition de début d’activité, l’assuré doit effectuer un rachat de tout ou partie des périodes accomplies sous le statut d’aide familial entre 14 et 20 ans. » Le cas des assurés ayant commencé leur activité comme apprenti pose le même type de problème. « Avant le 1er juillet 1972, l’obligation de cotiser pour l’emploi d’un apprenti n’était pas généralisée, rappelle Sonia El Heit. Ainsi, en l’absence de report au compte ou en cas de report insuffisant permettant de remplir la condition de début d’activité, une régularisation de cotisations arriérées peut être effectuée par l’assuré ». Mais depuis le 1er Juillet 1972, l’apprenti est considéré comme un salarié. Pour apprécier la condition de début d’activité, il faut donc se référer au relevé de situation individuelle.
Inutile de vouloir finaliser trop tôt son dossier
Si la Dicaa (Déclaration d’intention de cessation d’une activité agricole) doit être renvoyée trois ans au moins avant le départ à la retraite souhaité, ce n’est pas le cas du dossier de retraite pour carrière longue. « Il faut s’y prendre au plus tôt six mois avant la date d’effet choisie pour demander une attestation de conditions remplies, signale Sonia El Heit. La caisse ne répondra pas avant. » Ce document permet ensuite de déposer sa demande unique de retraite pour carrière longue. La spécialiste recommande néanmoins de commencer à réunir les pièces de son dossier au moins cinq ans avant. « La régularisation prend du temps », observe-t-elle.
Il faut noter que si la Dicaa est un élément clé sinon obligatoire du dossier, la cessation d’activité agricole n’est pas un point suspensif de la retraite. « Il se peut que l’agriculteur n’arrive pas à vendre sa ferme dans les conditions du marché, relate Sonia El Heit. Dans ce cas, il est possible de demander au préfet de déroger à la cessation d’activité. Mais il faut alors que l’assuré enclenche lui-même la démarche, et prouve ainsi sa bonne foi. Attention toutefois, cette dérogation est accordée pour une année renouvelable une fois ». Si tout est fait dans les temps, aucune carence n’est à prévoir.
Préparer son dossier en avance
• Commencer à réfléchir dès 40 ans : pour Sonia El Heit, il est important de se pencher très tôt sur son dossier afin d’avoir une idée du montant final de sa retraite. « Si l’on voit que ce montant va être trop faible, il est encore possible de se réorienter, par exemple en se lançant dans une diversification que l’on n’aurait pas tenté autrement », observe-t-elle.
• Scanner les documents pour mieux les conserver : les premiers documents officiels liés à la retraite sont envoyés à partir de 35 ans, puis tous les cinq ans. Ils risquent de se détériorer avec le temps, de même que les fiches de salaires ou autres éléments qui permettront de reconstituer une carrière. Le mieux est donc de les scanner et de les stocker sur un serveur.
• Surveiller son relevé de carrière au fil du temps : tout faire au dernier moment présente un risque. « Il faut mettre à jour et vérifier le relevé de carrière que l’on reçoit tous les cinq ans, note Helène Devoye, au Cerfrance Val de Loire. C’est beaucoup plus simple de faire cela au fur et à mesure. »
Le départ progressif envisageable
Si les cas restent rares, il est possible d’associer cessation porgressive d'activité et départ en retraite. « Les exploitants peuvent en bénéficier, observe Sonia El Heit. Le dispositif de la retraite progressive est soumis à des conditions d’âge, de durée de cotisation et à la diminution du nombre d’heures de travail qui doit s'accompagner d'une baisse de revenus. » Pour prétendre à cette possibilité, l’assuré doit avoir atteint l’âge légal de départ à la retraite. Celui-ci peut être diminué de deux années à condition qu’il ne soit pas inférieur à 60 ans. La durée de cotisation est fixée à 150 trimestres minimum, tous régimes confondus.
Lorsque la retraite est anticipée pour raisons de santé
Des problèmes de santé peuvent ouvrir le droit à une retraite plus tôt que prévu. C’est en particulier le cas si l’on a été exposé à des facteurs de risques professionnels, si l'on a été victime de pénibilité au travail et que l'on souffre d’une « incapacité permanente » d'au moins 10 % ou si l’on est reconnu « inapte au travail ».
L’incapacité permanente résulte d’une maladie professionnelle reconnue comme telle ou d’un accident du travail ayant entraîné des lésions séquellaires identiques à celles indemnisées au titre d'une maladie professionnelle. Attention, les accidents de trajet n'entrent pas dans ce cadreµ. Elle permet de partir dès 60 ans à taux plein, quelle que soit la durée d’assurance. Si l’incapacité permanente est comprise entre 10 et 20 %, il faut avoir été exposé pendant au moins 17 ans à un ou plusieurs facteurs de risques, ceux-ci devant être reliés à l’incapacité.
L’inaptitude au travail ouvre également le droit à un départ anticipé quelle que soit la durée de cotisation, mais au taux plein de 50 % et pas avant 62 ans.