Aller au contenu principal

Désherbage chimique : entre hausse des coûts et restrictions, quelles solutions demeurent en grandes cultures ?

Gérer les adventices avec les herbicides devient de plus en plus problématique, notamment en céréales. Des solutions subsistent et l’innovation continue, mais au prix d’une forte hausse des coûts des programmes.

Les céréales ont été désherbées à 70 % à l'automne en 2020, solution de plus en plus privilégiée pour lutter contre les graminées.
Les céréales ont été désherbées à 70 % à l'automne en 2020, solution de plus en plus privilégiée pour lutter contre les graminées.
© Réussir SA

Entre 30 et 40 euros à l’hectare : c’était le coût d’un désherbage chimique il y a une quinzaine d’années sur céréales, selon Ludovic Bonin, Arvalis. « Maintenant, le coût moyen de désherbage a plus que doublé, et il n’est pas rare de voir des programmes dépasser les 100 euros de l’hectare, observe-t-il. Face à des situations de graminées résistantes, les agriculteurs sont prêts à mettre le prix pour obtenir de l’efficacité. »

Contre les vulpins et ray-grass résistants, il n’existe plus beaucoup de solutions performantes disponibles et il faut se tourner vers les applications d’automne pour obtenir de bons résultats. « L’application de Mateno (flufenacet + diflufenicanil + aclonifen) en prélevée suivie de l’association Défi (prosulfocarbe) + Beflex (béflubutamide) en post-levée précoce fonctionne encore bien mais le coût atteint 120 euros l'hectare. »

Toutes les céréales ne sont pas infestées de graminées résistantes. Pour les situations moins problématiques, Ludovic Bonin met en avant des mélanges performants coûtant entre 60 et 80 euros l'hectare, comme Sunfire + Codix en prélevée suivi d’une intervention en sortie d’hiver si besoin, ou Fosbury + Daiko (+ huile) en post-levée précoce. Les surfaces désherbées à l’automne, en progression, ont représenté 70 % des céréales en 2020, selon l’expert d’Arvalis. Les agriculteurs attendent de moins en moins la sortie d’hiver pour résoudre leurs problèmes de salissement.

Simplification du désherbage en colza

En colza, trois années de sécheresse à l’implantation ont remis en cause l’efficacité des herbicides en prélevée, faute de sols suffisamment humides. En outre, des restrictions pèsent sur certaines matières actives utilisées en prélevée. « Par la force des choses, les agriculteurs se tournent vers la post-levée en colza, d’autant qu’il existe des solutions efficaces sur ce créneau. Des produits comme Mozzar et Ielo profitent de cette évolution et le coût du désherbage a tendance à baisser sur cette culture », assure Franck Duroueix, de Terres Inovia.

Le métazachlore, utilisé sur 600 000 hectares de colza en 2020 (après avoir atteint 1 million d’ha), fait encore partie des molécules majeures sur cette culture avec la propyzamide et la napropamide. « Avec cette dernière, c’est la seule à être efficace en prélevée pour gérer les graminées », explique Franck Duroueix. Mais la matière active fait l’objet de nouvelles restrictions. « Son utilisation est restreinte dorénavant à 750 grammes/hectare avec une application unique autorisée seulement tous les quatre ans, au lieu des 1 000 grammes/hectare avec une utilisation possible tous les trois ans jusqu’à présent, précise l’expert. En outre, le métazachlore est interdit sur les parcelles avec des bétoires référencées, petits entonnoirs naturels que l’on rencontre sur les sols calcaires. »

Pas de restrictions en vue en herbicide sur blé

Cette dernière interdiction concerne peu de situations en grandes cultures. Mais localement, comme dans le Pays de Caux, les distributeurs vont devoir réorganiser leur offre pour le désherbage du colza, sans le métazachlore. Le désherbage du colza bénéficie malgré tout d’une panoplie herbicide assez bien fournie.

En céréales, les restrictions ont concerné ces dernières années l’usage du prosulfocarbe et les applications sur sols drainés qui concernent 1 million d’hectares chaque année. Selon Ludovic Bonin, « il n’y a pas de nouvelles restrictions en vue ni de retraits envisagés de molécule dans un proche avenir ». La préoccupation se focalise plutôt sur d’autres céréales que le blé tendre, comme le blé dur ou l’orge d’hiver. Ces dernières offrent beaucoup moins de souplesse dans les programmes de désherbage, avec un nombre plus réduit de produits et de plus grandes sensibilités aux phytotoxicités. Ces programmes herbicides se doivent d’être plus légers.

Une nouvelle matière active performante sur gaillet

 

 
Le gaillet peut être combattu au printemps avec un nouveau produit.
Le gaillet peut être combattu au printemps avec un nouveau produit. © C. Gloria
Le produit Phyton (Kumys) constitue la nouveauté de l’année en apportant une nouvelle matière active sur céréale à paille, le bensulfuron-méthyl (à 500 g/kg), associée à une autre sulfonylurée plus connue, le metsulfuron-méthyle (40 g/kg). « Il s’agit d’un antidicotylédone strict avec un spectre large d’action. Il se démarque par son efficacité élevée sur gaillet, même à des stades avancés de développement, présente Maxime Luneau, de la société UPL. Il est homologué pour des applications de post-levée, à partir du stade tallage sur céréales. La dose pivot d’utilisation sera de 75 grammes/hectare mais le produit peut être utilisé jusqu’à 100 grammes/hectare. » Le prix se situera entre 10 et 13 euros l'hectare, au même niveau que les produits concurrents comportant deux sulfonylurées.

 

Une solution de substitution aux VTH en tournesol

En tournesol, la lutte contre des adventices très problématiques comme l’ambroisie à feuille d’armoise repose sur l’utilisation de variétés tolérantes aux herbicides (VTH), décriées par des organisations environnementales anti-OGM. Des populations d’ambroisie montrent en outre une résistance aux matières actives employées sur les VTH. La donne pourrait changer avec l’arrivée pour le printemps prochain de l’haloxyfène-méthyl (Arylex active) de Corteva Agriscience.

Quelques précautions devront être prises. « Le produit, qui sera autorisé en post-levée sur tous les tournesols, marque un peu cette culture dans les 24-48 heures après l’application, mais elle redémarre ensuite, observe Franck Duroueix, Terres Inovia. Son spectre d’action présente des forces et faiblesses qui nécessiteront son association dans un programme avec d’autres herbicides, à base de pendiméthaline par exemple pour compléter l’efficacité sur graminées et renouées. »

Les plus lus

<em class="placeholder">Méthaniseur en injection de la coopérative EMC2 à Landres (54).</em>
Méthanisation agricole : des conditions tarifaires qui pourraient booster les projets

La politique de transition énergétique française ouvre de bonnes perspectives pour la production de biométhane. Mais échaudés…

<em class="placeholder">Georges Laigle, producteur de pommes de terre à Bihucourt (Pas-de-Calais),   
&quot;</em>
Mildiou de la pomme de terre : « Je profite de l’arsenal de produits à disposition pour alterner les solutions sur mes parcelles dans le Pas-de-Calais »

Producteur à Bihucourt (Pas-de-Calais), Georges Laigle utilise une dizaine de produits différents contre le mildiou sur…

<em class="placeholder">Agriculteur déchargeant un sac d&#039;engrais dans son épandeur à engrais.</em>
L’Europe valide la taxation des engrais russes jusqu'à 430 €/t en 2028

Ce 22 mai 2025, le Parlement européen a approuvé l’augmentation progressive, à partir du 1er juillet 2025, des taxes…

<em class="placeholder">Vincent Prévost, agriculteur à Gueux, dans la Marne</em>
Chardon : « Je garde une attention constante tout au long de la rotation pour limiter cette adventice dans mes parcelles dans la Marne »
Producteur de grandes cultures à Gueux dans la Marne, Vincent Prévost reste vigilant tout au long de la rotation pour limiter au…
<em class="placeholder">Antoine Prévost, exploitant agricole à Foucherolles, dans son champ de blé au printemps 2025.</em>
« La négociation de ma reprise de terres s’est faite en bonne intelligence avec le cédant »

Antoine Prévost, exploitant agricole à Foucherolles, a saisi l’opportunité de reprendre 35 hectares de terres en plus de son…

<em class="placeholder">Parcelle de blé tendre dans le nord de la France.</em>
Sécheresse dans la moitié Nord : les cultures d'hiver ont besoin de pluies pour atteindre des rendements « dans la moyenne »

Peu de maladies, des cultures d’hiver globalement belles, les récoltes s’annoncent dans la moyenne. Peut-être le temps…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures