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Pomme : 4 critères déterminent le succès de pollinisation par les abeilles

La morphologie des fleurs de pommier détermine leurs capacités à être pollinisées à chaque visite d’une abeille domestique. La connaissance de cette morphologie par variété est une piste pour moduler la charge en colonie d’abeilles.

Pour le pommier, la pollinisation est une étape indispensable à l’obtention d’un fruit de qualité. Certaines années, comme en 2012, des déficits de production sont imputables à des manques de pollinisation. Pour obtenir une fructification, la fleur doit disposer de pollen compatible (voir encadré) et doit être visitée par un vecteur de transport de ce pollen : des insectes. Les principaux agents pour le transport du pollen sont les abeilles domestiques (Apis mellifera) qui composent 60 à 95 % de la faune pollinisatrice. Les autres pollinisateurs efficaces sont les abeilles solitaires du genre Andrena et Osmia ou le bourdon (Bombus terrestris, B. pratorum…).

Un butinage frontal ou latéral

Mais selon la morphologie de la fleur, une visite par une abeille ne conduit pas systématiquement à une pollinisation. Lorsque la morphologie florale oblige les abeilles à prélever le nectar par le dessus, frontalement, alors le taux de pollinisation par visite augmente. A contrario, si les abeilles se posent sur les pétales sans toucher les stigmates, selon une morphologie florale favorisant le prélèvement latéral du nectar, alors le taux de pollinisation est faible, voire nul à chaque visite. Quatre critères déterminent le mode de butinage frontal ou latéral (voir encadré).

A lire aussi : Pommier : les osmies au service de la pollinisation

Les fleurs les plus susceptibles d’être butinées latéralement et donc moins bien pollinisées, sont celles dont les étamines forment un tube. Un large espace entre les pétales et les étamines facilite aussi le butinage de côté alors que l’inverse les décourage. S’il y a un espace entre les filets des étamines supérieur à 180 μm (largeur de la langue de l’abeille), l’abeille peut accéder par le côté au nectar. Elle n’a pas besoin de plonger au milieu des étamines. La position des stigmates par rapport aux anthères joue également un rôle sur l’intensité de la pollinisation. Lorsque les stigmates dépassent des anthères ou lorsqu’ils sont en dessous des anthères, ils entrent peu en contact avec les poils de l’abeille chargés en pollen et donc le dépôt de pollen est plus difficile.

Des observations par variété

Cette morphologie de la fleur dépend de la variété. Des observations sur le type de butinage par variété ont été effectuées sur le centre CTIFL de Balandran et ont été corrélées à la morphologie des fleurs. Ainsi pour certaines variétés, le butinage frontal est exclusif. Tel est le cas du groupe Cripps Red* (Joya®), Cripps Pink* (Pink Lady®), Rosy Glow* (Pink Lady®). Pour ces variétés, l’espace entre les pétales et les étamines est nul, les étamines sont étalées à très étalées, l’espace entre les filets des étamines est moyen à nul, les stigmates et les anthères sont au même niveau.

Pour Coop 43* (Juliet®), Dalilight*, Golden Delicious, Inolov* (Mandy®) et Lafayette*, les espaces entre les filets sont petits ou nuls et gênent le butinage de côté. Breaburn, Caudle* (Cameo®), Gradiyel* (Goldkiss®), Inobi*, présentent aussi une bonne aptitude à une visite pollinisante. Toutes ces variétés présentent des critères morphologiques favorisant ou ne défavorisant pas le butinage frontal mis à part un espace entre les pétales et les étamines large à moyen ou pour Lafayette, des étamines en tubes. A contrario, les variétés Granny Smith, Inored* (Story®), Scilate* (Envy®), Red Delicious, Coop 33* (Pixie®), Erovan* (Early Red One®) ou encore Gala sont butinées pour plus de 70 % de façon latérale selon les observations terrain du CTIFL.

A lire aussi : « Connaître les conditions optimales de la pollinisation des melons et courgettes »

Pour les fleurs d’Inored* (Story®), Scilate* (Envy®) et Erovan*, c’est le large espace entre les filets de leurs étamines qui favorisent le butinage de côté. C’est aussi le cas pour Ariane*, Chantecler* (Belchard®), Scifresh* (Jazz®) ou encore Jéronime*. Le butinage latéral des fleurs de Granny Smith s’explique principalement par une position des stigmates au-dessus des anthères tout comme les variétés Bel El*, Civni*, Coop 38* (Goldrush®), X Eleven* (Swing®) ou UEB3234-2* (Opal®).

Les variétés Dalinette*, Honeycrisp* (Honeycrunch®), Erovan* et Reine des reinettes sont défavorisées par des styles courts qui ne facilitent pas le contact entre le pollen présent sur l’abdomen des abeilles domestiques et les stigmates. Ces observations auront un impact direct pour le choix du nombre de ruches. Il faut cinq fois plus de visites pour polliniser une fleur d’Erovan* que pour celle de Cripps Red*. Dans ces cas extrêmes de caractéristiques morphologiques défavorisantes, la charge en colonie peut être adaptée. C’est surtout vrai pour les situations où les conditions climatiques sont limitantes.

Lorsque la morphologie florale oblige les abeilles à prélever le nectar par le dessus, frontalement, alors le taux de pollinisation par visite augmente.

* : cov
Source : Infos CTIFL n° 365 d’octobre 2020

Pour en savoir plus : Deux articles sont à venir au printemps dans Infos CTIFL. Ils seront relayés dans nos pages.

Choisir sa variété pollinisatrice

La mise à disposition de pollen pour une variété commerciale passe par le choix d’une autre variété, dite pollinisatrice. Celle-ci doit répondre au moins à deux critères primordiaux : être compatible et synchrone. Le producteur s’attachera également à choisir une variété pollinisatrice qui fleurit régulièrement, qui présente des tolérances ou résistances aux parasites et ravageurs supérieures à la variété à polliniser. La variété pollinisatrice doit être dans un parfait état sanitaire car les virus diminuent le pouvoir germinatif du pollen. Elle doit mûrir en même temps ou après la variété principale.

Les quatre critères déterminant le succès de pollinisation

L'espace pétales/étamines

Un faible espace entre les pétales et les étamines favorisent le butinage frontal. © CTIFL
C’est l’espace compris entre le bouquet d’étamines et les pétales de la fleur. Trois cas sont possibles : aucun espace ne permet pas à l’abeille de passer par le côté, un espace existe, un large espace est présent (la corolle est plane et permet une pose facile de l’abeille).

 

 

 

 

 

 

L'étalement des étamines

Un fort étalement des étamines favorise la visite des abeilles par le haut de la fleur. © CTIFL
Les filets des étamines forment un tube mais peuvent s’étaler, parfois largement. Plus les étamines s’étalent, plus il est difficile à l’abeille de butiner latéralement.

 

 

 

 

 

 

 

 

L'espace inter-étamines

Le butinage frontal est facilité par un faible espace entre les filets des étamines. © CTIFL
C’est l’espace libre à la base entre deux filets côte à côte. Trois cas sont possibles : pas d’espace, petit espace (inférieur à l’épaisseur d’un filet), grand espace (supérieur ou égal à l’épaisseur d’un filet). Le butinage de côté est fortement favorisé lorsque l’espace est supérieur à 180 μm, soit la largeur de la langue de l’abeille.

 

 

 

 

 

 

La position des stigmates par rapport aux anthères

Les fleurs dont les étamines et les anthères sont au même niveau sont mieux polilnisées. © CTIFL
Trois cas sont possibles : les stigmates sont en dessous des anthères, les stigmates et les anthères sont au même niveau, les stigmates sont en dessus des anthères.

 

Un important nombre de visites

 

 
Les osmies butinent les fleurs exclusivement les fleurs par le dessus. La taux de pollinisation par visite est donc très bon. © CTIFL

La fréquence de visites est un élément clé de la fructification. Afin d’évaluer le nombre de visites sur fleurs de pommier, cinq corymbes portant chacun cinq fleurs ont été filmés pendant 6 jours de 7h30 à 20h à l’aide d’une caméra BeeCam (Advansee) dans un verger du centre CTIFL de Balandran (Gard). En cinq jours de floraison, du 27 au 31 mars 2017, chaque fleur a reçu au total 84 visites dont six d’insectes sauvages. Dix ruches étaient présentes dans les 100 m à 1,5 km autour de la parcelle.

Ce nombre de visite est très important et témoigne à la fois des possibilités offertes par le climat et le milieu en termes de butinage et également d’une marge de manœuvre conséquente en termes de charge en colonies d’abeilles sur le site d’étude. Sept genres de pollinisateurs sauvages ont pu être identifiés parmi lesquels syrphes et bourdons comptent pour les deux tiers des visites. Le tiers restant est composé d’abeilles sauvages, d’osmies, d’abeilles charpentière (Xylocopa) et de cétoines. Les pollinisateurs sauvages effectuent des visites exclusivement par le dessus. Leur visite est donc systématiquement pollinisante d’autant plus que le pollen n’est pas aggloméré en pelote.

 

Composition d’une fleur de pommier

 

 
La fleur du pommier est de type rosacée. Elle possède généralement cinq sépales qui constituent le calice, cinq pétales qui constituent la corolle, vingt étamines à filets libres qui supportent les anthères, cinq styles soudés seulement à la base et surmontés des stigmates qui reçoivent le pollen. Le stigmate est spécialisé dans la réception et la reconnaissance du pollen. Sa surface est généralement recouverte de papilles, environnement humide favorable à la germination du pollen.

 

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