Prune : passer la cochenille au "Kärcher"
La cochenille du poirier fait mourir des arbres dans certains vergers de prunier d’Ente. Un décapage des troncs et des charpentières au "Kärcher" permet de réduire les colonies.
La cochenille du poirier fait mourir des arbres dans certains vergers de prunier d’Ente. Un décapage des troncs et des charpentières au "Kärcher" permet de réduire les colonies.
« La cochenille rouge du poirier est de plus en plus présente sur prunier d’Ente, constate Sébastien Cavaignac d’Invenio (Lot-et-Garonne). Et les modes de lutte sont rares surtout en agriculture biologique. » Pour pouvoir atteindre ce ravageur caché sous ses boucliers et niché dans les anfractuosités de l’écorce sous les lichens, la station arboricole d’Aquitaine a testé le nettoyeur à haute pression. Et ça marche ! « Le problème des cochenilles n’est pas fréquent en verger de prune d’Ente mais une fois installé, il est très difficile de le résoudre, continue le responsable du programme arboricole. On les trouve surtout dans les vieux vergers de gobelets dans des zones de l’arbre avec de la mousse et des lichens, peu atteintes par les produits phytosanitaires. » Les piqûres des cochenilles affaiblissent les arbres et conduisent à des mortalités de charpentières, voire des arbres. Depuis deux ans, les expérimentateurs ont passé un nettoyeur à haute pression, sur le tronc et les charpentières des arbres d’une parcelle endommagée, au stade de 20 % de boutons floraux ouverts, soit après la migration des larves. Par rapport aux arbres témoins n’ayant reçu aucun traitement, le nombre de cochenille en avril passe de 5 par cm² d’écorces à 0,1 pour les arbres passés au Kärcher. « Le nettoyeur à haute pression a permis de supprimer les zones hôtes des cochenilles (lichen et mousses) et d’éliminer les premières couches de boucliers, explique l’ingénieur. Mais certaines cochenilles, bien protégées par des renflements d’écorce, n’ont pas été supprimées, d’où la nécessité d’insister le décapage sur certaines zones et d’effectuer le nettoyage précocement et régulièrement pour éviter l’installation des cochenilles. »
Un investissement en temps
D’autres modalités ont testé l’efficacité du polysulfure de calcium (Curatio) et de l’hydroxyde de calcium (BNA pro) seuls ou combinés au décapage. Seuls, leur efficacité était faible, voire nulle. « Mais lorsque l’on combine lutte physique au Kärcher et lutte chimique, l’efficacité est améliorée », continue l’expérimentateur. Le principal frein est l’investissement en temps que nécessite cette méthode. Le traitement se fait au sol par deux opérateurs qui passent au Kärcher chaque arbre de part et d’autre de l’inter-rang. « En 2017, nous avons eu besoin de 25 h/ha pour un verger à 300 arbres/ha », confie Sébastien Cavaignac. Ce traitement est donc à envisager seulement lorsqu’on est dépassé par le ravageur. Pour savoir si un tel décapage est durable, la pérennité de ses effets sera donc observée dans le temps avec ou sans traitements phytosanitaires chaque année. « Pour gagner du temps dans l’application, nous testerons un décapage à l’eau chaude en 2019 », continue le spécialiste. A la demande du GI2E des producteurs bio de prune d’Ente qui ont commandé cet essai, un projet de nettoyeur haute pression embarqué (composé d’une cuve de plus de 1 000 l, d’une pompe et de deux lances, placés sur une remorque) est en cours d’élaboration par l’équipe machinisme d’Invenio. Le matériel conçu sera tournant dans les exploitations du Gi2E qui en ont besoin.
La cochenille à la loupe
La cochenille rouge du poirier, Epidiaspis leperii est un ravageur qui s’attaque au prunier mais aussi au pêcher, au noyer et à beaucoup d’autres espèces fruitières. C’est un petit insecte de 1,4 à 1,8 mm. Il s’observe donc plus facilement à la loupe binoculaire. Les larves sont roses. Comme la plupart des cochenilles, les adultes sont recouverts d’un bouclier qui les protège. Elle est gris blanc à blanchâtre avec une partie rouge sombre au centre. De plus, elle passe la plus grande partie de son cycle cachée sous les mousses et lichens. Le seul stade vulnérable aux produits phytosanitaires est le stade larvaire. Les larves ne sont en effet pas munies de bouclier et sont mobiles pendant quelques heures dans l’arbre, en mai et juin. Une fois installées, les larves plantent leur rostre dans le prunier pour se nourrir. Elles sécrètent alors un bouclier protecteur et poursuivent leur évolution jusqu’au stade adulte vers début août. Les mâles partent à la recherche d’une femelle et meurent après l’accouplement. Seules les femelles fécondées passeront l’hiver au verger sous leur bouclier. Elles pondent entre 30 et 50 œufs en mai et juin avant de mourir. Il n’y a qu’un seul cycle par an.