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Pommier : la défoliation au chélate de cuivre limite les populations de pucerons

Défolier ses pommiers avant l’arrivée des vols de pucerons cendrés permet de limiter les populations de ces ravageurs au printemps. L’application de chélate de cuivre à l’automne accélère la chute des feuilles et réduit la pression puceron au printemps suivant. Mais cette technique n’est pas applicable à toutes les variétés.

« La défoliation précoce à l’automne consiste à faire chuter les feuilles des arbres afin de limiter l’attractivité du pommier au moment du vol retour des pucerons cendrés dans le verger », explique Myriam Berud de la station expérimentale la Pugère (Bouches-du-Rhône). Le puceron cendré migre en effet de plantes herbacées sur lesquelles il a passé l’été vers les vergers de pommier à l’automne. Cette technique est testée depuis 2013 par la station et le Ceta de Cavaillon chez plusieurs producteurs. Elle pourrait être, dans certains cas, une alternative ou un complément aux méthodes actuelles utilisables contre les pucerons, argile à l’automne, huiles minérales en sortie d’hiver et aphicides au printemps. En agriculture biologique, les solutions existantes pour lutter contre les pucerons en fruit à pépins ne sont pas suffisantes. « Au vu du retrait des substances à base de néonicotinoïde et du peu de solutions existantes, cette technique pourrait aussi intéresser la production conventionnelle », pointe la technicienne. La défoliation manuelle étant peu envisageable, elle peut se faire en utilisant du chélate de cuivre qui va induire une phytotoxicité sur les feuilles, leur brunissement et leur chute dans les 7 à 10 jours après application, plus ou moins efficacement selon les variétés, la vigueur du verger et les conditions climatiques. « En Provence, l’objectif est d’avoir le moins possible de feuilles sur les arbres début novembre, au moment de l’intensification du vol des pucerons », précise la technicienne. La chute des feuilles est avancée d’environ un mois et demi par rapport à la chute naturelle des feuilles.

Selon la variété, le taux de défoliation varie

Sur les parcelles des producteurs du Ceta, l’application du chélate de cuivre à l’automne, en post-récolte a permis une réduction importante du pourcentage d’arbres atteints et du nombre de foyers par arbre. L’efficacité de la méthode était comprise entre 25 et 100 %. « L’action défoliante du chélate de cuivre est dépendante de la vigueur du verger, prévient Myriam Berud. Plus le verger est vigoureux, moins le chelate de cuivre aura d’effet. Selon la variété, le taux de défoliation varie. Or même s’il ne reste que quelques feuilles sur l’arbre, celui-ci reste attractif pour les pucerons. » Une taille précoce, comme celle effectuée habituellement en hiver, a donc été réalisée en complément de la défoliation au chélate afin d’éliminer un maximum de feuilles sur un essai de La Pugère. « Cette combinaison a donné de meilleurs résultats que les modalités uniquement défoliées, rapporte l’expérimentatrice. Le gain d’efficacité sur nos essais était compris entre 25 % et 40 %. La défoliation totale achevée au 1er novembre apparaît donc comme une condition nécessaire à la réussite de la technique. » La modalité la plus efficace en 2018, testée à la Pugère pour une protection en agriculture biologique, est celle combinant défoliation précoce et deux applications d’azadirachtine au printemps. Elle a eu une efficacité de 90 % sur le nombre de foyers et 54 % sur le nombre d’arbres atteints et ce en situation de très forte pression. En situation de pression plus modérée, cette technique pourrait permettre de réduire les aphicides le printemps, ce qui sera testé dans le cadre de nouveaux essais mis en place cet automne.

Un apport de près d’1 g de cuivre métal à l’hectare

Plusieurs facteurs conditionnent l’utilisation de cette technique. « Tout d’abord, elle ne peut s’appliquer qu’en post-récolte, donc seulement sur les variétés récoltées avant début octobre en Provence », prévient Myriam Berud. Si elle est appliquée trop tôt, des refleurissements peuvent apparaître lors des années douces. Des températures maximales douces avoisinant les 25°C dans les jours qui suivent l’application du chélate de cuivre, accélèrent la chute des feuilles. Un feuillage humide (rosée) au moment de l’application pourrait aussi améliorer son efficacité (en cours de validation). Enfin, le chélate de cuivre apporte de 0,9 à 1,8 g de cuivre métal par hectare, une quantité non négligeable, notamment en agriculture biologique, au vu des quantités réduites de cuivre applicables par an (4 g/an ou 28 g sur 7 ans). « C’est pourquoi nous testons d’autres produits susceptibles d’avoir la même action, indique l’ingénieure. Testé depuis 2017, le sulfate de zinc à 2 % a permis une défoliation équivalente à celle provoquée par le chélate de cuivre. A l’inverse, d’autres produits n’ont aucun effet sur la chute des feuilles. C’est le cas du Beloukha (acide pélargonique et acide nonanoïque), du chélate de fer, chélate de zinc et de l’acide acétique. »

Pas d’effets sur le retour à fleurs

Sur les six années de recul en Provence, aucun effet sur le retour à fleurs n’a été constaté sur pommier chez les producteurs qui ont expérimenté la technique. Dans l’essai de la Pugère, l’alternance déjà existante est marquée. Mais la défoliation ne semble pas affecter le retour à fleurs sur les cinq années d’essai. « En forte pression puceron, la présence de pucerons cendrés impacte plus le retour à fleurs que la défoliation », indique Myriam Berud.

Un effet contre le puceron mauve

Sur poirier en agriculture biologique, avec le manque de sélectivité de l’azadirachtine sur de nombreuses variétés dont Guyot, des solutions alternatives contre le puceron sont attendues. La technique de défoliation par application de chélate de cuivre, complétée par une taille précoce, a aussi été testée sur poirier depuis l’automne 2016 comme moyen de protection contre le puceron mauve. « L’application de chélate de cuivre fin septembre a induit une chute des feuilles rapide supérieure à 90 % dans les 14 jours après l’application. Le complément de taille manuelle à la mi-octobre a permis d’arriver à 100 % de feuilles chutées à la fin octobre », rapporte Myriam Berud de la Pugère. Avec une faible pression de puceron mauve sur Williams, la modalité défoliée n’a pas enregistré de foyers de puceron au printemps alors que 15 % des arbres étaient touchés dans le témoin non traité. En forte pression sur Guyot cette année, la défoliation a permis de limiter le puceron mauve mais d’autres pucerons ont induit des dégâts importants (puceron vert migrant, puceron noir brun). Des résultats complémentaires permettront de valider la technique dans les années à venir.

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