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L'utilisation de paillages biodégradables se développe en maraîchage bio

L’offre des paillages biodégradables se diversifie. Leur usage se développe avec intérêt, notamment pour faire face aux contraintes de recyclage du plastique. Des précautions et adaptations d’usage sont nécessaires.

Les évolutions réglementaires plus drastiques sur les plastiques agricoles font que les paillages biodégradables suscitent plus d'attention.
© RFL

Les films biodégradables intéressent de plus en plus quand la gestion des plastiques usagés très souillés devient trop onéreuse. « Ils se présentent donc comme une solution dans des cas spécifiques d’utilisation de courte durée avec de très fortes contraintes de gestion de fin de vie, sur le plan technique et financier », explique Olivier de Beaurepaire, président de la Commission biodégradable, CIPA(1).

Les laisser se décomposer dans le sol

Apparus sur les marchés dans les années 1990, ils représentent maintenant une alternative crédible, notamment pour les paillages plastiques de culture à cycle de production de trois à neuf mois. Aujourd’hui, on estime que les biodégradables constituent 1 % du marché européen de films de paillage. Mais cette part est largement plus importante auprès des producteurs en agriculture biologique. Aussi, un atelier leur était totalement dédié lors de la dernière édition de Tech & Bio en septembre dernier avec notamment la présentation de quatre paillages biodégradables, deux à base d’acide polylactique (PLA), un en papier et un en chanvre + lin (voir encadré). « La praticité due au fait qu’on peut les laisser se décomposer dans le sol après la culture, est le point commun à ces matériaux. En revanche leurs autres caractéristiques sont très différentes : facilité de pose, longévité, composition, prix… », précisait Dominique Berry, Chambre d’agriculture du Rhône. Les paillages biodégradables sont annoncés généralement pour des longévités de 3 à 6 mois.

 

A lire aussi : 8 bonnes pratiques d’utilisation des films de paillage biodégradables

 

Selon Maët Le Lan, responsable de la Station expérimentale en maraîchage de Bretagne sud qui teste de nombreux films biodégradables dans différents types de cultures légumières (abri et plein champ), les cinétiques de dégradation des films biodégradables sont des phénomènes complexes qui dépendent de nombreux facteurs parmi lesquels le rayonnement UV, la température, le taux d’humidité, les contraintes mécaniques que peut subir le film, la quantité d’oxygène dans le sol, etc. Les durées de vie, sur et dans le sol, fournies par le fabricant/fournisseur sont données à titre indicatif(2). « L’espèce cultivée et la conduite de la culture, dont la densité de plantation, ont une influence significative sur la vitesse de dégradation du film en surface. Préalablement à toutes utilisations nouvelles (espèces, type de terrain…), il est conseillé à l’utilisateur de films en matériaux biodégradables de se rapprocher des références acquises en station d’expérimentation ou de réaliser soi-même des essais sur des surfaces réduites mais significatives de l’usage envisagé qui permettront de valider le type de film retenu », précise-t-elle lors de Tech & Bio.

L’épaisseur du film est importante

Un contact régulier de l’eau avec les paillages accélère leur décomposition. « La dégradation du paillage papier, présenté sur l’atelier, est cependant plus rapide, avec des bords qui commencent à se décomposer dès deux à trois semaines, ce qui réserve potentiellement ce produit – pas encore sur le marché – aux cultures courtes et rapidement couvrantes », mentionne Dominique Berry. Il semblerait que plus l’épaisseur du film est importante, meilleure en sera la tenue au champ. Sous abri, en culture longue de tomates par exemple, les films ne sont pas soumis à de très fortes contraintes. Ainsi, les essais menés à Auray depuis quelques années visent à réduire l’épaisseur des films pour cet usage. « De 17 µm, nous sommes aujourd’hui passés à 12 µm et souhaiterions descendre en dessous des 10 µm. En effet, la réduction de l’épaisseur est un levier efficace sur la réduction du prix de la bobine. Encore faut-il trouver des extrudeurs capables de le faire », commente Maët Le Lan.

Certains paillages sont également proposés avec des durées de vie de l’ordre de deux à trois ans, pour les rendre utilisables sur des cultures pérennes. Concernant leur composition, seul le Géochanvre est uniquement composé de matériaux naturels, les fibres étant liées par de l’eau sous pression. Les paillages PLA (à base d’acide polylactique) et Mater-bi (à base d’amidon) présentés, ainsi que le papier (en raison de son traitement hydrophobe), contiennent en effet des liants ou des résines d’origine fossile. On distingue deux types de paillages biodégradables sur base PLA pour acide polylactique. Pour les deux premiers types de paillages, le PLA et/ou l’amidon sont mélangés à du PBAT (polybutyrate adipate terephtalate). Le PLA avec PBAT fabriqué par BASF est de l’Ecovio. L’amidon associé à du PBAT est le Mater-bi fabriqué par Novamont.

Le programme Icap caractérise des paillages

Selon le CPA (Comité des plastiques en agriculture), plusieurs études récentes, dont certaines présentées lors du congrès du CIPA en 2018 à Arcachon, ont démontré la validité écologique du paillage biodégradable, notamment en analysant son évolution dans le sol. Le plafonnement des quantités de paillage présentes dans le sol ainsi que l’assimilation du carbone dont il est composé donnent l’assurance de sa complète biodégradation, mais également de sa bio-assimilation par la faune et la flore. Depuis peu, une nouvelle norme européenne d’application française est en vigueur, la EN NF 17033. Selon cette nouvelle norme, la disparition de 90 % de film dans le sol doit être effective au bout de deux ans et non un an comme dans la précédente. Elle porte également sur le produit fini, composants + liants + encre, et non sur la matière première comme c’était le cas auparavant. Dans cette nouvelle norme, de nombreux tests d’écotoxicité sont également demandés.

Attention à ne pas confondre biodégradable et biosourcé (d’origine renouvelable). Un produit biodégradable n’est pas forcément biosourcé (le PBAT par exemple n’est pas d’origine renouvelable) et a contrario un produit peut être biosourcé mais non biodégradable ! Dans le sud-est de la France, le programme Icap, qui vise à l’inventaire et la caractérisation des paillages biodégradables en culture légumière, a été initié par l’Aprel, les Chambres d’agriculture des Bouches-du-Rhône et du Vaucluse et le Grab en relation avec le CPA et Adivalor. « Des démonstrations seront réalisées avec différents films de paillage sur cultures palissées sous abri, melon et salade sous abri et en plein champ, à partir de 2020, afin d’évaluer les performances de ces films, et d’apporter des éléments de choix aux producteurs », précise Catherine Taussig, Aprel. Un pré-projet sur les films biodégradables utilisables en culture de melon est également conduit par le CPA (voir page 87). Sur le plan pratique, les films biodégradables peuvent être posés avec le même matériel que celui utilisé habituellement pour les films polyéthylène, avec toutefois une tension un peu moindre (voir page 46). « Les prix s’échelonnent de 0,12 à 0,18 €/m² pour les paillages à base de PLA, et de 0,7 à 1,30 €/m² pour le Géochanvre selon les quantités commandées. Le coût est donc au minimum deux fois supérieur à celui de paillages PE (en polyethylène), ce qui est à prendre en compte », mentionnent les auteurs de Brassica(3).

sources :
(1) Plasticulture 2019
(2) Guide de bonnes pratiques Utilisation des films de paillage biodégradables
(3) Bulletin technique de la Serail et des Chambres d’agriculture Auvergne-Rhône-Alpes.

Paillages biodégradables en démonstrations sur le Pôle Maraîchage du salon Tech & Bio 2019

Walki-Agripap Nordic mulch 76

papier + couche hydrophobe biodégradable sur les 2 faces.

Fabricant : Walki (Finlande, antenne française à Oullins - 69).

Produit non encore commercialisé.

 

 

 

Biopolyane +

PLA + liants biodégradables

Epaisseurs : 12-15 ou 17 μm.

Durée de vie annoncée : 2 à 6 mois (existe pour cultures pérennes en durée 12 à 36 mois)

Fabricant :

(Saint-Chamond - 42)

 

 

Eurobio NT CLHR

Résines fossiles et biosourcées + PLA.

Epaisseur 14 μm.

Durée de vie annoncée : 4 à 8 mois

Fabricant : Europlastic (Aimargues - 30).

 

 

 

 

Herbi’Chanvre lin 400 g/m²

100 % fibres de chanvre et lin liées par eau sous forte pression.

Durée de vie annoncée : 6 à 9 mois selon sol, pose et irrigation.

Fabricant : Géochanvre (Lézinnes - 89).

 

Ce que dit la réglementation en AB

Une modification récente, juillet 2019, insérée dans le guide de lecture de l’agriculture biologique, a semé le trouble quant à l’origine des matériaux de film de paillage effectivement utilisables en AB. « Le texte inséré visait à préciser les conditions d’utilisation des paillages biodégradables et confirmait l’interdiction des plastiques biofragmentables ou oxo-fragmentables en rappelant le principe de base de préserver la fertilité du sol », explique Olivier Catrou, responsable du Pôle agriculture biologique de l’Inao. Pour le paillage naturel, seul est possible le recours aux matériaux naturels, type fibres végétales, inscrits à l’annexe 1 du RCE n°889/2008 de la Commission qui réglemente la production biologique. Pour le plastique biodégradable, « la réflexion s’oriente vers l’autorisation des matériaux répondant à la nouvelle norme EN NF 17033 qui devrait être soumise à l’avis du Comité national de l’AB de janvier 2020 », mentionne Olivier Catrou.

Les paillages PLA (à base d’acide polylactique) et Mater-bi (à base d’amidon) entrent dans cette norme.

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