L’expérimentation en projet
Un rapport sur l’optimisation du fonctionnement de la gouvernance des stations régionales d’expérimentation fruits et légumes sera prochainement remis au président du Ctifl. Le projet d’un réseau unique donne déjà lieu à des débats constructifs.
Un rapport sur l’optimisation du fonctionnement de la gouvernance des stations régionales d’expérimentation fruits et légumes sera prochainement remis au président du Ctifl. Le projet d’un réseau unique donne déjà lieu à des débats constructifs.

A l’occasion du salon Vinitech-Sifel, la station régionale d’expérimentation Invenio a organisé une conférence-débat sur l’avenir du paysage de la recherche et du développement dans la filière fruits et légumes française, le 30 novembre dernier à Bordeaux. Le choix du sujet a été guidé par l’actualité puisque Hervé Piaton, membre du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), présent à la journée, va prochainement remettre les résultats et les propositions de sa mission sur « l’optimisation du fonctionnement et de la gouvernance des stations régionales d'expérimentation fruits et légumes » au ministre de l’Agriculture (voir Questions page 16).
Remette les producteurs au centre de l’innovation
Pour cet audit, débuté au printemps dernier à la demande du Ctifl (Réussir F & L février 2016), Hervé Piaton a recueilli les réponses de 33 des 35 stations régionales et visité nombre d’entre elles en rencontrant leurs responsables. Ainsi, il a pu faire un état des lieux et une analyse de la situation déjà présentés dans le cadre de comités de pilotage et restitués à Bordeaux en présence de plus de 120 professionnels de la filière. De son constat, Hervé Piaton avance certaines propositions qui devront être validées par le ministre de l’Agriculture avant d’être remises au président du Ctifl. Après clarification des compétences des différents acteurs impliqués dans l’expérimentation (Ctifl, stations régionales, organisations de producteurs, chambres d’agriculture), le projet porte sur la gouvernance professionnelle d’un réseau unique organisé au niveau régional sur un projet partagé. Il se base sur une adaptation des modes de financement et sur la structuration de l’activité scientifique et technique du réseau. Ces propositions ont ensuite été débattues lors d’une table ronde. Ainsi, Vincent Schieber, président d’Invenio, la plus grosse station régionale d’expérimentation, appelle de ses voeux la mise en place de ce réseau. « Mais l’expérimentation ne peut se faire sans l’implication des producteurs qui ont soif d’innovation », a-t-il précisé, lui-même producteur. Même implication pour Jean-Michel Ruchaud, producteur de légumes et de fraise et président de Propulso. « Les besoins d’expérimentation sont créés par l’ambition que l’on peut avoir dans nos entreprises », a-t-il assuré. En acquiesçant cette implication, Jacques Rouchaussé, président du Ctifl a également mentionné l’obligation de prendre en compte les besoins de la filière et l’attente des consommateurs. Il a également souhaité le maillage Inra-Ctifl-stations régionales-chambres d’agriculture qui, dans le rapport de Hervé Piaton, pourrait exister au niveau régional sous forme de « clusters ». Reconnaissant que le modèle recherche-innovation-production ne fonctionne plus, Hubert de Rochambeau, président du centre Inra de Bordeaux, a relevé « l’importance de remettre les producteurs au centre du système de l’innovation ». Le déplacement de l’Inra vers la recherche de plus en plus fondamentale, reproché par les professionnels, se justifie selon lui dans l’anticipation et l’accompagnement de problématiques à venir. « L’apport du numérique permettra également à la recherche de changer de dimension grâce à l’accumulation et l’échange de volumes croissants de données », a précisé le chercheur. « Muscler les GIS » (groupement intérêt scientifique) fait également partie du projet présenté pour resserrer les partenaires de cette chaîne d’innovation et de compétitivité.
L’expérimentation ne peut se faire sans l’implication des producteurs »
VINCENT SCHIEBER, Président d’Invenio
Je ne veux plus de division mais co-construire avec les stations régionales car demain nous ne ferons plus qu’un »
JACQUES ROUCHAUSSÉ, président du Ctifl
« Demain nous ne ferons qu’un »
Toutefois, si ce réseau doit permettre de partager des compétences et de disposer de moyens inaccessibles à une seule structure, « sa stratégie ne doit pas être simpliste et doit s’appuyer sur les entreprises et leur besoin de compétitivité » a fait remarquer François Lafitte, président de la Gefel représentant trois millions de tonnes de fruits et légumes organisées par les organisations de producteurs. Celui-ci souhaite également voir, comme d’autres participants, l’expérimentation financée par une CVO (Cotisation volontaire obligatoire) à laquelle auront accès les stations régionales. Cette dernière fait partie des propositions en cours, reste à en déterminer l’assiette : prélèvement à tous les stades de la filière ou limité à son amont ? Elle pourrait ainsi constituer la contrepartie professionnelle aux crédits publics. Ces financements doivent répondre aux soucis de pérennisation des stations. En effet, Jacques Rouchaussé n’a pas écarté « le risque de disparition de stations régionales et a insisté sur le renforcement de celles qui vont bien ». En Nouvelle Aquitaine, Jean-Pierre Reynaud, vice-président de la région, était présent pour apporter l’assurance de l’accompagnement « d’une co-construction de stratégies définies par les producteurs ». Dans la nouvelle dimension régionale, celle-ci concerne Invenio, l’Acpel, l’Adida, l’ANPN, le BIP, le Ctifl de Lanxade et le Centre Inra de Bordeaux. Dans sa conclusion, Vincent Schieber a donc « lancé les invitations pour bâtir ce réseau unique d’expérimentation, au moins au niveau régional, le doter d’un conseil d’orientation scientifique et de moyens financiers grâce à la mobilisation des producteurs et l’engagement de la région ». Le président du Ctifl a encouragé les stations à se rapprocher de sa structure, visiblement satisfait et en accord avec les propositions du rapport qui doit lui être prochainement remis : « Je ne veux plus de division mais co-construire avec les stations régionales car demain nous ne ferons qu’un. »