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Les chrysopes protègent la salade

Une stratégie de protection biologique a été élaborée pour lutter contre les pucerons des salades, à partir de lâchers larves de chrysope. Producteurs bio et conventionnels la pratiquent.

En Provence, les hivers parfois très doux permettent aux pucerons de se développer à un rythme rapide sous abris, puis de se disséminer grâce aux individus ailés. Ainsi, Nasonovia ribisnigri, principal puceron de la salade, est redouté, notamment en agriculture biologique. Les pucerons peuvent être présents dès la plantation, et causer la perte d’une grande partie des salades plantées. Ils se développent dans le cœur des plantes, peu affecté par les produits de contact et les auxiliaires parasitoïdes. La résistance que confèrent certaines variétés peut permettre de limiter le développement du puceron mais des cas de contournement de la résistance sont observés.

Faire des apports réguliers

Aussi, suite aux observations et aux essais réalisés dans la région, une stratégie de protection a été mise au point à partir de larves de chrysope. Cette stratégie a été élaborée et testée sur des exploitations maraîchères des Bouches-du-Rhône depuis 2013, et notamment à travers le Réseau Ferme Dephy maraîchage animé par la Chambre d’Agriculture des Bouches-du-Rhône. Alors que les larves de chrysope sont habituellement lâchées sur les cultures de printemps-été dès les premiers petits foyers de puceron pour une action curative, la stratégie est différente en salade d’abri et de plein champ. « La détection difficile des pucerons dans la culture impose une protection préventive. Les chrysopes ont un long cycle de développement, l’objectif n’est donc pas d’installer la population mais de faire des apports réguliers » explique Laurent Camoin, chambre d’agriculture. Les larves sont donc lâchées en préventif et régulièrement sur la culture afin d’avoir une efficacité maximale à la récolte. « En l’absence de puceron sur les plants à la plantation, le premier lâcher a lieu 2 semaines après la plantation. Puis un lâcher est programmé toutes les deux semaines jusqu’à deux semaines avant la récolte » précise la fiche réalisée par le CA13 et l’APREL. La fréquence peut être modulée en fonction du cycle de la salade, et de la présence de puceron sur la culture. Cinq larves par m² sont lâchées à chaque opération. La dose est à ajuster selon la présence de pucerons sur l’exploitation, les installations (filets, etc.) et les conditions climatiques plus ou moins favorables au développement des pucerons. En raison de la présence des cosses de sarrasin (support de conditionnement), les lâchers se font sous forme de poquets déposés sur le paillage et répartis de façon homogène sur toute la surface cultivée. « Jusqu’au stade 9-10 feuilles de la salade, il est possible de disperser à la volée les larves et le support sur la culture, mais attention à bien parer les feuilles de la base lors de la récolte » précise le conseiller. La mise en place de cette stratégie nécessite quelques adaptations techniques pour la conduite de la culture. Ainsi, l’irrigation, ou le bassinage, doit être réalisé au moins 1 jour avant ou minimum 2 jours après un lâcher, car il y a un risque très important de noyade des larves.  

Une technique coûteuse mais efficace

« Attention, des produits de traitement même autorisés en AB peuvent être incompatibles avec les chrysopes » prévient Laurent Camoin (voir en Savoir plus). S’ils sont utilisés, il faut veiller à positionner le traitement préférentiellement 15 jours minimum avant un lâcher en raison de la rémanence du produit sur le feuillage. Ne pas faire de traitement après un lâcher. A ce jour, cette technique est assez coûteuse. Un lâcher de 5 individus/m² coûte environ 0,06€ HT/m² et la stratégie coûte au total entre 0,18€/m² et 0,24€/m² selon le nombre de lâcher et la pression en puceron sur l’exploitation. Il est préférable d’acheter les chrysopes par seau de 10 000 individus pour baisser le prix de l’auxiliaire. Le temps par lâcher est en moyenne de 2,5 à 3h/ha. « La lutte biologique à l’aide de chrysope a été expérimentée et utilisée de façon généralisée en Agriculture Biologique où elle s’est bien développée en Provence. Depuis peu, elle est pratiquée par des producteurs conventionnels qui commercialisent leur production en vente directe notamment » conclut Laurent Camoin.

Un auxiliaire de culture redoutable

La larve de chrysope est un auxiliaire de culture redoutable. Elle mesure de 0,2 à 1 cm de long, de couleur marron-gris et est munie de forts crochets. Ses proies préférées sont les pucerons de toutes tailles et espèces, mais aussi les aleurodes, les acariens, les thrips, des œufs de lépidoptères, et des cochenilles. Dans le cas d’excès de nourriture, elle tue davantage de proies qui sont alors consommées partiellement. En cas de rareté des proies, la larve devient cannibale. En culture de salade, elle se cache dans le cœur de la plante, ce qui facilite la protection de la culture, puisque c’est là que sont les pucerons. La larve saisit sa proie grâce à ses crochets, lui injecte un fluide salivaire qui liquéfie le contenu du puceron, puis l’aspire. Le reste de la proie est difficilement retrouvable. Durant son développement, elle consomme environ 350 pucerons de toute taille. La larve de chrysope supporte des températures entre 10 et 35°C. En dessous de 10°C, son développement est freiné, mais se poursuit. Occasionnellement, elle supporte des températures en dessous de 0°C, ce qui est le cas lorsque les salades gèlent certains matins. Au dessus de 35°C, les larves ne survivent pas. Il est donc important de bien aérer les abris.

Des compléments de protection

Aphidius matricariae et autres Aphidius sp peuvent parasiter d’autres espèces de pucerons présentes sur les salades. Mais aucun auxiliaire de type parasitoïde ne permet actuellement de lutter efficacement contre le puceron du cœur de la salade Nasonovia ribisnigri.

Les larves de coccinelle et de syrphe ne sont pas utilisées pour des raisons technico-économiques, mais peuvent être présentes sur salades.

Les filets dit « à pucerons » de type Filbio peuvent être installés sur les ouvrants et aux entrées des abris pour freiner l’arrivée des pucerons. Cependant, il faut veiller à gérer de façon optimale l’humidité dans les abris. En revanche, les filets dits « à bourdons » ne sont pas suffisants pour les pucerons car la maille est trop large.

L’excès de nitrates favorise le développement des pucerons. Il est important de pratiquer une fertilisation au plus près des besoins de la culture.

 

En savoir plus :

La fiche "Se protéger des pucerons" (Aprel)

Rédaction Réussir

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