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ARBORICULTURE
La nutrition se raisonne par groupe

Raisonner la nutrition par groupe fonctionnel plutôt que par éléments simples : c’est le conseil du spécialiste Alain Kleiber après une étude comparative entre vergers fertilisés avec des engrais organiques ou de engrais minéraux.

La fertilisation organique continue à poser question. « Pour étudier et comprendre les différences pour l’arbre entre fertilisation organique et minérale, nous avons comparé des résultats d’analyses foliaires de pommiers et pêchers de vergers fertilisés exclusivement avec l’un ou l’autre des types de produits », a annoncé Alain Kleiber, référent nutrition végétale en plantes pérennes au laboratoire Auréa Agrosciences lors de la séance Arbo organisée par la Sefra (26). Les différences de teneurs entre les deux groupes d’échantillons de feuilles s’expliquent principalement par les interactions entre les différents éléments. « Chaque fonction de l’arbre est assurée par des éléments qui interagissent entre eux, explique Alain Kleiber. C’est pourquoi la nutrition ne se raisonne pas par éléments mais par groupes fonctionnels ». Par exemple, le groupe fonctionnel photosynthèse implique l’azote, le magnésium, le soufre, le fer et le manganèse. Tous ces éléments sont liés les un aux autres par des phénomènes de synergie ou d’antagonisme. « En cas de manque de l’un des quatre autres éléments, l’azote ne peut être totalement fonctionnel. On observe ainsi une baisse de l’efficacité de l’azote proportionnel au déficit en manganèse, continue le spécialiste. A contrario, il y a un fort antagonisme entre magnésium et manganèse, l’un des éléments prenant facilement la place de l’autre ». Les analyses de feuilles des parcelles à fertilisation organique présentent un taux d’azote légèrement inférieur à celles des vergers avec engrais minéral. « Ce n’est pas l’azote du sol qui décroche mais les taux en fer et manganèse, plus faibles en fertilisation organique, analyse Alain Kleiber. Les taux de magnésium sont eux plus élevés en fertilisation organique, magnésium qui prend la place du fer et du manganèse et donc réduit l’efficience de l’azote dans la plante ». Le magnésium est présent dans beaucoup d’engrais organiques, et certains sols en sont naturellement riches.

Travailler la texture du sol pour rendre le phosphore assimilable

Ces teneurs plus faibles en manganèse et fer en fertilisation organique, s’expliquent aussi par les taux supérieurs en cuivre. « Au niveau du sol, le cuivre est un antagonisme du fer et du manganèse, mentionne l’agronome. En excès, il oxyde ces deux éléments, ce qui provoque des chloroses induites. En sol acide, l’excès de cuivre est toxique. Et dans le végétal, le cuivre rend le fer et le manganèse insolubles, accentuant les phénomènes chlorotiques ». Si le cuivre est un élément indispensable pour la croissance du végétal, c’est son excès qui est le plus difficile à gérer surtout en production biologique. Autre phénomène d’antagonisme ionique : les nitrates (NO3-) et les phosphates (PO4H2-). Tout excès instantané d’azote dans la solution du sol va limiter les prélèvements de l’arbre en phosphore, surtout en début de végétation. « Les plus fortes teneurs en phosphore des feuilles des parcelles à fertilisation organique s’expliquent en partie par des teneurs en azote plus faibles en début de végétation, ce qui favorise l’absorption du phosphore », clarifie Alain Kleiber. Mais l’absorption du phosphore est aussi très fortement liée à la texture, la structure du sol et à son pH. « Quand on a un problème de phosphore, mais aussi de magnésium, il faut d’abord travailler sur la texture du sol. Or la fertilisation organique a un effet positif sur celle-ci et donc favorise, à terme, la biodisponibilité du phosphore ». Si les différences entre les deux groupes d’analyses trouvent des explications, Alain Kleiber relève surtout une plus grande variabilité dans les teneurs trouvées dans les feuilles des parcelles organiques. « Ces différences observées à l’intérieur du groupe des parcelles à fertilisation organique sont en partie liées à des objectifs techniques, qualitatifs et quantitatifs très différents dans ce groupe. Alors que le groupe de parcelle "minérale" apparaît comme plus homogène ».

Le bore et le potassium, traceurs du potentiel hydrique

Entre les échantillons de feuilles de vergers fertilisés avec des engrais minéraux ou organiques, aucune différence n’apparaît dans leur teneur en bore et potassium. « L’assimilation de ces deux éléments est très liée aux flux hydriques dans le végétal », explique Alain Kleiber d’Auréa Agrosciences. Toute irrégularité dans l’apport en eau des arbres pénalise leur assimilation. « Les teneurs en potassium et en bore dans des feuilles sont donc plus des indicateurs de la qualité d’irrigation que de leur teneur dans le sol », conclut le spécialiste.

Des couples de parcelles comparées

Pour réaliser cette étude, 548 « couples pommiers » et 173 « couples pêchers » ont été constitués. Chaque couple est composé des résultats des analyses de feuilles d’une parcelle avec engrais minéral et d’une parcelle avec engrais exclusivement organique. Pour diminuer les facteurs de différence, les échantillons couplés ont été choisis avec la même date de prélèvement, sur la même espèce, sur des variétés proches et provenant de parcelles les plus proches possibles géographiquement. Cette approche statistique essaie de compenser par des grands nombres son manque de précision par rapport à un essai au champ.

 

Indicateurs de stade physiologique

Selon le stade physiologique, certains éléments sont présents dans la plante à des teneurs différentes. C’est le cas du magnésium et du calcium qui s’assimilent au fur et à mesure du vieillissement foliaire. « Le rapport N/Ca des feuilles permet de caractériser leur état physiologique, souligne Alain Kleiber, d’Auréa Agrosciences. En phase juvénile ce rapport est supérieur à 2. Quand il est égal à 2, les feuilles sont entrées en phase adulte. Le rapport devient inférieur à 1 quand les feuilles sont sénescentes ». Dans les analyses de feuilles étudiées, le rapport N/Ca est plus élevé sur les parcelles fertilisées par des produits minéraux. Ce qui signifie qu’à la même date, les feuilles des parcelles à fertilisation minérale sont plus « jeunes » que celles des parcelles à fertilisation organique

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